J'ai fait mon IMG hier à presque 15 semaines SA, par curetage.
En parcourant les témoignages, j'ai d'abord pensé que je ne pourrais pas écrire ici parce que je n'ai pas connu l'accouchement ; Par curetage, on se réveille et il n'est plus là.
Mais ma douleur est tellement grande, que je me suis dis tant pis, pourquoi ne pas écrire aussi.
Je suis porteuse d'hémophilie A sévère avec inhibiteur. J'ai donc une chance sur deux que ma fille soit conductrice, une chance sur deux que mon garçon soit atteint.
J'ai toujours voulu faire un DPI, mais je suis tombée enceinte
J'ai vu mon père souffrir de l'hémophilie durant sa courte vie (décès à 33 ans) il avait également été contaminé par le HIV et l'hépatite C dans les années 80 à l'hôpital où il était traité. L'hémophilie se traite mieux aujourd'hui certes, mais les souvenirs et la souffrance qu'engendre toujours cette maladie au quotidien nous ont poussé à décider d'une IMG.
A 9SA, première mauvaise nouvelle, nous apprenons que c'est un garçon. Plus qu'une chance sur deux. S'en suit une attente de 3 semaines avant la biopsie, nous découvrons émerveillés notre bébé à l'échographie.
S'en suit une nouvelle attente de quelques jours, les généticiennes nous convoquent et nous annoncent que le bébé est porteur de la mutation. Je m'effondre en larmes, quant à mon compagnon, difficile pour lui de se retenir.
Ces 3 mois nous ont paru comme 10 ans.
Tout au long de la semaine jusqu'à l'IMG, nous avons tout retourné dans notre esprit pour l'éviter, mais cette option nous a semblé "inévitable".
Le matin de l'IMG pourtant à jeun, j'ai beaucoup vomi à cause du stress et du mal être je pense.
J'ai bien le sentiment d'avoir pris la bonne décision. J'ai tout fait pendant ces 3 mois pour ne pas me projeter avec l'enfant mais je l'ai aimé malgré moi. Je perds un enfant que j'aime et que je n'ai jamais vu de mes propres yeux, je ne l'ai porté que 3 mois et pourtant, j'en ai pleuré tous les jours et en pleure encore.
Les symptômes de la grossesse ne sont plus là et mon ventre est désespérément vide, il me manque.
Ma soeur et moi sommes tombées enceintes à deux semaines d'intervalle. Alors que j'apprenais que c'était un garçon malade, elle apprenait au même moment qu'elle attendait une fille (bonne nouvelle).
Je ne peux pas m'empêcher de la voir comme mon reflet dans le miroir, poursuivant sa grossesse avec toute la joie qu'elle entraîne - Nouvelle maison, préparatifs. J'ai peur de ne pas me réjouir pour ma nièce, peur de visualiser l'ombre de mon bébé à ses côtés toute ma vie.
Tout le monde se réjouit pour cette grossesse et moi je me sens comme "l'oiseau noir" du cercle familial.
Bref, je prie le plus fort possible que la souffrance s'apaise avec le temps, même si je n'oublierai jamais ce qui restera toujours pour moi mon premier bébé.