Nino
Posté : 18 mai 2017, 11:25
Mon Petit Nino,
Même si on n'était pas d'accord sur ton prénom avec ton Papa, le jour où il nous a vraiment fallu choisir car tu allais partir, ce fut une évidence. En fait tu t'es toujours appelé Nino... au plus profond de moi tu ne t'es jamais appelé autrement...
En novembre, nous avons fêté les 30 ans de la marraine de ton frère... et de cette fête a découlé un oublie de 48H dans ma contraception... cette fine barrière entre mon désir viscéral d'être mère à nouveau et le refus de ton père de donner un petit frère ou une petit soeur à notre grand Hugo. Quelques jours plus tard tu étais encré en moi... Nous sommes passés par toutes les émotions.
J'ai eu peur d'annoncer à ton père que tu étais là, peur qu'il croit que j'avais fait exprès, peur qu'il me quitte, peur que notre famille vole en éclat à cause de moi... Je ne me voyais pas faire une IVG, ton père a eu la présence d'esprit de comprendre que ce n'étais pas contre lui... et nous avons fini par décider de te faire la place qui te revenais... mais pas tout de suite... il fallait attendre les résultats pour la T21. La dessus nous étions clair. Si ils étaient positifs, tu n'aurais pas vu le jour.
Et puis vient le temps de la prise de sang, de l'échographie... et tu es parfait! Tu es déjà vif, aucun signe de malformation quelconque... on se décide à l'annoncer, on se projette, on le dit à ton grand frère... Il a sauté de joie! Tu aurais vu ça.... ! Tu étais désiré par lui plus que tout au monde!
Puis viens la deuxième échographie... tu es joueur, tu te colles à la sonde, il y a trop d'artefacts pour voir comme il faut ton petit coeur... mais tout le reste est bon, et tu es déjà un sacré gaillard! Un petit mec qui comme son grand frère, ne veut pas qu'on le prenne en photo dans mon ventre. Donc rdv est prit 15 jours plus tard pour vérifier ton coeur... mais rien de bien grave! Ton frère nous a fait la même chose!
Et là, à l'échographie à laquelle je vais seule car papa n'a pas pu se libérer ( et puis c'est juste une vérification)... je vois la tête de la sage femme... je la connais, elle me connait, elle sait que ça ne sert à rien de me cacher les choses, que je suis un esprit rationnel qui a besoin de savoir et de comprendre...
L'image n'est pas bonne, les quatres cavités ne sont pas présentes, ou du moins pas égales. Ca ne va pas. Il faut pousser plus loin! Mais voilà, ce sont les vacances scolaires, et personne n'est présent dans les villes environnantes et même a Bordeaux personne ne peut me recevoir. Comme nous avons prévu des vacances avec ton grand frère, nous partons quand même, nous verrons ça au retour. Pas la peine de le punir lui, de le priver de vacances pour un diagnostique qu'on ne connait pas... mais nous attendons un coup de fil de Bordeaux pour savoir quand est ce que nous devrons y aller pour une écho cardiaque et une écho de référence.
Heureusement / Malheureusement, Papa et moi étant dans le milieu médical, nous savons bien que des malformations cardiaque chez le foetus il y en a plein. Plein d'opérables / réparables... qui nécessitent des soins mais qui se soignent... alors on essaie de pas trop s'en faire, on se dit que ça va aller...
RDV est prit, ce sera le 2 mai, le jour où je suis censée reprendre le boulot. Tant pis j'annule ma journée, tu es prioritaire, il faut qu'on sache. Mais papa ne peut pas, les obligations au travail sont trop importantes, et on est sur que se n'est rien! Je pars donc seule...
Je rencontre la cardio-pédiatre qui me dit bien qu'elle ne parle pas pendant l'échographie pour pouvoir se concentrer sur les images. Je comprend tout a fait... elle fait l'écho... puis me fait passer dans un bureau pour le résultat... le bureau de la psychologue.... ça sent pas bon!
Elle s'assoit, prend des schémas, et commence à m'expliquer... mais avant elle me demande si Papa peut nous rejoindre? Si quelqu'un peut venir me chercher... j'ai peur, j'ai compris, j'attends le verdict... Ton coeur n'est pas fonctionnel! IL n'existe pas d'opération curative, que des opérations palliatives, lourdes, difficiles et avec peu de chance de survie malgré tout... des années de souffrances, une enfance tronquée, des stages longs à l'hôpital, des retards de développements,... je m'écroule! Qu'est ce que j'ai fait de mal pour t'infliger ça... d'après elle, rien! Elle ne veut pas me laisser partir sans avoir vu la psychologue voir si je suis en état de reprendre la route... mais j'ai déjà l'autre rdv pour l'échographie de référence, et de toute façon il faudra que je la fasse... et c'est là que sont prononcé pour la première fois les mots: interruption médicale de grossesse!
Ton papa m'envoie des messages pour avoir des nouvelles... je n'arrive pas à lui répondre. Enfin j'ai l'autorisation de me rendre à l'autre hôpital pour faire la deuxième écho.
J'appelle ton papa... la sentence tombe... je le remercie d'avoir prit si vite cette décision que je savais nécessaire mais que je n'arrivais pas à formuler.
Je pars pour l'échographie. L'obstétricienne me demande si je veux éteindre l'écran où si je veux te voir... mais je sens bien que ce sont les dernières images que je verrais de toi... je veux te voir. Et elle me confirme qu'en dehors de ton coeur qui a décider de ne pousser qu'à moitié, tu es parfait. Tu pèse déjà 850g... il va falloir accoucher... mon dossier passe en commission le soir même, mas vu l'importance de ta pathologie cardiaque, il ne fera aucune doute que l'IMG sera validée...
Je rentre.
2 heures de route...
Je pense à ton grand frère et à ton père... à ce que je vais bien pouvoir leur dire... à comment je vais pouvoir continuer à avancer?
J'appelle mon médecin, il faut que je dorme... il me donne de quoi dormir...
Nous avons décider d'en parler le soir même à ton grand frère.... il est très intelligent du haut de ses 4 ans et demi. IL nous voit triste, il faut qu'il comprenne pourquoi... il est déçu, mais ne comprend pas de suite... il lui faudra du temps. On lui en a laissé.
Les jours qui suivent, il faut trouver un remplaçant, prendre les rdvs, se lancer dans les démarches, faire monter les papis mamies pour s'occuper de ton grand frère, prendre nos dispositions pour ce qui nous attends la semaine suivante.
Et voilà, mardi, nous sommes face au staff qui va nous prendre en charge. Qui nous explique l'acte en lui même, les démarches à faire par la suite, les droits,... et l'hospitalisation est prévue pour le mercredi soir.
Au moment de partir pour l'hôpital ton grand frère pleure beaucoup. Il voudrait te voir, qu'on revienne avec toi, qu'on ne partent pas en fait, mais surtout qu'on reviennent le plus vite possible à ses côtés. Tout le monde à du mal à retenir ses larmes, et même ton papi pleure dans mes bras. C'est un nounours, il a peur pour sa fille...
Le soir, nous ne restons pas dans la chambre d'hôpital... on va se balader, on tente de parler de l'après... de se projeter... mais c'est tellement dur. Toi tu me montre à quel point tu es présent, tu bouges, tu me chatouilles... et je sais que ce sont les derniers instants de partage. C'est trop dur pour mon coeur qui ne cesse de pleurer...
Le jeudi matin tout s'accélère... on m'avait annoncé qu'on venait me chercher pour 10h... mais voilà à 9h15, on vient me chercher... je ne suis pas prête, je n'ai pas prit ma douche à la bétadine... je file vite sous la douche, un dernier coup d'oeil à se ventre qui était censé te protéger des attaques de l'extérieur, te permettre de grandir de te construire, de te couver pour que tu sois en pleine forme... et je descend au bloc avec papa.
Je craque, tu bouges, comme si tu me disais au revoir, comme si tu comprenais, puis plus fort, comme si tu voulais au contraire t'accrocher...
Puis vient la pose de la péridurale, et je sais que je ne te sentirais plus jamais, je craque encore! plus longtemps, plus fort...
Enfin on permet à ton papa de me rejoindre... on pleure tous les deux, on se dit à quel point l'un et l'autre on est désolés, à quel point on s'en veut d'avoir à te faire ça et à quel point ce n'est pas la vie que nous espérions pour toi, pour ton grand frère, pour toute la famille...
Et la péri a du mal à agir, je sens qu'ils piquent, qu'ils te cherchent... on me remet une dose, je ne sens plus rien.... et l'instant d'après, la gynéco qui nous annonce que c'est finit, que ton petit coeur s'est arrêté, que tu es parti tranquillement... mon coeur se brise à nouveau, et celui de ton papa aussi...
On nous emmène ensuite en salle de naissance... et nous faisons la connaissance de celle qui t'a mis au monde. Un personne extra ordinaire. Le déclenchement commence, la péri fait son effet, et à la deuxième prise de médicament tout s'accélère... la seringue est vide, il faut la changer, mais la poche des eaux s'est fissurée et les contractions sont intenses et douloureuse... le temps d'appeler l'anesthésistes, qu'il m'injecte un peu plus, tu es prêt à sortir, et je n'ai été soulagée qu'après que tu sois sorti... tu es né de ma souffrance mais je crois que c'est mieux comme cela.
Nous t'avons pleuré avec ton papa... des torrents de larmes de peine, de déception, de soulagement que l'accouchement soit enfin fini... et puis j'ai demandé à te voir!
Papa n'a pas voulu car il voulait garder à l'esprit l'image qu'il s'est fait de toi. Je le comprend. Tu étais si beau... tu ressemblais tellement à ton grand frère.... tu étais déjà grand, et tu pesais déjà 1kg100... tu étais magnifique et tu semblais tellement en paix... on aurait vraiment dit que tu dormais... il m'a fallut du temps pour assimiler le fait que tu n'ouvrirais pas tes petits yeux, que tes petits mains ne serreraient jamais les miennes, que je n'entendrais pas le doux son de ta petite voix d'enfant... Je suis restée avec toi un moment, puis je t'ai rendu aux sages femmes... elles t'ont prises en photo, ont prit tes empreintes... tu étais si TOI. Ton prénom t'allais très bien!
Et puis je suis remontée en chambre. J'étais épuisée par cette journée et je me suis endormie.
Le lendemain, nous sommes sortis dès que nous avons pu, pour rejoindre ton grand frère... mais avant de partir, je suis passée te voir une dernière fois. Je suis venue te dire adieu, te chanter une berceuse et te donner le doudou qui avait été validé par ton grand frère...
La route du retour a été dure et longue... avec ce sentiment horrible de t'abandonner... une deuxième fois.
Mais il nous faut continuer à vivre, il nous faut être encore plus présent pour ton grand frère qui est encore petit, mais suffisement grand pour comprendre la douleur de ton absence. Il parle de toi, pose des questions, est triste de ne pas te voir grandir... tu es le frère qu'il n'a jamais eu...
Depuis nous vivons au jour le jour... avec notre douleur et notre désir d'avancer, notre peur de te laisser derrière et notre besoin de continuer à vivre malgré tout.
Cela fait une semaine aujourd'hui que tu t'es endormi pour toujours et que j'espère que tu es bien là où tu es. Je sais bien que ton petit corps n'est pas toi, et pourtant j'ai parfois la furieuse envie de refaire la route pour aller te voir... mais déjà le lendemain tu n'habitais plus ce petit corps... alors aujourd'hui ce serait encore pire.
Je t'aime de tout mon coeur mon petit Nino, ma surprise, mon désir, mon ange.
Tu nous manques à tous les trois... nous ne t'oublierons pas...
Tu nous a permis de nous retrouver avec ton papa, de discuter, de nous ouvrir l'un à l'autre comme nous ne l'avions pas fait depuis longtemps. Merci mon petit Nino.
Repose en paix... au paradis des bébés où ton frère t'imagines.
Même si on n'était pas d'accord sur ton prénom avec ton Papa, le jour où il nous a vraiment fallu choisir car tu allais partir, ce fut une évidence. En fait tu t'es toujours appelé Nino... au plus profond de moi tu ne t'es jamais appelé autrement...
En novembre, nous avons fêté les 30 ans de la marraine de ton frère... et de cette fête a découlé un oublie de 48H dans ma contraception... cette fine barrière entre mon désir viscéral d'être mère à nouveau et le refus de ton père de donner un petit frère ou une petit soeur à notre grand Hugo. Quelques jours plus tard tu étais encré en moi... Nous sommes passés par toutes les émotions.
J'ai eu peur d'annoncer à ton père que tu étais là, peur qu'il croit que j'avais fait exprès, peur qu'il me quitte, peur que notre famille vole en éclat à cause de moi... Je ne me voyais pas faire une IVG, ton père a eu la présence d'esprit de comprendre que ce n'étais pas contre lui... et nous avons fini par décider de te faire la place qui te revenais... mais pas tout de suite... il fallait attendre les résultats pour la T21. La dessus nous étions clair. Si ils étaient positifs, tu n'aurais pas vu le jour.
Et puis vient le temps de la prise de sang, de l'échographie... et tu es parfait! Tu es déjà vif, aucun signe de malformation quelconque... on se décide à l'annoncer, on se projette, on le dit à ton grand frère... Il a sauté de joie! Tu aurais vu ça.... ! Tu étais désiré par lui plus que tout au monde!
Puis viens la deuxième échographie... tu es joueur, tu te colles à la sonde, il y a trop d'artefacts pour voir comme il faut ton petit coeur... mais tout le reste est bon, et tu es déjà un sacré gaillard! Un petit mec qui comme son grand frère, ne veut pas qu'on le prenne en photo dans mon ventre. Donc rdv est prit 15 jours plus tard pour vérifier ton coeur... mais rien de bien grave! Ton frère nous a fait la même chose!
Et là, à l'échographie à laquelle je vais seule car papa n'a pas pu se libérer ( et puis c'est juste une vérification)... je vois la tête de la sage femme... je la connais, elle me connait, elle sait que ça ne sert à rien de me cacher les choses, que je suis un esprit rationnel qui a besoin de savoir et de comprendre...
L'image n'est pas bonne, les quatres cavités ne sont pas présentes, ou du moins pas égales. Ca ne va pas. Il faut pousser plus loin! Mais voilà, ce sont les vacances scolaires, et personne n'est présent dans les villes environnantes et même a Bordeaux personne ne peut me recevoir. Comme nous avons prévu des vacances avec ton grand frère, nous partons quand même, nous verrons ça au retour. Pas la peine de le punir lui, de le priver de vacances pour un diagnostique qu'on ne connait pas... mais nous attendons un coup de fil de Bordeaux pour savoir quand est ce que nous devrons y aller pour une écho cardiaque et une écho de référence.
Heureusement / Malheureusement, Papa et moi étant dans le milieu médical, nous savons bien que des malformations cardiaque chez le foetus il y en a plein. Plein d'opérables / réparables... qui nécessitent des soins mais qui se soignent... alors on essaie de pas trop s'en faire, on se dit que ça va aller...
RDV est prit, ce sera le 2 mai, le jour où je suis censée reprendre le boulot. Tant pis j'annule ma journée, tu es prioritaire, il faut qu'on sache. Mais papa ne peut pas, les obligations au travail sont trop importantes, et on est sur que se n'est rien! Je pars donc seule...
Je rencontre la cardio-pédiatre qui me dit bien qu'elle ne parle pas pendant l'échographie pour pouvoir se concentrer sur les images. Je comprend tout a fait... elle fait l'écho... puis me fait passer dans un bureau pour le résultat... le bureau de la psychologue.... ça sent pas bon!
Elle s'assoit, prend des schémas, et commence à m'expliquer... mais avant elle me demande si Papa peut nous rejoindre? Si quelqu'un peut venir me chercher... j'ai peur, j'ai compris, j'attends le verdict... Ton coeur n'est pas fonctionnel! IL n'existe pas d'opération curative, que des opérations palliatives, lourdes, difficiles et avec peu de chance de survie malgré tout... des années de souffrances, une enfance tronquée, des stages longs à l'hôpital, des retards de développements,... je m'écroule! Qu'est ce que j'ai fait de mal pour t'infliger ça... d'après elle, rien! Elle ne veut pas me laisser partir sans avoir vu la psychologue voir si je suis en état de reprendre la route... mais j'ai déjà l'autre rdv pour l'échographie de référence, et de toute façon il faudra que je la fasse... et c'est là que sont prononcé pour la première fois les mots: interruption médicale de grossesse!
Ton papa m'envoie des messages pour avoir des nouvelles... je n'arrive pas à lui répondre. Enfin j'ai l'autorisation de me rendre à l'autre hôpital pour faire la deuxième écho.
J'appelle ton papa... la sentence tombe... je le remercie d'avoir prit si vite cette décision que je savais nécessaire mais que je n'arrivais pas à formuler.
Je pars pour l'échographie. L'obstétricienne me demande si je veux éteindre l'écran où si je veux te voir... mais je sens bien que ce sont les dernières images que je verrais de toi... je veux te voir. Et elle me confirme qu'en dehors de ton coeur qui a décider de ne pousser qu'à moitié, tu es parfait. Tu pèse déjà 850g... il va falloir accoucher... mon dossier passe en commission le soir même, mas vu l'importance de ta pathologie cardiaque, il ne fera aucune doute que l'IMG sera validée...
Je rentre.
2 heures de route...
Je pense à ton grand frère et à ton père... à ce que je vais bien pouvoir leur dire... à comment je vais pouvoir continuer à avancer?
J'appelle mon médecin, il faut que je dorme... il me donne de quoi dormir...
Nous avons décider d'en parler le soir même à ton grand frère.... il est très intelligent du haut de ses 4 ans et demi. IL nous voit triste, il faut qu'il comprenne pourquoi... il est déçu, mais ne comprend pas de suite... il lui faudra du temps. On lui en a laissé.
Les jours qui suivent, il faut trouver un remplaçant, prendre les rdvs, se lancer dans les démarches, faire monter les papis mamies pour s'occuper de ton grand frère, prendre nos dispositions pour ce qui nous attends la semaine suivante.
Et voilà, mardi, nous sommes face au staff qui va nous prendre en charge. Qui nous explique l'acte en lui même, les démarches à faire par la suite, les droits,... et l'hospitalisation est prévue pour le mercredi soir.
Au moment de partir pour l'hôpital ton grand frère pleure beaucoup. Il voudrait te voir, qu'on revienne avec toi, qu'on ne partent pas en fait, mais surtout qu'on reviennent le plus vite possible à ses côtés. Tout le monde à du mal à retenir ses larmes, et même ton papi pleure dans mes bras. C'est un nounours, il a peur pour sa fille...
Le soir, nous ne restons pas dans la chambre d'hôpital... on va se balader, on tente de parler de l'après... de se projeter... mais c'est tellement dur. Toi tu me montre à quel point tu es présent, tu bouges, tu me chatouilles... et je sais que ce sont les derniers instants de partage. C'est trop dur pour mon coeur qui ne cesse de pleurer...
Le jeudi matin tout s'accélère... on m'avait annoncé qu'on venait me chercher pour 10h... mais voilà à 9h15, on vient me chercher... je ne suis pas prête, je n'ai pas prit ma douche à la bétadine... je file vite sous la douche, un dernier coup d'oeil à se ventre qui était censé te protéger des attaques de l'extérieur, te permettre de grandir de te construire, de te couver pour que tu sois en pleine forme... et je descend au bloc avec papa.
Je craque, tu bouges, comme si tu me disais au revoir, comme si tu comprenais, puis plus fort, comme si tu voulais au contraire t'accrocher...
Puis vient la pose de la péridurale, et je sais que je ne te sentirais plus jamais, je craque encore! plus longtemps, plus fort...
Enfin on permet à ton papa de me rejoindre... on pleure tous les deux, on se dit à quel point l'un et l'autre on est désolés, à quel point on s'en veut d'avoir à te faire ça et à quel point ce n'est pas la vie que nous espérions pour toi, pour ton grand frère, pour toute la famille...
Et la péri a du mal à agir, je sens qu'ils piquent, qu'ils te cherchent... on me remet une dose, je ne sens plus rien.... et l'instant d'après, la gynéco qui nous annonce que c'est finit, que ton petit coeur s'est arrêté, que tu es parti tranquillement... mon coeur se brise à nouveau, et celui de ton papa aussi...
On nous emmène ensuite en salle de naissance... et nous faisons la connaissance de celle qui t'a mis au monde. Un personne extra ordinaire. Le déclenchement commence, la péri fait son effet, et à la deuxième prise de médicament tout s'accélère... la seringue est vide, il faut la changer, mais la poche des eaux s'est fissurée et les contractions sont intenses et douloureuse... le temps d'appeler l'anesthésistes, qu'il m'injecte un peu plus, tu es prêt à sortir, et je n'ai été soulagée qu'après que tu sois sorti... tu es né de ma souffrance mais je crois que c'est mieux comme cela.
Nous t'avons pleuré avec ton papa... des torrents de larmes de peine, de déception, de soulagement que l'accouchement soit enfin fini... et puis j'ai demandé à te voir!
Papa n'a pas voulu car il voulait garder à l'esprit l'image qu'il s'est fait de toi. Je le comprend. Tu étais si beau... tu ressemblais tellement à ton grand frère.... tu étais déjà grand, et tu pesais déjà 1kg100... tu étais magnifique et tu semblais tellement en paix... on aurait vraiment dit que tu dormais... il m'a fallut du temps pour assimiler le fait que tu n'ouvrirais pas tes petits yeux, que tes petits mains ne serreraient jamais les miennes, que je n'entendrais pas le doux son de ta petite voix d'enfant... Je suis restée avec toi un moment, puis je t'ai rendu aux sages femmes... elles t'ont prises en photo, ont prit tes empreintes... tu étais si TOI. Ton prénom t'allais très bien!
Et puis je suis remontée en chambre. J'étais épuisée par cette journée et je me suis endormie.
Le lendemain, nous sommes sortis dès que nous avons pu, pour rejoindre ton grand frère... mais avant de partir, je suis passée te voir une dernière fois. Je suis venue te dire adieu, te chanter une berceuse et te donner le doudou qui avait été validé par ton grand frère...
La route du retour a été dure et longue... avec ce sentiment horrible de t'abandonner... une deuxième fois.
Mais il nous faut continuer à vivre, il nous faut être encore plus présent pour ton grand frère qui est encore petit, mais suffisement grand pour comprendre la douleur de ton absence. Il parle de toi, pose des questions, est triste de ne pas te voir grandir... tu es le frère qu'il n'a jamais eu...
Depuis nous vivons au jour le jour... avec notre douleur et notre désir d'avancer, notre peur de te laisser derrière et notre besoin de continuer à vivre malgré tout.
Cela fait une semaine aujourd'hui que tu t'es endormi pour toujours et que j'espère que tu es bien là où tu es. Je sais bien que ton petit corps n'est pas toi, et pourtant j'ai parfois la furieuse envie de refaire la route pour aller te voir... mais déjà le lendemain tu n'habitais plus ce petit corps... alors aujourd'hui ce serait encore pire.
Je t'aime de tout mon coeur mon petit Nino, ma surprise, mon désir, mon ange.
Tu nous manques à tous les trois... nous ne t'oublierons pas...
Tu nous a permis de nous retrouver avec ton papa, de discuter, de nous ouvrir l'un à l'autre comme nous ne l'avions pas fait depuis longtemps. Merci mon petit Nino.
Repose en paix... au paradis des bébés où ton frère t'imagines.