MFIU à 36SA
Posté : 15 janvier 2025, 11:27
Bonjour,
J'ai 32 ans, je suis maman d'un petit garçon de 4 ans. Mon fils est né très grand prématuré, à 26 SA. Sa naissance a été un grand traumatisme pour mon conjoint et moi. Il a été hospitalisé pendant deux mois et demi, en réa puis en néonat. Il s'est battu et aujourd'hui il ne présente pas de séquelles de sa prématurité. Nous sommes conscients de l'énorme chance que nous avons eu et je remercie la vie chaque jour de m'avoir laissé mon fils. Les raisons de sa naissance n'ont jamais été clairement été identifiées. On m'a trouvé une cloison utérine suite à une IRM, mais cette cloison n'a pas été retrouvée à l'hysteroscopie. De ce fait, les médecins ont conclu que je n'avais pas de malformation, et que la naissance de mon fils était un fait isolé. Je suis restée persuadée que mon utérus n'était pas normal et pendant des années je suis restée dans cette errance.
Fin 2023, après de longs mois de réflexion avec mon conjoint, et avoir reçu le feu vert du CHU, nous nous lançons, non sans peur, dans une nouvelle grossesse. Je tombe enceinte rapidement. La grossesse est, cette fois, très surveillée au vu de mes antécédents. Je passe des échos du col tous les 15 jours jusqu'à 28 SA et mon médecin traitant accepte de m'arrêter à partir du 4ème mois. Mon angoisse augmente au fil des semaines, j'ai tellement peur de perdre mon bébé. A 30 SA, je consulte aux urgences pour des contractions, j'angoisse et j'ai besoin d'être rassurée. La sage femme me confirme un utérus contractile et me conseille de rester très au repos. Je reste donc tranquille à la maison, je ne prends aucun risque et ne sors presque plus. Un monitoring de contrôle une fois par semaine est mis en place. Tout va bien, mais bébé est en position de siège, ce qui finalement me rappelle cette cloison qui n'y serait peut être pas pour rien. Je passe une écho de contrôle de la position à 35SA. Bébé ne s'est pas retourné, malgré les séances d'acupuncture. On me demande de revenir 4 jours plus tard, pour soit envisager une VME ou programmer une césarienne. Un doppler est réalisé pendant l'écho, il est bon. Le rythme cardiaque est parfait. Je suis tellement fière de moi, d'avoir pu tenir aussi longtemps. Dans quelques jours notre bébé sera avec nous. Mon fils l'attend impatiemment. Il embrasse mon ventre dix fois par jour, il est complètement amoureux de "son bébé". On la tient notre revanche, après tout ce qu'on a traversé. Nous avons décidé de garder la surprise du sexe, même si j'espère profondément une petite fille.
Dans la nuit du 16 au 17/11, bébé fait des cabrioles dans mon ventre, au point de me réveiller. Je ne le sais pas encore, mais c'est la dernière fois que je sentirai ses mouvements.
Le matin du 17/11, je ne sens plus bébé bouger. Au fond de moi, je le sais, mais je me rassure, en me disant qu'il a beaucoup bougé cette nuit. La journée passe et toujours rien. Ca m'est déjà arrivé une fois, et en fin de journée les mouvements avaient repris. Je finis par me rendre aux urgences avec mon conjoint. Le trajet est interminable ... Nous sommes pris en charge par une sage femme, qui pose le monitoring. Silence. Je regarde mon conjoint et lui dit que c'est terminé. La sage femme passe la sonde de l'écho, me regarde, soupire et me dit "je suis désolée". Notre monde s'arrête de tourner à ce moment là. Notre petite fille, car nous l'apprenons en même temps, est morte in utero à 36 SA.
L'accouchement a eu lieu le 19/11 et a été long et éprouvant. Comme lors de mon premier accouchement, le placenta ne se détache pas de lui même. J'ai dû subir une délivrance artificielle et souffert le martyr. Le médecin qui a pratiqué le geste me confirme la présence d'une cloison, elle a pu la toucher.
Le prénom était choisi depuis plusieurs années au cas où nous aurions un jour une fille. Nous avons décidé de le lui donner: Salomé. Nous organisons ses obsèques mais n'avons pas la force de convier famille et amis. J'ai honte, je ne supporte pas le regard des autres. Je ne veux plus voir personne.
Les semaines ont passé et la douleur est toujours aussi vive. Mon fils est très perturbé, ne comprend pas pourquoi sa petite soeur est morte, pourquoi on ne lui a pas donné un médicament pour qu'elle guérisse. Il pleure souvent, nous dit "je veux le bébé", se balade avec une petite poupée et nous dit "c'est ma petite soeur". Ca me déchire le coeur, je m'en veux tellement de ne pas avoir pu lui offrir sa petite soeur. Il est très inquiet pour moi, me suit partout, il est en alerte, regarde si je pleure ...
Nous sommes toujours en attente des résultats d'autopsie, même si Salomé a été retrouvée avec le cordon en triple circulaire autour du cou, tellement serré qu'elle en avait la trace sur le torse. Les médecins ont pu nous dire que c'était très probablement la cause de son décès. Est-ce qu'elle a tenté de se retourner ? Si je n'avais pas fait d'acupuncture, est ce que ça aurait changé quelque chose ?
Aujourd'hui nous tentons de nous reconstruire mais j'ai tellement de mal à vivre. J'ai peur de mourir, de laisser mon fils, j'ai peur que lui aussi meurt ou mon conjoint. Je suis dans une grande insécurité.
L'idée de ne plus jamais avoir d'enfant me déchire. Je ne la supporte pas. Et en même temps il m'est totalement inconcevable d'envisager une nouvelle grossesse. Que va-t-il nous arriver cette fois? La maladie, le handicap, ou qu'il m'arrive quelque chose en accouchant ... ? Je ne veux pas refaire vivre tout ça à mon fils. Je ne veux plus le faire souffrir. On ne s'en relèvera pas, cette fois.
Je ne sais pas ce que nous réserve l'avenir, mais je préfère me reconstruire avec l'idée que je n'aurai plus d'enfant. Y a t il des personnes parmi vous qui ont fait ce choix, et qui malgré tout ont réussi à se reconstruire sans nouvel enfant ?
Je vous remercie d'avoir pris le temps de me lire.
J'ai 32 ans, je suis maman d'un petit garçon de 4 ans. Mon fils est né très grand prématuré, à 26 SA. Sa naissance a été un grand traumatisme pour mon conjoint et moi. Il a été hospitalisé pendant deux mois et demi, en réa puis en néonat. Il s'est battu et aujourd'hui il ne présente pas de séquelles de sa prématurité. Nous sommes conscients de l'énorme chance que nous avons eu et je remercie la vie chaque jour de m'avoir laissé mon fils. Les raisons de sa naissance n'ont jamais été clairement été identifiées. On m'a trouvé une cloison utérine suite à une IRM, mais cette cloison n'a pas été retrouvée à l'hysteroscopie. De ce fait, les médecins ont conclu que je n'avais pas de malformation, et que la naissance de mon fils était un fait isolé. Je suis restée persuadée que mon utérus n'était pas normal et pendant des années je suis restée dans cette errance.
Fin 2023, après de longs mois de réflexion avec mon conjoint, et avoir reçu le feu vert du CHU, nous nous lançons, non sans peur, dans une nouvelle grossesse. Je tombe enceinte rapidement. La grossesse est, cette fois, très surveillée au vu de mes antécédents. Je passe des échos du col tous les 15 jours jusqu'à 28 SA et mon médecin traitant accepte de m'arrêter à partir du 4ème mois. Mon angoisse augmente au fil des semaines, j'ai tellement peur de perdre mon bébé. A 30 SA, je consulte aux urgences pour des contractions, j'angoisse et j'ai besoin d'être rassurée. La sage femme me confirme un utérus contractile et me conseille de rester très au repos. Je reste donc tranquille à la maison, je ne prends aucun risque et ne sors presque plus. Un monitoring de contrôle une fois par semaine est mis en place. Tout va bien, mais bébé est en position de siège, ce qui finalement me rappelle cette cloison qui n'y serait peut être pas pour rien. Je passe une écho de contrôle de la position à 35SA. Bébé ne s'est pas retourné, malgré les séances d'acupuncture. On me demande de revenir 4 jours plus tard, pour soit envisager une VME ou programmer une césarienne. Un doppler est réalisé pendant l'écho, il est bon. Le rythme cardiaque est parfait. Je suis tellement fière de moi, d'avoir pu tenir aussi longtemps. Dans quelques jours notre bébé sera avec nous. Mon fils l'attend impatiemment. Il embrasse mon ventre dix fois par jour, il est complètement amoureux de "son bébé". On la tient notre revanche, après tout ce qu'on a traversé. Nous avons décidé de garder la surprise du sexe, même si j'espère profondément une petite fille.
Dans la nuit du 16 au 17/11, bébé fait des cabrioles dans mon ventre, au point de me réveiller. Je ne le sais pas encore, mais c'est la dernière fois que je sentirai ses mouvements.
Le matin du 17/11, je ne sens plus bébé bouger. Au fond de moi, je le sais, mais je me rassure, en me disant qu'il a beaucoup bougé cette nuit. La journée passe et toujours rien. Ca m'est déjà arrivé une fois, et en fin de journée les mouvements avaient repris. Je finis par me rendre aux urgences avec mon conjoint. Le trajet est interminable ... Nous sommes pris en charge par une sage femme, qui pose le monitoring. Silence. Je regarde mon conjoint et lui dit que c'est terminé. La sage femme passe la sonde de l'écho, me regarde, soupire et me dit "je suis désolée". Notre monde s'arrête de tourner à ce moment là. Notre petite fille, car nous l'apprenons en même temps, est morte in utero à 36 SA.
L'accouchement a eu lieu le 19/11 et a été long et éprouvant. Comme lors de mon premier accouchement, le placenta ne se détache pas de lui même. J'ai dû subir une délivrance artificielle et souffert le martyr. Le médecin qui a pratiqué le geste me confirme la présence d'une cloison, elle a pu la toucher.
Le prénom était choisi depuis plusieurs années au cas où nous aurions un jour une fille. Nous avons décidé de le lui donner: Salomé. Nous organisons ses obsèques mais n'avons pas la force de convier famille et amis. J'ai honte, je ne supporte pas le regard des autres. Je ne veux plus voir personne.
Les semaines ont passé et la douleur est toujours aussi vive. Mon fils est très perturbé, ne comprend pas pourquoi sa petite soeur est morte, pourquoi on ne lui a pas donné un médicament pour qu'elle guérisse. Il pleure souvent, nous dit "je veux le bébé", se balade avec une petite poupée et nous dit "c'est ma petite soeur". Ca me déchire le coeur, je m'en veux tellement de ne pas avoir pu lui offrir sa petite soeur. Il est très inquiet pour moi, me suit partout, il est en alerte, regarde si je pleure ...
Nous sommes toujours en attente des résultats d'autopsie, même si Salomé a été retrouvée avec le cordon en triple circulaire autour du cou, tellement serré qu'elle en avait la trace sur le torse. Les médecins ont pu nous dire que c'était très probablement la cause de son décès. Est-ce qu'elle a tenté de se retourner ? Si je n'avais pas fait d'acupuncture, est ce que ça aurait changé quelque chose ?
Aujourd'hui nous tentons de nous reconstruire mais j'ai tellement de mal à vivre. J'ai peur de mourir, de laisser mon fils, j'ai peur que lui aussi meurt ou mon conjoint. Je suis dans une grande insécurité.
L'idée de ne plus jamais avoir d'enfant me déchire. Je ne la supporte pas. Et en même temps il m'est totalement inconcevable d'envisager une nouvelle grossesse. Que va-t-il nous arriver cette fois? La maladie, le handicap, ou qu'il m'arrive quelque chose en accouchant ... ? Je ne veux pas refaire vivre tout ça à mon fils. Je ne veux plus le faire souffrir. On ne s'en relèvera pas, cette fois.
Je ne sais pas ce que nous réserve l'avenir, mais je préfère me reconstruire avec l'idée que je n'aurai plus d'enfant. Y a t il des personnes parmi vous qui ont fait ce choix, et qui malgré tout ont réussi à se reconstruire sans nouvel enfant ?
Je vous remercie d'avoir pris le temps de me lire.