Lilas13 a écrit : ↑01 septembre 2021, 22:58
Bonjour Melrose,
Ton message était magnifique...j’ai pleuré à chaudes larmes du début à la fin tellement ce manque me parle, nous parle à tous je pense.
Cela fait des mois que je viens sur ce forum et tes messages, depuis toutes ces semaines que je te lis chaque mardi, relatent tellement ce que je ressens. J'ai l'impression de lire mes pensées. Certains autres messages aussi. Je crois que seuls les paranges se comprennent, les autres l'imaginent peut-être un peu mais sont à des années lumières de nos sentiments profonds.
Cela fait 7 mois que ma bulle de bonheur a volé en éclat, que ma petite puce m'a quitté, que je pleure sans arrêt. Rien qu'en écrivant, mes larmes inondent mon visage. Je me réveille le matin en pensant à elle. En pleurant. Je me dis que je n'avais pas envie de me réveiller, de ne plus me réveiller pour ne plus souffrir. Je crois que beaucoup de mamanges ont eu cette envie. Que seuls nous, nous comprenons. Le soir je me couche en pleurant sans faire trop de bruit car je ne veux pas que mon mari s'en rende compte pour pas qu'il ne s'inquiète encore plus et qui se rende compte que je ne vais toujours pas bien. Car je ne vais pas bien. Pourtant mes deux autres enfants sont là, mon mari aussi. Mais ils ne me suffisent plus, je veux elle, ma toute petite...
Je vais avoir 45 ans dans quelques mois. J'ai su que j'étais enceinte à 43 ans et demi et devait accoucher à 44 ans passé. C'était magique, inespérée car je n'y croyais plus à mon âge. J'avais fait une fausse couche à 42 ans et demi et je pensais que cela ne marcherait plus. Puis ma toute belle s'est logée en moi. Quel bonheur, je planai, je savais que c'était magique et précieux. Une autre petite fille, nous en rêvions. J'avais peur des 3 premiers mois puis des risques de trisomie, puis des malformations mais chaque rdv médical était bon. Je me projetai et rêvais de toi sans retenue. Juste l'accouchement me faisait peur si césarienne ou autre problème. Quelle idiote...le jour de l'accouchement, ce n'est pas la douleur physique qui était là mais celle du cœur qui reste encore meurtrie et en miettes depuis 7 mois maintenant.
Ma fille a 11 ans et mon fils 15 ans. Ils attendaient avec impatience leur petite sœur. Cela faisait des années que je rêvais de ce petit dernier bébé. Ma fille était aux anges, elle lui faisait déjà des dessins et des bracelets. Comme j'étais fière de la porter, si fière, heureuse de me promener avec elle dans mon ventre. Je faisais tout avec elle, j'ai été avec elle tant de mois que j'ai l'impression qu'on me l'a volé d'un coup. Ne plus la sentir bouger, ne plus lui parler, elle me manque tellement, cela me broie le cœur. Je me sens vide, seule.
J'étais à 34sa+5 ce maudit mardi, le 19 janvier. La veille, elle gigotait beaucoup le matin, l'après-midi je ne m'en souviens plus et dans la nuit de lundi à mardi, elle bougeait beaucoup aussi. Pourquoi je ne me suis pas inquiétée? Car elle bougeait souvent et là c'était plus que d'habitude. Pourquoi je n'ai pas compris qu'elle voulait peut-être me dire quelque chose? Pourquoi je ne suis pas aller aux urgences? je m'en veux tellement, je me déteste...comment ai-je pu croire que cela se passerait bien sans être très vigilante jusqu'au bout? La gynéco m'a dit que cela pouvait être des périodes de fortes agitations. La psy qui me suit me dit que "personne" ne va aux urgences car son bébé bouge beaucoup. Que cela n'avait pas à m'inquiéter. Qu'en sait-elle malgré qu'elle essaie de m'aider?
Le mardi matin, comme chaque matin, je me suis assise après ma douche en posant mes mains sur mon ventre pour la sentir bouger. Je faisais cela chaque matin pour vérifier que tout allait bien. C'était notre moment du matin. Ce matin là, elle a un peu bougé puis le hoquet (cela lui arrivait parfois) puis un gros hoquet. Je pense que c'était ton dernier souffle ce hoquet mais à ce moment là je ne le savais pas. Ce n'est que vers 10h que j'ai commencé à m'inquiéter. A 14h je suis allé aux urgences pour dire que je ne la sentais plus. La SF m'a dit "effectivement" en tournant l'écran de l'écho et en me disant : "regardez, c'est tout noir, alors qu'on devrait voir son cœur". C'était si violent, en quelques heures tout a basculé dans l'horreur. Je ne peux raconter l'accouchement, juste que la douleur physique était tellement insignifiante par rapport à la douleur morale et du cœur. Elle était si belle. Quand je l'ai vu, j'ai eu envie de partir en courant avec elle. Elle avait des traits si fins, si beaux, des cheveux noirs comme son papa alors que son frère et sa sœur étaient châtains à leur naissance. Elle pesait 2 kilos, elle était parfaite. Tellement belle. Notre petite Thylane que nous aimerons à tout jamais et de manière incommensurable.
Son père n'a pas voulu la voir, il ne s'en sentait pas le courage, pour se protéger je suppose. Moi, je ne pouvais pas ne pas la voir, elle avait grandit en moi, c'était battu pour grandir en moi, je n'aurai pas pu ne pas la prendre dans mes bras même si ce fut très dur. On rêve qu'elle ouvre les yeux et que ce cauchemar s'arrête.
Je faisais du diabète gestationnel diagnostiqué durant le 5ème mois. Je me piquais et vérifiais le taux 4 fois/jour et la diététicienne m'avait même dit de ne le faire plus que 1 fois par jour (à jeun le matin) car j'arrivais à réguler dans la journée. Je préférai continuer à le faire 4 fois par jour pour être sûre que tout allait bien, que je ne dépassais pas le taux.
Je repasse en boucle cette veille de sa mort si souvent comme pour changer la fin de l'histoire. Je cherche des réponses pour savoir qu'est-ce qui s'est passé. La gynéco m'a dit que des fois on ne sait pas, c'est la mort subite in utéro. Ou bien un mauvais échange et si j'avais pris de "l'***** nourrisson" cela ne se saurait peut-être pas passé ainsi. Que c'est la fatalité...la gynéco m'a dit "la prochaine fois, si prochaine fois, je vous donnerai de l'***** nourrisson". Mais...elle ne semble pas se rendre compte qu'à mon âge, ce n'est plus possible surement...que c'était la dernière fois que j'aurai le bonheur d'être enceinte. Pourquoi me la donner et me la reprendre, c'est si dur...
Je me dis que c'est ma faute, qu'elle a du souffrir à cause de moi. Mon bébé, pardonne moi, je m'en veux tellement de ne pas t'avoir protégé. Avec ce diabète, je surveillais tout ce que je mangeais et achetai que les produits indiqué par la diabétologue. Mais, après réflexion je me rappelle que la diabétologue nous avait dit, en groupe, qu'on pouvait manger 2 fruits par jour. J'avais choisi la pomme et la poire uniquement pour leur IG bas par rapport à tous les autres. Du moment que notre taux ne dépassait pas. Et la gynéco le mois d'avant m'avait dit 2 fruits par semaine. J'ai suivi les conseils de la diabétologue mais est-ce que je n'aurai pas dû écouter plutôt la gynéco plus sécuritaire? pourquoi je n'ai pas demandé un autre avis médical même si mes taux étaient bons? est-ce cela qui a causé ta perte, ce maudit diabète. Je n'ai dépassé le taux que 3 fois en 3 mois. Seul écart était un carré de chocolat noir en fin de repas de temps en temps. Est-ce que c'est cela? La psy me dit que non car quasiment pas de sucre, qu'il aurait fallut que ce taux soit beaucoup plus élevé. Que le taux aurait été plus important si le diabète n'était pas régulé. Et dans ce cas ils donnent de l'insuline. Je n'avais pris que 2 kilos depuis le début de la grossesse à cause du diabète et ma fille était dans la courbe normale à l’échographie du T3. Cette échographie passée 1 semaine avant où il m'avait dit que tout allait bien. J'en avais choisi un réputé sur la ville que j'habite (une grande ville) pour justement être plus rassuré par rapport à l'échographiste de l'hôpital. J'avais vu mon obstétricienne 5 jours avant et me disait aussi que tout allait bien. Pourquoi je n'ai pas demandé des monitorings pour le suivi du T3 en raison de mon âge et diabète? Pourquoi je leur ai fait confiance? Est-ce que cela aurait changé l'histoire? Pourquoi ne me l'ont-ils pas proposé? Car pour eux, tout allait parfaitement (mon poids, ton poids, mes taux, mes analyses, les échos). Est-ce que tu serai avec moi aujourd'hui?
Oh ma puce comme tu me manques. J'ai ta photo sur mon portable mais je te regarde moins...cela me fait trop mal et de toute manière ton visage, ton corps, tes petites mains sont gravés dans ma mémoire à tout jamais. Tu sais, je n'ai plus peur de mourir car je sais que je serai avec toi quand ce jour viendra. Mais....la culpabilité me ronge, je vais sur pleins de sites pour essayer de comprendre ce qui s'est passé, cela me consume. Cela pourrait être une position dans la nuit? une compression du cordon? Et si j'avais plus mangé, tu aurais eu plus de place? On m'aurait déclenché si tu avais été plus grosse? car ce qui m’anéantis c'est de me dire que à 34 sa tu n'étais pas considéré comme prématuré...Et toutes ces recherches sur internet, à quoi cela sert? tu n'es plus là...
On a pas fait l'autopsie, juste l'amnio et l'étude du placenta qui n'ont rien révélé, trop dur sur le moment mais maintenant je regrette, cela m'aurait peut-être permis d'atténuer cette culpabilité.
Une amie, heureusement qu'elle est là, qui a perdu aussi un bébé au début du 4ème mois, la seule que j'ai voulu voir pendant tous ces mois, m'a dit que je ne pouvais rien me reprocher, que j'avais pris que 2 kilos, que j'avais fait attention. Elle m'a dit que peut-être tu avais une malformation non décelable et que tu aurais eu un problème, et que dans ce cas tu es partie et que c'est "mieux" ainsi car cela t'épargne une vie de souffrance. Peut-être...cela me "console" un peu si c'est le cas mais si cela n'est pas ça? Car je pense que tu était viable et que cela a basculé en quelques heures, cela me déchire le cœur...
J'ai repris le travail la semaine dernière, c'était dur, les gens vivent normalement alors que moi, mon monde s'est effondrée. Je vis depuis dans un monde parallèle. Cela m'a permis de me reconnecter au monde socialement car je n'ai voulu voir ni parler à quasiment personne pendant des mois.
Cet été fut très dur car on aurait dû être 5. Je voyais des bébés partout, des petites filles partout. Tu aurais été si douce et belle, j'en suis certaine.
Mon mari, heureusement qu'il est là, lui et les enfants, dit "qu'il faut avancer", j'ai l'impression qu'il a retrouvé sa vie d'avant comme "si on avait remonté le temps". Je ne minimise pas sa douleur bien sûr mais il n'en parle plus. Pour ne pas souffrir en en parlant? Pour protéger nos enfants? Pour m'éviter d'y penser? je ne sais pas...Quand j'ai les larmes qui montent, il me dit d'avancer. Avancer de quoi? Pour mes enfants, pour lui, j'essaie, vraiment, mais pour l'instant je suis en mode "robot" avec encore des litres de larmes.
Dés que je pense à elle (très souvent) les larmes montent. Et en ce moment, je me rappelle, il y a un an, j'entamais mon 4ème mois, j'étais si heureuse. Je ne savais pas encore que tu étais une petite fille car tu étais en tailleur ou en boule à chaque visite chez l'obstétricienne. Tu nous faisais patienter pour savoir si on achetait du rose ou du bleu. Comme je t'aime ma puce.
Le trajet du retour de mon travail, j'explose et je pleure à chaudes larmes.
Si j'avais été plus jeune, j'aurai voulu un autre enfant pour, non pas la remplacer bien évidemment, mais apaiser ma peine. Cela est si difficile de se dire que ma dernière grossesse est celle de la fatalité, que je ne tiendrai plus de bébé de nous deux pour le cajoler. Je sais que tu seras à jamais irremplaçable mais cela aurait mis de "l’insouciance d'enfant" dans nos vies. Je vous "envie" les mamanges qui peuvent encore avoir un bébé arc-en-ciel...
Je sais que jamais plus je ne pourrai être légère et heureuse complétement. Ma puce, avec toi, une partie de moi est morte. Je ne vis pas, je survis. Tu me manques tellement.
Ainsi, je n'avais pas pu écrire sur ce forum depuis des mois que je viens lire les messages de chacun. Ce soir je trouve le "courage" (je hais ce mot que tous nous disent) de déverser tous mes sentiments à vous qui comprenez, à toi Melrose. Je ne sais pas où tu habites en France mais je vis, à quelques ou beaucoup de kilomètres, la même douleur que toi, que vous tous. Je pense bien à vous tous, j'ai le sentiment de ne pas (hélas) être seule à vivre cette torture morale et du cœur. Mes journées sont rythmées entre culpabilité, tristesse et colère.
Tous nos bébés n'auraient jamais dû nous quitter, pas un bébé, pas une maman et un papa qui attendent avec impatience leur tout petit....
Douce pensée à tous et à nos bébés tant aimés à jamais.