Mort fœtale 38 SA+ 4 jours

Hannah
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Mort fœtale 38 SA+ 4 jours

Message par Hannah »

À ma petite Rose,

« Petite Rose, petit bourgeon de printemps, il ne t’aura fallu qu’un instant. Un instant humide, au goût de sel, pour éclore dans nos vies et rendre tes pétales.

Un instant pour mesurer l’amour, pour compter la tendresse. Un instant pour se réunir autour de toi, imaginer les baisers, les rires et tes boucles de cuivre glisser entre nos doigts.
Petite Rose, petite perle de printemps tu es venue le temps de fleurir dans nos cœurs, le temps de faire naître d’autres chemins, des chemins de roses aux parfums éternels. »
Rebecca

Voici le poème que ma sœur a écrit pour Rose qui est partie à deux semaines du terme. Ce texte me fait du bien.

Mon congés maternité a débuté le 08/04/24, deux jours après le 10/04/24, je me rends avec ma fille aînée Lila ( 7ans) à la maternité pour la dernière échographie de croissance. J’étais suivie avant cela en ville par une sage femme en libérale. Ma fille qui était en vacances n’aime pas me suivre dans les démarches comme celles ci, mais l’envie est venue car je lui ai dit qu’on verrait Rose gigotait et faire des bulles dans mon ventre. J’avais l’application flo et nous suivions ensemble la transformation de sa sœur, du grain de pavot au chou-fleur. Ça l’amusait de voir son évolution.

Le 10/04/24, la Gyneco nous fait rentrer, elle s’étonne que Rose soit en siège alors qu’elle s’était bien positionnée lors de la précédente échographie en mars. Puis elle vérifie le cœur, et la…. Elle s’en va et court en appelant une autre Gyneco. Je comprends tout, ma fille Lila est la. C’est l’enfer. La deuxième Gyneco arrive, je pleure, je maggripe à son bras… je ne veux pas qu’on vérifie à nouveau, je ne veux pas qu’on me dise ce que je ne veux pas entendre. Je demande à ce qu’on fasse sortir Lila.
Elle vérifie et me confirme que le petit cœur de Rose s’est arrêté de battre.
J’ai tenu la main de la Gyneco presque une heure en pleurant. Ma fille était dans un couloir assise par terre, mon mari en route de son travail a la maternité.
On a été vu directement par la psy de l’hôpital, Lila s’est mise à pleurer quand elle a su. Elle était sonnée.

Je suis rentrée chez moi, c’était mercredi soir, j’ai avalé le médicament qui déclenche l’accouchement, on m’avait dit que j’accoucherai le vendredi mais la nuit du mercredi au jeudi j’ai perdu les eaux.

L’accouchement a été douloureux, une attente interminable. Ma sœur était là avec mon mari. J’ai répété peut être mille fois a Rachel, je ne veux pas accoucher. Tant qu’elle était en moi, elle n’était pas partie. J’avais tellement peur. On riait, on pleurait. Puis elle est arrivée tellement vite, j’ai souffert le martyr. Quand elle est sortie mon mari et ma sœur étaient effondrés… moi soulagée j’en pouvais plus de cette douleur.

Le temps s’est suspendu quand je l’ai eu dans les bras, un moment de grâce et d’amour. Je lui ai parlé, je lui ai dit que je l’aimais. On était tous paisibles et débordant d’amour pour cette petite Rose. Elle était si belle, rousse comme sa sœur, les lèvres roses et les petites joues roses. Mais pourquoi? Je me souviens avoir eu des crampes au bras mais me taire car si je la rendais c’était la fin.
J’ai finalement fini par leur rendre et ma douleur a commencé. Une douleur au cœur, une douleur à l’âme.

Je suis rentrée le lendemain matin. Puis les journées avant les funérailles ont été un mélange de tristesse, de paix et d’euphorie. J’étais heureuse d’avoir donné naissance, je me suis sentie bête parfois car les hormones me jouaient des tours. Un réveil joyeux, comme une chatte qui cherche son chaton puis qui réalise qu’il n’est plus là. Le visage de Rose et l’instant à la maternité me faisait pleurait de tristesse et de joie. Quelle chance d’avoir pu la voir, lui parler et lui rendre hommage. Quelle chance d’avoir pu être aussi bien accompagnée par l’équipe soignante de Montfermeil. Des sages femmes tellement gentilles, une Gyneco adorable, un anesthésiste d’une gentillesse sans nom.

J’ai pu revoir mon ange pendant les obsèques et la douleur s’est amplifiée, quand le cercueil est parti. Je ne la verrai plus jamais. J’ouvre la boîte papillon pour me raccrocher à ses empreintes, son lange encore taché par le sang de la naissance, son pyjama et sa petite mèche de cheveux. Je l’avais imaginé comme cela ma petite Rose…


De cette épreuve je retiens que l’amour triomphe et triomphera à jamais. Je retiens le soutien infaillible de mes sœurs, rachel a l’accouchement et rebecca qui est restée avec moi plusieurs jours. Le soutien de mes parents de mes amis. L’amour grandissant entre mon mari et moi. Le sentiment que la tristesse laissera place à la joie, et que la vie reviendra. La certitude de jours meilleurs. Pourquoi nous? Mais finalement pourquoi pas? C’est tombé sur nous, et de cette épreuve naîtront de belles promesses.

Paradoxalement à ces sentiments d’espoir et de paix,je suis également angoissée d’être en congés maternité sans mon bébé, de devoir gérer l’absence, le manque viscéral que je ressens presque charnel. La présence de ma famille et de mon mari atténue cette douleur, seule je ne sais pas ce qu’il en sera. Je voudrais lui donner le sein, l’embrasser, faire du peau a peau comme avec ma Lila il y a 7 ans presque jour pour jour. Lila est née le 15/04/17 et Rose le 11/04/24.

Je n’arrive pas à faire sortir de ma tête le sentiment le plus douloureux après celui de la perte, la culpabilité. Pour cette grossesse j’ai travaillé comme une folle, je me suis arrêtée tardivement, je ne me rappelle même plus quand était la dernière fois où je l’ai sentie bougé. Le 20/03 j’ai été aux urgences car j’avais trop de contractions. On m’a dit qu’il fallait que je sois en télétravail ou que je sois arrêtée. J’ai continué les deux semaines en télétravail et j’ai écouté leurs recommandations. Je sais donc quelle était encore en vie. On m’avait mis en garde car je pouvais l’avoir prématurément… desfois je me dis qu’il aurait mieux valu qu’elle naisse le 20/03.

Entre le 20/03 et le 10/04 elle est partie… quand cela s’est il produit? Dans quel état étais je quand elle est partie? Sereine? Agacée ? Endormie? Est elle partie en paix? Je ne serai jamais. Je ne peux même plus dire quand elle a bougé la dernière fois, tant je n’étais pas attentive à ma grossesse.

Mon espoir et ce qui m’aide c’est de penser qu’un autre miracle pourra arriver, un bébé arc en ciel. Cette pensée m’apaise et m’angoisse à la fois.

Ma petite Rose, repose en paix. Tu as été aimée plus que tout, tu resteras gravée dans mon cœur jusqu’à mon dernier souffle.
Pépin
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Re: Mort fœtale 38 SA+ 4 jours

Message par Pépin »

Bonjour Hannah,

Je suis sincèrement désolée de t'accueillir sur ce forum. Toutes mes condoléances.

Ton histoire m'a donné les larmes aux yeux. Ta sœur a écrit un texte magnifique.

Je suis persuadée que Rose devait être magnifique et qu'elle est partie en sentant tout votre amour. À défaut d'être dans vos bras, votre fille sera dans vos coeurs.

Malgré l'horreur de la situation et l'infinie tristesse, je vois quand même que tu es bien entourée et que l'espoir reste bien présent. La vie reprendra.

La culpabilité et l'angoisse sont des sentiments normaux. Ressentir du vide, de la colère et de l'impuissance aussi. Ce n'est pas un deuil linéaire. Il y a aura des moments où l'avenir et l'espoir prennent le dessus. Parfois, ce sont les vagues de tristesse et d'angoisse qui s'écraseront sur toi.

Parles-en à tes proches, à une aide psychologique ou sur ce forum. Il est important d'exprimer tes sentiments et de ne pas rester seule.

Pour beaucoup d'entre nous, la lecture de livres sur le deuil périnatal ou l'écoute de podcasts ont aidé à avancer. Il y a un sujet de ce forum reprenant beaucoup de références dans "Les chemins de la reconstruction". Personnellement, j'ai aussi beaucoup lu les témoignages des gens de ce forum, notamment sur l'après et sur l'espoir qui renaît ensuite, sur l'arc-en-ciel après la tempête.

Pense aussi beaucoup à toi et à ce qui te fait ou ferait du bien, que ce soit pour rendre hommage à ta fille afin d'apaiser la tristesse ou pour te changer les idées.

Je te souhaite énormément de courage.

Pensées pour toi et pour Rose.
Pépinette IMG à 17SA pour T21 - 28/03/2024
"Past the pain, lies the keys to Heaven
There's still life in the Armageddon"
Hannah
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Re: Mort fœtale 38 SA+ 4 jours

Message par Hannah »

Merci pour ton gentil message. Aurais tu des références pour l’écoute de podcasts sur ce sujet? Merci 💓
Clarita
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Re: Mort fœtale 38 SA+ 4 jours

Message par Clarita »

Bonjour Hannah,

J’ai pleuré en te lisant ce matin. Quelle force, quelle résilience… je suis tellement peinée pour toi. Je ne peux qu’imaginer la chute, et l’incompréhension qui demeure.
Je suis certaine que Rose est partie en paix, dans notre ventre la douleur et la tristesse n’existent pas.

La rencontre à du être un moment magnifique, j’espère que ce souvenir restera toujours le plus doux à tes yeux.

Je pense fort à toi, ta famille et surtout à ta petite Rose.

Clara
Mamange de Naelle, IMG a 27SA le 16/01/2024
Pépin
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Re: Mort fœtale 38 SA+ 4 jours

Message par Pépin »

Hannah a écrit : 21 avril 2024, 10:42 Merci pour ton gentil message. Aurais tu des références pour l’écoute de podcasts sur ce sujet? Merci 💓
Il y a une liste juste ici :
viewtopic.php?t=3062

Je sais que beaucoup de membres ont trouvé de l'apaisement grâce à Au Revoir Podcasts. Il existe aussi un documentaire appelé "Le berceau vide" qui était en Replay sur France.TV (je n'y ai malheureusement pas accès depuis la Belgique). Je ne sais pas s'il est encore disponible, mais il paraît qu'il est vraiment bien fait.


Personnellement, je suis plus axée sur la lecture et l'introspection. J'ai lu "Le Berceau Vide" de Marie-José Soubieux. Parfois, ça va un peu loin dans la psychanalyse, mais ça décrypte pas mal de moments clés. Ça explique bien pourquoi le deuil périnatal est si compliqué et difficile à vivre. Ça me permet de mieux comprendre ce que je vis et de me rendre compte que mes sentiments positifs comme négatifs sont normaux.

J'ai aussi acheté "Dans ces moments-là", un livre qui explique finalement ce que les proches peuvent faire pour nous, ce que nous pouvons leur demander et ce que nous pouvons faire pour trouver un peu d'apaisement et de soutien dans le deuil. C'est un livre à faire découvrir aux proches. Pour moi, la pire chose dans ce genre de drame, c'est le tabou et l'isolement. Ça ajoute un poids en plus à la tristesse et ça renforce le vide. Il est essentiel d'oser parler et demander de l'aide si nécessaire.

Courage. Le bonheur reviendra pour nous, j'en suis sûre. ❤️
Pépinette IMG à 17SA pour T21 - 28/03/2024
"Past the pain, lies the keys to Heaven
There's still life in the Armageddon"
Hannah
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Re: Mort fœtale 38 SA+ 4 jours

Message par Hannah »

Merci beaucoup pour ton retour, et tes conseils. Tu es belge ❤️
Je ressens comme toi le pire c’est le tabou et l’isolement. Mon mari vient d’une culture différente et je ne supporte plus les mots que je reçois de la part de sa famille:
«  tu te sens mieux »( deux jours après l’accouchement), «  c’est peut être mieux ainsi, il vallait mieux que ça arrive maintenant », «  si ça arrive c’est pour une raison » ça m’insupporte ça clos la parole et le fait de pouvoir se confier. Heureusement avec ma sœur j’ai pu tout dire, tout exprimer à chaque minute où une peur et un sanglot arrivait. Chaque mot était rassurant, une écoute bienveillante et tout était ok dans ce que je disais. Ouf…. Je suis bien entourée.
Je t’embrasse merci pour tes mots, ton témoignage m’intéresse aussi si tu t’en sens capable ❤️
Pépin
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Enregistré le : 24 mars 2024, 19:04

Re: Mort fœtale 38 SA+ 4 jours

Message par Pépin »

Beaucoup de proches ne savent pas comment réagir face à une mort aussi peu "naturelle" que celle d'un bébé. C'est un événement inconcevable. Les gens qui ne sont pas directement touchés vont essayer de rationaliser, de mettre la douleur en perspective. En réalité, dans ces moments-là, on a juste besoin d'écoute et de soutien sans jugement. On a juste besoin d'une épaule sur laquelle pleurer et se reposer un peu.

Les proches pensent maladroitement bien faire en sortant ce genre de phrases... Mon beau-père, le jour du diagnostic de notre fille, a dit à mon conjoint : "Vous êtes jeunes. Vous en ferez un autre.". Comme si un bébé, ça se remplaçait comme une assiette Ikéa qu'on vient de briser... Je sais qu'il était aussi très triste. Notre fille allait le rendre papy pour la première fois. Il pensait alléger notre douleur en disant cela.

Le livre "Dans ces moments-là" parle justement très bien de ces tentatives maladroites et donne de bons conseils aux proches pour mieux aborder les parents endeuillés. S'ils ne sont pas fermés à l'idée, ça pourrait être une bonne chose que la famille de ton mari lise ce livre.

Je suis heureuse de voir que tu as ta sœur pour t'écouter et te soutenir. C'est vraiment important de pouvoir parler ouvertement et en toute honnêteté avec quelqu'un. Le deuil sera long et les chutes seront nombreuses. Il faut s'entourer de personnes de confiance.

Je me suis inscrite sur le forum il y a presque un mois. Mon histoire et mon cheminement complet se trouve ici : viewtopic.php?t=4544

En bref, j'attendais notre premier enfant, une petite fille. Toutes les échographies se passaient à merveille. Et puis, le 18 mars, le résultat du DPNI est tombé et nous avons appris la trisomie 21 de notre fille. L'amniocentèse a confirmé le diagnostic.

Nous avons pris la décision le plus difficile de notre vie en arrêtant ma grossesse, afin d'éviter à notre bébé de souffrir toute sa vie d'un handicap lourd. Nous ne voulions pas d'une demi-vie pour elle. Nous l'aimons trop pour cela. Nous avons pris pour nous la souffrance, pour qu'elle n'ait jamais à endurer une vie de limitations et de handicap.

J'ai accouché le 28 mars de notre petite fille sans vie, à 17SA.

Nous ne regrettons pas notre choix. Nous regrettons que la vie nous ait forcés à choisir entre deux options terribles.

Pour le moment, nous sommes en attente des caryotypes pour savoir s'il y a des chances fortes de récidive.

La douleur est encore très vive par moment. Il est parfois très difficile de trouver une lueur d'espoir, vu que nous sommes toujours dans l'attente des résultats génétiques. Cependant, depuis le début, je m'accroche à cette phrase : "le bonheur, en partant, a dit qu'il reviendrait". C'est le titre d'un livre. C'est inspiré d'un très beau poème de Jacques Prévert.

Je souhaite de l'espoir à toutes les personnes de ce forum.
Pépinette IMG à 17SA pour T21 - 28/03/2024
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Axel&baby4
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Re: Mort fœtale 38 SA+ 4 jours

Message par Axel&baby4 »

Hannah a écrit : 21 avril 2024, 08:59 À ma petite Rose,

« Petite Rose, petit bourgeon de printemps, il ne t’aura fallu qu’un instant. Un instant humide, au goût de sel, pour éclore dans nos vies et rendre tes pétales.

Un instant pour mesurer l’amour, pour compter la tendresse. Un instant pour se réunir autour de toi, imaginer les baisers, les rires et tes boucles de cuivre glisser entre nos doigts.
Petite Rose, petite perle de printemps tu es venue le temps de fleurir dans nos cœurs, le temps de faire naître d’autres chemins, des chemins de roses aux parfums éternels. »
Rebecca

Voici le poème que ma sœur a écrit pour Rose qui est partie à deux semaines du terme. Ce texte me fait du bien.

Mon congés maternité a débuté le 08/04/24, deux jours après le 10/04/24, je me rends avec ma fille aînée Lila ( 7ans) à la maternité pour la dernière échographie de croissance. J’étais suivie avant cela en ville par une sage femme en libérale. Ma fille qui était en vacances n’aime pas me suivre dans les démarches comme celles ci, mais l’envie est venue car je lui ai dit qu’on verrait Rose gigotait et faire des bulles dans mon ventre. J’avais l’application flo et nous suivions ensemble la transformation de sa sœur, du grain de pavot au chou-fleur. Ça l’amusait de voir son évolution.

Le 10/04/24, la Gyneco nous fait rentrer, elle s’étonne que Rose soit en siège alors qu’elle s’était bien positionnée lors de la précédente échographie en mars. Puis elle vérifie le cœur, et la…. Elle s’en va et court en appelant une autre Gyneco. Je comprends tout, ma fille Lila est la. C’est l’enfer. La deuxième Gyneco arrive, je pleure, je maggripe à son bras… je ne veux pas qu’on vérifie à nouveau, je ne veux pas qu’on me dise ce que je ne veux pas entendre. Je demande à ce qu’on fasse sortir Lila.
Elle vérifie et me confirme que le petit cœur de Rose s’est arrêté de battre.
J’ai tenu la main de la Gyneco presque une heure en pleurant. Ma fille était dans un couloir assise par terre, mon mari en route de son travail a la maternité.
On a été vu directement par la psy de l’hôpital, Lila s’est mise à pleurer quand elle a su. Elle était sonnée.

Je suis rentrée chez moi, c’était mercredi soir, j’ai avalé le médicament qui déclenche l’accouchement, on m’avait dit que j’accoucherai le vendredi mais la nuit du mercredi au jeudi j’ai perdu les eaux.

L’accouchement a été douloureux, une attente interminable. Ma sœur était là avec mon mari. J’ai répété peut être mille fois a Rachel, je ne veux pas accoucher. Tant qu’elle était en moi, elle n’était pas partie. J’avais tellement peur. On riait, on pleurait. Puis elle est arrivée tellement vite, j’ai souffert le martyr. Quand elle est sortie mon mari et ma sœur étaient effondrés… moi soulagée j’en pouvais plus de cette douleur.

Le temps s’est suspendu quand je l’ai eu dans les bras, un moment de grâce et d’amour. Je lui ai parlé, je lui ai dit que je l’aimais. On était tous paisibles et débordant d’amour pour cette petite Rose. Elle était si belle, rousse comme sa sœur, les lèvres roses et les petites joues roses. Mais pourquoi? Je me souviens avoir eu des crampes au bras mais me taire car si je la rendais c’était la fin.
J’ai finalement fini par leur rendre et ma douleur a commencé. Une douleur au cœur, une douleur à l’âme.

Je suis rentrée le lendemain matin. Puis les journées avant les funérailles ont été un mélange de tristesse, de paix et d’euphorie. J’étais heureuse d’avoir donné naissance, je me suis sentie bête parfois car les hormones me jouaient des tours. Un réveil joyeux, comme une chatte qui cherche son chaton puis qui réalise qu’il n’est plus là. Le visage de Rose et l’instant à la maternité me faisait pleurait de tristesse et de joie. Quelle chance d’avoir pu la voir, lui parler et lui rendre hommage. Quelle chance d’avoir pu être aussi bien accompagnée par l’équipe soignante de Montfermeil. Des sages femmes tellement gentilles, une Gyneco adorable, un anesthésiste d’une gentillesse sans nom.

J’ai pu revoir mon ange pendant les obsèques et la douleur s’est amplifiée, quand le cercueil est parti. Je ne la verrai plus jamais. J’ouvre la boîte papillon pour me raccrocher à ses empreintes, son lange encore taché par le sang de la naissance, son pyjama et sa petite mèche de cheveux. Je l’avais imaginé comme cela ma petite Rose…


De cette épreuve je retiens que l’amour triomphe et triomphera à jamais. Je retiens le soutien infaillible de mes sœurs, rachel a l’accouchement et rebecca qui est restée avec moi plusieurs jours. Le soutien de mes parents de mes amis. L’amour grandissant entre mon mari et moi. Le sentiment que la tristesse laissera place à la joie, et que la vie reviendra. La certitude de jours meilleurs. Pourquoi nous? Mais finalement pourquoi pas? C’est tombé sur nous, et de cette épreuve naîtront de belles promesses.

Paradoxalement à ces sentiments d’espoir et de paix,je suis également angoissée d’être en congés maternité sans mon bébé, de devoir gérer l’absence, le manque viscéral que je ressens presque charnel. La présence de ma famille et de mon mari atténue cette douleur, seule je ne sais pas ce qu’il en sera. Je voudrais lui donner le sein, l’embrasser, faire du peau a peau comme avec ma Lila il y a 7 ans presque jour pour jour. Lila est née le 15/04/17 et Rose le 11/04/24.

Je n’arrive pas à faire sortir de ma tête le sentiment le plus douloureux après celui de la perte, la culpabilité. Pour cette grossesse j’ai travaillé comme une folle, je me suis arrêtée tardivement, je ne me rappelle même plus quand était la dernière fois où je l’ai sentie bougé. Le 20/03 j’ai été aux urgences car j’avais trop de contractions. On m’a dit qu’il fallait que je sois en télétravail ou que je sois arrêtée. J’ai continué les deux semaines en télétravail et j’ai écouté leurs recommandations. Je sais donc quelle était encore en vie. On m’avait mis en garde car je pouvais l’avoir prématurément… desfois je me dis qu’il aurait mieux valu qu’elle naisse le 20/03.

Entre le 20/03 et le 10/04 elle est partie… quand cela s’est il produit? Dans quel état étais je quand elle est partie? Sereine? Agacée ? Endormie? Est elle partie en paix? Je ne serai jamais. Je ne peux même plus dire quand elle a bougé la dernière fois, tant je n’étais pas attentive à ma grossesse.

Mon espoir et ce qui m’aide c’est de penser qu’un autre miracle pourra arriver, un bébé arc en ciel. Cette pensée m’apaise et m’angoisse à la fois.

Ma petite Rose, repose en paix. Tu as été aimée plus que tout, tu resteras gravée dans mon cœur jusqu’à mon dernier souffle.
Bonjour Hannah,

Je suis désolée de te voir arriver sur ce forum. Ton texte m’a touché. Il est beau, bien écrit et juste. Le poème de ta sœur est magnifique. Ce que je trouve incroyable c’est que tu as déjà l’air d’être dans la résilience alors que tu débutes à peine ton deuil. Je n’aime pas beaucoup parler de force ou de courage dans nos cas parce qu’on n’a pas le choix. Mais j’ai appris à mieux comprendre le mot résilience. Le tsunami que tu as vécu aura probablement des répliques un peu moins violentes et moins fréquentes avec le temps. Il faut juste choisir les gens qui t’entourent. Pépin t’a donné le nom d’un bouquin pour guider tes proches, moi, j’aime bien recommander l’épisode 23 d’Au Revoir.podcast dans lequel des parents décrivent ce qu’ils ont aimé recevoir de leurs proches à ce moment-là de leur vie.

Je n’ai pas vécu la même chose que toi (2 IMG pour des accidents génétiques de novo) mais je suis rousse et mon arc-en-ciel est roux également. C’est bête mais ça me touche d’autant plus.

Je te souhaite beaucoup d’amour pour la suite.

Marie
#Mumoffive dont 2 petites étoiles et un 🌈
Hannah
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Re: Mort fœtale 38 SA+ 4 jours

Message par Hannah »

Merci Marie,
Merci pour ton gentil message. Ohhhh qu’elles sont belles les rousses… ma fille est rousse on a jamais compris comment c’était possible, puis ma petite Rose, mon étoile l’était aussi. Depuis le décès je me mets à peindre plein de petites rousses dans mes aquarelles.
Je te suis sur le fait que le courage et la force on ne choisi pas. Je suis plus forte bien entourée, seule j’ai tendance à être dans la tristesse… j’avais fait mon mémoire quand j’étais étudiante sur l’art et la résilience.
Je pense que ce sujet m’intéresse particulièrement. Ça m’a touché de t’entendre dire que j’étais résiliente. En fait je pense que j’ai envie que de cette expérience le beau, l’amour triomphe plus que la mort et la peine. C’est aussi peut être aussi la façon à moi de survivre. Parfois j’entends des témoignantes similaires au mien qui me donne le cafard, j’ai entendu des personnes me dirent qu’on ne se remet jamais de la perte d’un enfant. Quelque chose de plus fort à l’intérieur de moi me dit «  mais si, la vie reprendra, ma rose je pourrais y penser sans pleurer, je veux pouvoir sourire en pensant à elle ».
Y’a t’il possibilité sur ce forum d’échanger en privé ? Car tout le monde voit ce qu’on se répond non?
Je n’ai pas encore bien tout compris :)
Je t’embrasse Marie plein de courage à toi aussi à l’occasion je t’enverrai ma petite peinture de rouquine :)
Hannah
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Enregistré le : 20 avril 2024, 19:53

Re: Mort fœtale 38 SA+ 4 jours

Message par Hannah »

Hannah a écrit : 22 avril 2024, 12:34 Merci Marie,
Merci pour ton gentil message. Ohhhh qu’elles sont belles les rousses… ma fille est rousse on a jamais compris comment c’était possible, puis ma petite Rose, mon étoile l’était aussi. Depuis le décès je me mets à peindre plein de petites rousses dans mes aquarelles.
Je te suis sur le fait que le courage et la force on ne choisi pas. Je suis plus forte bien entourée, seule j’ai tendance à être dans la tristesse… j’avais fait mon mémoire quand j’étais étudiante sur l’art et la résilience.
Je pense que ce sujet m’intéresse particulièrement. Ça m’a touché de t’entendre dire que j’étais résiliente. En fait je pense que j’ai envie que de cette expérience le beau, l’amour triomphe plus que la mort et la peine. C’est aussi peut être aussi la façon à moi de survivre. Parfois j’entends des témoignantes similaires au mien qui me donne le cafard, j’ai entendu des personnes me dire qu’on ne se remet jamais de la perte d’un enfant. Quelque chose de plus fort à l’intérieur de moi me dit « mais si, la vie reprendra, ma rose je pourrais y penser sans pleurer, je veux pouvoir sourire en pensant à elle ».
Y’a t’il possibilité sur ce forum d’échanger en privé ? Car tout le monde voit ce qu’on se répond non?
Je n’ai pas encore bien tout compris :)
Je t’embrasse Marie plein de courage à toi aussi à l’occasion je t’enverrai ma petite peinture de rouquine :)
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