Pour les athées : Où est votre enfant?

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Caroline20032020
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Pour les athées : Où est votre enfant?

Message par Caroline20032020 »

Bonsoir à toutes et à tous,

Ma deuxième fille est née au mois de mars. Je vous passe les détails, mais une malformation cardiaque très complexe à été découverte à l'échographie morphologique. Le diagnostique précis et le pronostique sont tombés un mois plus tard. Rien n'aurait pu sauver Léa. Nous avons décidé d'interrompre la grossesse, en un ultime cadeau d'amour à notre fille : une vie d'absolue plénitude. J'ai accouché de ma merveilleuse, ma si belle, ma si douce Léa à 26SA.

Depuis l'annonce de sa malformation, j'ai beaucoup cheminé, et continue mon petit bonhomme de chemin encore à ce jour. Ces derniers temps, j'ai réalisé que je n'avais aucune croyance sur ce qu'était devenue Léa. Je suis complètement athée et jusqu'ici je me suis bornée à penser qu'elle était sur sa pelouse, en cendres, point. Mais je sens que ça ne me suffit pas. Je pense avoir besoin de croire quelque chose, quelque chose qui relève plus du symbolisme que de la croyance religieus. Vous me suivez ? Léa est elle avec moi tous les jours du reste de ma vie, juste parce que je lui fais une belle place dans mon cœur aux côtés de sa grande sœur ? Léa est elle une comète qui a traversé nos vies ?

Je sais que personne ne pourra me donner une réponse à cette question. Mais je suis curieuse. Et vous, avez vous eu besoin de vous appuyer sur une quelconque spiritualité, croyance après le décès de votre enfant ?

Je pense aussi qu'une partie de mon questionnement est lié à la vie après la mort, mais dans le sens de savoir : comment faire vivre nos morts ?

Merci de m'avoir lue, et pensées à toutes les mamans (et les papas !) de ce forum.

Caro
Modifié en dernier par Caroline20032020 le 05 septembre 2020, 15:25, modifié 1 fois.
Caroline

Maman d'une petite fille née sans vie en mars.
Juli1
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Re: Pour les athées : Où est votre enfant?

Message par Juli1 »

Bonsoir Caroline,

Pour ma part je serais plutôt agnostique, cependant la problématique est la même.
Parfois, je pense que mon bébé est simplement dans sa tombe, et de façon très terre à terre je me dis que la moitié de mon patrimoine génétique y est également enterré.
A d'autres moments je me dis qu'il est peut être quelques part avec mon grand-père pour veiller sur lui. J'ai bien conscience que c'est peu probable, mais parfois cette croyance me fait du bien.
Sinon quelques fois je vois des petits événements comme des signes : la pluie qui devient neige le temps de l'enterrement, un arc en ciel la première fois que l'on retourne sur sa tombe, une comète découverte le jour de son "anniversaire"...
Grâce à notre fils, nous avons découvert que d'autres personnes de notre entourage avaient vécu la même chose. Nous avons aussi fait une belle rencontre, qui ne serait jamais arrivé sans ce drame : une mère qui a perdu sa fille de 23 ans nous a contacté en laissant un mot sur la tombe. Nous échangeons depuis régulièrement...

Notre enfant nous accompagne chaque jour dans nos pensées, sur le tatouage de ma compagne ou via les empreintes gravées sur mon pendentif.
Nous le faisons "vivre" lorsque nous prononçons son prénom.

Nous avons un peu de mal avec les termes "par'anges" et "anniverciel" à cause de la référence religieuse aux anges et au ciel où monteraient les défunts. Pour autant il nous arrive de les utiliser faute d'autres mots adéquats.

J'espère t'avoir apporté quelques pistes de réponses.

Douces pensées à ta fille Léa.

Julien.
Modifié en dernier par Juli1 le 06 septembre 2020, 23:04, modifié 1 fois.
Julien, Équipe de modération de Petite Emilie
Papa d'un garçon né sans vie au printemps 2019 (34SA) & d'un bébé DPI né mi-janvier 2022
"Cela aussi passera" Légende Perse - Recueil de liens
Aurély
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Re: Pour les athées : Où est votre enfant?

Message par Aurély »

Bonjour Caroline

Je ne pouvais pas laisser ton message sans réponse de ma part tant mon point de vue a évolué depuis la perte de ma petite Celeste.
Mon parcours spirituel est plein de contradictions : je ne suis pas baptisée mais j’ai été dans une école primaire catholique et j’ai eu des cours de catéchisme pendant 5 ans. Par la suite je n’ai jamais pratiqué mais il m’arrivait parfois de prier dans des moments de doute et/ou de désespoir.

Quand nous avons perdu notre fille, mon conjoint m’a dit plusieurs choses pour me réconforter à sa façon : que nous avions rencontré notre ange gardien, que l’âme de notre fille reviendrait à travers l’enveloppe d’un autre bébé, que ses parents veilleraient sur elle dans le ciel...
Même si ces mots sont un peu « farfelus » d’un point de vue spirituel, ils m’ont beaucoup apaisé.

Et puis spontanément j’ai ressenti le besoin de rentrer dans les églises ou cathédrales que nous croisions sur notre route pour allumer des cierges. A chaque fois je me remets à pleurer mais cela me libère et à chaque fois je prie en demandant au Seigneur de protéger ma Celeste, de m’aider à survivre ici bas, et de m’envoyer des signes pour que je sache dans quelle direction aller.

Je suis retombée enceinte à quelques jours de ma DPA.
J’y ai vu un signe, et même si cette grossesse se déroule pour l’instant avec beaucoup d’angoisses (suite à des saignements et un décollement), je continue de prier tous les jours car j’ai besoin de croire que maintenant les dés sont jetés pour ce futur bébé et que c’est pour moi la seule façon « d’agir ».
Pour aller plus loin, je me suis même promis que si ce bébé naît en bonne santé, il sera baptisé.

Voilà où j’en suis aujourd’hui, moi qui n’était pas croyante du tout, j’ai eu besoin de croire !
J’ai même hésité à demander à voir un prêtre pour avoir son avis sur le devenir de nos bébés anges et sur la signification à donner à un événement pareil.
Pour l’instant par pudeur et timidité je n’ai pas osé franchir le pas...

Je te souhaite de cheminer vers l’apaisement dans tous les cas et peu importe la voie qui t’y mènera.
Ma fille avait également des malformations cardiaques complexes donc nous avons un parcours qui se ressemble.
N’hésite pas si tu veux échanger

Je t’embrasse
Pensées à nos anges
Aurélie

Mamange de Céleste, ma petite poupée, ma merveille... née le 13/04/20 à 24SA+1
🌈 Diane arrivée le 14/04/2021 juste 1 an et 1 jour après sa sœur.

Un peu de moi sur Instagram : aurelyceleste
Caroline20032020
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Re: Pour les athées : Où est votre enfant?

Message par Caroline20032020 »

Bonjour,

Et merci de vos réponses qui m'ont fait réfléchir. En en discutant aussi avec mon compagnon, je réalise que moi qui pensais ne croire en rien, en fait je crois.

J'ai été éduquée dans la culture chrétienne mais pas dans la Foi. Je ne crois en aucun Dieu. Jusqu'ici je ne m'étais pas posée la question de la vie après la mort.

Aujourd'hui, je réalise que la vie après la mort est importante pour moi. Mais je ne crois rationnellement en aucun paradis. Selon moi, après la mort, il ne reste qu'une enveloppe physique et des souvenirs. Et ce sont ces souvenirs qui nous permettent de continuer à vivre après notre mort, en une sorte de vie éternelle : Dans la mémoire des personnes qui nous ont connu, de nos descendants et pour certains, dans la mémoire collective de l'humanité.

Ma petite fille n'est dans aucun paradis. Elle continue de vivre quand je pense à elle et quand je parle d'elle. Sa place est dans mon cœur et dans celui de ceux qui l'ont aimée même en l'ayant peu connue. D'où l'importance de lui offrir vraiment et sincèrement cette place, de continuer à la nommer et à raconter son histoire.

Ça, c'est ce que je crois.

Après, il y a aussi ce qui me rassure. Tout comme toi, Julien, il m'arrive de penser que mes grands parents s'occupent d'elle. Ca m'offre du réconfort même si ce n'est pas ce que je crois vraiment au fond de moi. Et tout comme vous, nous avons un peu de mal avec les termes qui font référence au ciel. A mon aînée, je préfère lui parler de sa "petite sœur dans son cœur" que de sa "petite sœur du ciel" même s'il m'arrive parfois aussi d'utiliser ces mots car ils sont, pour des adultes, plus parlant. J'avais aussi entendu l'histoire d'un enfant qui s'inquiétait de ne pas voir les morts en levant les yeux au ciel, c'est également une raison pour laquelle j'évite ces termes avec elle.

Et enfin, il y a les coïncidences que j'aime bien interpréter comme des signes. Pour moi ce ne sont pas des signes que ma fille m'envoie, mais des petits hasard de la vie ou tout semble s'aligner au bon moment, et c'est réconfortant. Tout récemment, j'ai reçu un bouquin de développement personnel que j'ai pas aimé mais qui m'a conduit à entamer le rangement de toute ma maison, et ce au moment même où je réalisais que je n'ai pas vraiment donné de place à Léa dans ma vie. Ca m'a donné de l'énergie à un moment où j'en avais besoin et j'aime y voir "un signe".

Moi qui trouve pourtant les mots très importants, je ne savais jamais comment présenter son décès. Je disais : "j'ai perdu un bébé" en rassurant rapidement mon interlocuteur "mais ça va on a eu le temps de s'y préparer, et puis c'est moins pire que... (au choix : perdre un enfant qui est déjà né, perdre son bébé subitement,.....)". Et d'ailleurs, j'ai ressenti l'envie quasi immédiate de faire un troisieme bébé, sans avoir vraiment pris ni la mesure de ce qui était arrivé, ni le temps d'accueillir vraiment Léa dans ma vie. Ces derniers jours m'ont fait réfléchir et je n'hésite plus sur les mots à mettre sur son décès. J'ai eu deux enfants. On a découvert une maladie à ma deuxième fille, et nous lui avons apporté tous les soins que des parents peuvent apporter à leur enfant. Nous avons eu un mois pour nous préparer à sa mort. Nous l'y avons accompagnée. Nous sommes ses parents et elle est notre enfant.

Et puis finalement, je te rejoins Aurélie, j'ai aussi besoin de donner du sens a cette épreuve. Personnellement, je choisis de voir en quoi ça a transformé la femme que je suis aujourd'hui en un être certes moins insouciant mais plus mature. Jusqu'ici, je pensais contrôler ma vie en faisant plan après plan. Ce qui est arrivé à Léa m'aura appris que ce n'est qu'une illusion de contrôle. Et que de ce fait, je n'ai d'autre choix que de lâcher prise et me laisser porter par les événements. Je me dis aussi souvent que tout va bien et je perçois plus en conscience les moments de joie et de bonheur. Je me sens beaucoup plus sereine aujourd'hui que je ne l'étais avant Léa. J'ai lu ton post sur les peurs bien légitimes qui t'habitent pour la santé de ton deuxième bébé. Je te souhaite de trouver ce qui pourra les apaiser. Je suis aussi passée par une phase où j'avais souvent peur de toutes sortes de choses qui pourraient arriver, prenant soudain conscience que je ne jouis d'aucun passe-droit sur les merdes de la vie. Alors je me répète encore que tout va bien, et j'essaye de m'ancrer dans le présent (je vais bien, je respire, j'ai des yeux pour voir, des oreilles pour entendre, mon conjoint et ma fille sont en bonne santé, je suis entourée d'amour et j'ai de la chance) plutôt que de m'inquiéter de la catastrophe suivante. On dit aussi qu'une nouvelle grossesse ne se dissocie vraiment de la première qu'une fois passé le terme où cette dernière s'est arrêtée. Car jusque là, il y a souvent plus de points de comparaison que de différence. Et qu'ensuite seulement, l'histoire de ces deux bébés peut s'écrire différemment. Moi je pense que chaque parent vit cela de façon unique, mais j'avais trouvé intéressant de penser que c'est dans la différence qu'on peut reconnaître un nouvel être et une nouvelle histoire.

Pensées à nos enfants,

Caroline
Caroline

Maman d'une petite fille née sans vie en mars.
AnaetMinhTri
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Re: Pour les athées : Où est votre enfant?

Message par AnaetMinhTri »

Bonjour,

Pour ma part, je suis très cartésienne et n'ai aucune spiritualité il me semble... Comme Juli1, je ne suis pas à l'aise avec la notion d'ange, paranges etc. De beaux mots, mais qui ne me conviennent pas.
J'ai été élevée dans une culture judeo-chrétienne comme beaucoup en France et en Europe (mes parents n'ont pas de bons souvenirs de leur enfance en école privé catholique et n'ont jamais pratiqué par la suite, nous élevant dans le respect des croyances des autres mais sans nous en imposer aucune).
Mon compagnon a lui été élevé dans une culture bouddhiste et le respect des ancêtres décédés. Son rapport à la mort est différent. Cela n'enlève pas du tout sa peine, ce n'est pas ce que je veux dire, mais il a une vision différente. Tout de suite, il m'a dit que notre petit était partout, avec nous. Qu'il avait rejoint ses ancêtres et protégeait la famille. Sa grand-mère (au Vietnam) nous a demandé une photo de Camille qu'elle a joint aux photos des personnes de sa famille déjà décédées : tous les jours, elle fait ses offrandes et ses prières pour eux.
J'ai des amies catholiques et pratiquantes qui ont dit des prières pour Camille.

A chaque personne qui me dit qu'elle prie pour lui (quelle que soit la religion), je la remercie car ça me touche beaucoup. Pour ma part, je n'en ressent pas le besoin et je ne saurais pas comment faire, d'ailleurs !

Tout de même, pour me rassurer (c'est très naif, mais tant pis ;) ), j'aime imaginer que Camille est dans une grande nurserie avec plein de bébés (je l'appelle parfois le "paradis des bibous"), des gentilles personnes qui s'occupent d'eux, leur chantent des chansons. Les ancêtres viennent le voir et lui raconter des histoires. J'imagine que les bébés rebondissent sur les nuages en riant, pleurent au moment du coucher, gigotent dans leurs turbulettes.
J'y pensais très souvent au début. Maintenant j'y pense lorsque j'ai vraiment la grande vague de tristesse qui arrive. Cela doit être un mécanisme de défense car l'idée que Camille soit dans le noir, le froid et tout seul est insupportable.

Je sais bien que son enveloppe corporelle n'est plus là. Et plus ça va, plus je sais qu'il est un peu partout, là où j'ai envie qu'il soit, là où il pourrait être. Dans la fleur de geranium au bord de la fenêtre, dans la douceur de sa peluche lapin. Je lui fait des bisous qui s'envolent dans le vent et je suis sûre qu'ils atteignent leur cible. Il arrivera un moment où ce "paradis des bibous" ne sera plus nécessaire.
Je vais aussi au cimetière le 2 de chaque mois pour déposer un origami en forme de petit animal. J'avais commencé à en faire pour un mobile à accrocher au dessus du berceau et j'ai gardé l'idée. J'ai décidé de faire cela pendant la première année. Ensuite, on verra. Si j'en sens le besoin etc.

C'est peut-être un peu spirituel ?! Je ne sais pas mais l'important est de trouver ce qui nous fait du bien.

Ana
Maman de petit Camille, né sans vie le 2 janvier 2020.
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