Forum de l'association Petite Émilie

Bonsoir Emilie,

Il est 4h du matin et je ne trouve pas le sommeil car demain à 17h je serai hospitalisée pour une IMG tardive suite à la découverte lors d’une écho de suivi de routine que mon bébé a une agénésie du corps calleux isolée.

La gynécologue me lance : il manque un morceau dans le cerveau de votre bébé , le monde s’est écroulé autour de moi , ma vie et celle de mon mari a basculé à cet instant.

Nous avons eu 5jours pour prendre cette décision, nous ne savons pas comment il y’a à peine une semaine nous préparions dans la joie la valise de maternité et aujourd’hui on doit prendre des décisions inhumaines, lui ôter la vie par peur qu’il ne puisse jamais avoir une vie normale , mais en même temps on se dit qu’il peut avoir une vie normale , tellement de si …

Aujourd’hui nous sommes meurtris, on s’apprête à vivre un cauchemar éveillé aujourd’hui, le corps médical a décidé qu’on partait sur un accouchement par voie basse car j’ai déjà eu un bébé avec une césarienne afin que je puisse avoir des chances de retomber enceinte sans complications .

Je redoute le moment du ( geste ), dés que j’y pense une angoisse terrible prend le dessus , comment je pourrai les laisser faire ça ? À mon bébé que je porte depuis 9 mois , il est entier, il doit être tellement beau ! Comment je pourrai me convaincre à ce moment là que c’est la bonne décision que nous avons prise.

Mon mari a fait le choix de ne pas le voir pour ne pas s’attacher davantage à notre bébé . Mais moi j’ai peur de regretter alors j’ai décidé de le voir, quand je lis que certaines mamans ici ont vécu un moment doux , j’espère du fond du cœur que ça m’arrivera et que je ne vais pas sombrer après ça.

Il ne me reste que quelques heures avec mon petit ange , il bouge sans cesse dans mon ventre , c’est affreux !

Bonjour Dida,

Je suis sincèrement désolée de t'accueillir sur ce forum.

Plusieurs membres de ce forum ont malheureusement reçu le même diagnostic pour leurs bébés et sont passés par ce non-choix.

Cette décision, vous ne la prenez pas seuls, mais avec les médecins, pour éviter à votre enfant de potentiellement souffrir toute sa vie. C'est une décision d'amour. Dans ton ventre, votre bébé n'a jamais connu que la chaleur et l'amour. Il ne souffrira pas.

Je n'ai pas vécu le geste d'arrêt de la vie foetale (au stade auquel j'ai vécu mon IMG, ce sont les contractions qui ont arrêté le coeur de notre fille). Je sais que ce sera toutefois un moment difficile. Je t'envoie tout mon soutien.

Si ça peut te rassurer, l'accouchement en lui-même n'a pas été le moment le plus violent, ni le plus difficile de mon IMG. Pourtant, il s'agissait de notre premier enfant et je n'avais jamais mis les pieds dans une salle d'accouchement.

La rencontre a été très douce et notre fille était belle. Je te souhaite une rencontre aussi douce.

Fais tout ce que tu juges important pour toi et pour ton bébé. Si tu as peur de regretter quelque chose, fais-le. Pense à toi et pense à ce que tu veux faire.

De notre côté, nous avons même pris des photos de notre petite fille lors de la rencontre. Je ne savais pas si nous en serions capables. Mais ça s'est fait naturellement durant ce moment suspendu. Nous nous sommes dit que ces photos seraient les rares souvenirs que nous pourrions conserver d'elle. Nous sommes heureux de les avoir.

Toutefois, chacun fait en fonction de ses besoins et de ses capacités sur le moment.

J'espère sincèrement que vous êtes bien entourés par vos proches et le corps médical.

Je pense fort à vous et à votre bébé en cette journée particulière.

Bonjour Dida,

Je suis vraiment désolée de lire ton témoignage. C'est en effet terrible de vivre ce basculement dans le cauchemar après 9 mois de préparation à un heureux évènement.

Si je peux te "rassurer" un peu concernant l'accouchement, j'appréhendais énormément. J'étais vraiment paniquée à l'idée de donner naissance à un enfant mort, je ne pensais pas être capable de le voir, j'étais vraiment perdue sur la gestion de ces moments. Je me souviens que je disais à mon compagnon que je voulais absolument une anesthésie générale pour ne pas avoir à vivre ça en étant consciente.
Et pourtant, cet accouchement a presque été une parenthèse de douceur au milieu de ce tsunami. Le tsunami d'avant l'IMG, et le tsunami encore pire de la gestion de l'après...
C'est finalement le seul moment où je me suis sentie pleinement mère. Je l'ai vécu comme n'importe quelle maman, dans une salle de naissance de maternité comme pour n'importe quel bébé. Certes le mien ne pleurerait pas à la naissance, mais dans cette prise en charge j'ai finalement senti beaucoup de considération et de bienveillance de la part de l'équipe soignante vis-à-vis de mon bébé et concernant mon statut de maman.
Bien entendu, c'était très intense émotionnellement, j'ai énormément pleuré, j'ai pas mal souffert physiquement aussi, mais ce n'était pas traumatisant.
Contrairement à ce que tu vas vivre, je n'ai pas vécu le geste d'arrêt du cœur, car j'étais à un peu moins de 21 sa.

Je ne me suis pas sentie capable de voir mon bébé juste après l'accouchement. Quelques heures plus tard j'ai finalement accepté, mais à contre cœur, juste parce que j'avais peur de regretter. Je suis tellement contente de l'avoir fait. Je ne te cache pas que les premières minutes, j'ai été très choquée, je n'osais pas m'approcher car je ne voyais qu'un bébé mort. Au terme où j'étais, il faut dire que la coloration de la peau est très rouge. Mais après avoir retrouvé mon calme et avoir pris un peu de temps, j'ai pu m'approcher et le toucher, et là toute la peur était partie, c'était juste mon bébé, magnifique, doux, paisible. Nous avons fait quelques photos, qui me sont très précieuses. Cet enfant a existé, il était beau, il ressemblait à son papa. Ce n'était pas "rien".

Après il faut faire comme tu t'en sens capable, sache que si c'est trop dur pour toi le jour-même, tu peux aller le voir le lendemain ou même plus tard. Demande à la maternité qu'ils te disent combien de temps ils le gardent. En général, tu as la possibilité de prendre ton temps.

Nous avons acheté un petit doudou en double, l'un qui est parti avec lui, l'autre que nous avons gardé.
Je ne sais pas si tu connais l'association Souvenange, ils peuvent parfois se déplacer en maternité pour faire des photos de naissance de belle qualité, dans des moments où prendre des photos est parfois la dernière de nos préoccupations.

Je t'envoie énormément de courage.

Bonjour,

Je suis si triste de lire ces témoignages, et en même temps je me sens moins seule dans cette détresse.
Nous avons eu le même verdict hier, nous avons essayé pendant 4 ans d’avoir un enfant dont 1 an en PMA, FIV qui marche du premier coup on s’est dit enfin la chance nous sourit.
Et échographie T2 on décèle cette anomalie, s’enchaînent les rdv avec les généticiens, les échos, amniocentèse, IRM et j’en passe.

Les discours se voulaient rassurants, c’est pour çà qu’au dernier rdv hier avec les neuropédiatres ça a été le coup de massue: la combinaison de ce qui avait été vu + IRM laisse planer une très forte incertitude sur un handicape mental voire moteur.

Je suis à 33SA +4, autant dire quasiment au bout. Tout comme vous je ne comprends pas comment on peut basculer d’un bonheur intense, de projets plein la tête et le coeur, d’une chambre quasiment prête, à une hécatombe.

Nous sommes conscients avec mon mari que nous prenons la bonne décision d’une IMG, mais c’est si contre-nature. J’ai tellement peur de l’intervention et du vide de l’après. Comment faire pour rentrer dans une maison avec un ventre et des bras vides? comment faire pour accepter d’avoir donné la mort plutôt que la vie? Comment se reconstruire? Comment passer devant sa commode, son lit et ses doudous sans perdre pied?

Tant de questions et de sentiments qui se bousculent dans ce cauchemar éveillé, alors je vous le demande: comment avez-vous fait (ou comment faites-vous) pour accepter et continuer de vivre après l’horreur?

Merci d’avance pour vos réponses, et courage à toutes

Bonsoir Marilou,

Je suis sincèrement désolée de t'accueillir sur ce forum.

Les moments avant l'IMG sont très angoissants. Toutefois, tu trouveras toujours la force sur le moment, sur l'instant. Si ça peut te rassurer, l'accouchement n'a pas été le pire moment de tout ce processus pour moi. La rencontre avec notre petite fille a été un moment suspendu et doux.

La décision que vous avez prise, ce non-choix que vous subissez, c'est une décision d'amour pour votre bébé. Vous allez prendre pour vous la douleur afin que votre enfant n'ait jamais à subir une vie pleine de limitations, de souffrances et de handicaps.

C'est cette pensée qui vous aidera à tenir.

Pour ma part, le fait d'avoir pu "préparer" l'IMG (en choisissant les doudous à mettre dans le cercueil, en écrivant une lettre pour notre fille, en prenant à l'avance la décision de la voir et de prendre des photos) m'a beaucoup aidée. J'ai aussi trouvé des petites choses à faire pour lui rendre hommage et l'inscrire dans l'histoire de notre famille (planter un petit poirier qui fleurira fin mars dans le jardin ; créer une boîte à souvenir avec les échographies, le test de grossesse, son bonnet, son nid d'ange, ses empreintes, un album photo, etc. ; graver un pendentif avec ses empreintes ; ...).

Après l'accouchement, le vide sera intense. Tu ressentiras sans doute des sentiments très violents : colère, injustice, tristesse. Tout est légitime. Il faudra te donner du temps et des moments pour pleurer et laisser sortir tout cela.

Je te conseille de bien t'entourer de proches et de personnes de confiance. Ils pourront être là, écouter, vous aider (en apportant des repas, en rangeant les affaires de bébé pour vous, etc.). Il est important d'avoir du soutien dans ces moments-là.

N'hésitez pas à demander une aide psychologique à l'hôpital. Il existe aussi de nombreux groupes de parole pour les parents endeuillés et des lignes d'écoute (associations SPAMA, Agapa). Parler et partager ce qu'on ressent fait énormément de bien. Ça permet de se sentir moins seuls également.

Enfin, ce sera surtout le temps qui finira par apaiser la douleur écrasante. Un jour, les vagues de tristesse seront moins intenses et moins fréquentes. Je ne passe pas une journée sans penser à ma fille, mais j'y arrive désormais sans m'effondrer.

Je t'envoie tout mon soutien dans ces moments difficiles. Je pense fort à vous et à votre bébé.