Plus que quelques jours...(IMG T21)
Posté : 24 mars 2024, 20:16
Bonjour à toutes,
Je vous lis maintenant depuis plusieurs jours pour tenter de me sentir moins seule, moins démunie. Je vous remercie tout d'abord pour tous vos témoignages qui m'ont fait pleurer, qui m'ont apaisée et qui m'ont fait réfléchir.
J'ai 30 ans et je suis enceinte de 16SA et 4 jours. Ma première grossesse.
Mardi 5 mars, j'ai passé mon échographie T1 et mon DPNI. L'échographie, comme les précédentes, était parfaite. Aucune anomalie détectée, un petit coeur fort et un bébé qui bougeait dans tous les sens. Nous avons vu ses petites mains parfaites, ses petites jambes et ses petits pieds qui gigotaient. Le médecin nous a prédit une petite fille.
Nous étions sur un nuage. On nous disait qu'à ce stade, nous avions 1 chance sur 1000 que ça se passe mal. Nous nous projetions plus que tout.
Mais au fond de moi, j'étais inquiète et anxieuse. J'avais un mauvais pressentiment et étais vraiment impatiente de recevoir les résultats de mon DPNI, pour écarter mes doutes. Je me disais que je m'inquiétais pour rien et que, bientôt, nous allions pouvoir commencer à préparer sa chambre.
Lundi 18 mars, j'ai reçu l'appel de ma gynéco. "J'ai vos résultats. Ils ne sont pas bons. Venez ce midi à l'hôpital.". Mon monde s'est écroulé. Je savais qu'un test aussi sûr ne laissait aucun espoir. Mon conjoint et moi nous sommes rendus à l'hôpital. Trisomie 21. J'étais dans un état second. La gynéco parlait d'amniocentèse en urgence, du fait que c'était la "faute à pas de chance", de ne pas s'accrocher à l'espoir d'un faux négatif, qu'une psychologue serait avec nous le lendemain. J'avais mal aux tripes, mal au coeur. Mal tout court. En pleurant, nous avons directement fait part de notre décision de ne pas imposer une vie de handicap et de souffrance à notre bébé. Cette douleur, elle nous incombe. En aucun cas, nous ne pouvions laisser notre enfant souffrir. A la fin de la consultation, après un silence pesant, dans un souffle, j'ai osé demander la confirmation du sexe. Une petite fille.
Dans un brouillard absolu, j'ai appelé mes parents pour leur annoncer la mauvaise nouvelle. J'ai vomi mes tripes le soir-même. J'ai été incapable de dormir, malgré l'épuisement. Je n'arrêtais pas de pleurer sans réussir à comprendre ce qui nous arrivait. J'ai trouvé ce forum. J'ai lu. Je me suis sentie moins seule.
Le lendemain, on m'a demandé de me rendre dans le bloc accouchement pour passer l'amniocentèse à 13h15. Nous avons eu un mal de chien à trouver ce service et avons réussi à nous perdre dans le couloir des salles des naissances. Une gentille infirmière nous a ensuite aiguillés jusqu'à la salle d'attente. Hagarde, j'ai vu une femme arriver des urgences pour des contractions. Elle était en fin de grossesse. Elle est passée devant moi et a été mise dans la salle de monitoring juste à côté de nous. J'entendais des rires. Les bruits de l'échographie. Les battements de coeur de son bébé. J'ai éclaté en sanglots. Ils nous ont laissés attendre 40 min dans ce couloir avant d'enfin m'emmener dans une chambre de la maternité pour passer l'amniocentèse. Mon conjoint et moi avons revu notre toute petite fille bouger à l'échographie, pendant que cinq personnes du corps médical s'affairaient autour de moi. Je pleurais silencieusement, toujours plongée dans un brouillard intense, en me disant que tout cela n'était qu'un cauchemar et que j'allais finir par me réveiller. J'avais l'impression d'être une poupée désarticulée, incapable de bouger, qui subissait ce qui lui tombait dessus. J'avais du mal à comprendre les questions des médecins, les gestes. J'entendais un nourrisson pleurer dans une autre chambre. Les médecins ont été rapides et doux. Nous avons ensuite passé nos prises de sang pour les tests génétiques. Alors que nous partions, la psychologue du service est passée en coup de vent. Elle avait besoin d'entendre nos motivations pour le noter dans "notre dossier", pour confirmer notre choix d'IMG. J'avais juste envie de rentrer et de me reposer, mais je me suis forcée à lui parler un peu pour éviter de devoir revenir à l'hôpital juste pour la voir.
Mercredi, j'ai commencé à retrouver mes sens. Une journée de calme. Mon conjoint et moi avons parlé, pleuré et touché mon ventre. Nous avons parlé à notre petite fille, pour qu'elle sente notre amour. Pour commencer à lui dire au revoir. Une accalmie dans la tempête. Et puis, l'hôpital a appelé. Ils s'étaient trompés de tubes pour nos prises de sang : nous devions encore y retourner. J'ai demandé d'une petite voix si cela pouvait se passer dans l'aile des prises de sang, sans trop y croire. Non. Nous devions retourner dans le bloc accouchement où les infirmières seraient prévenues de notre arrivée. J'ai pleuré. Encore. Et sur place, personne ne semblait être au courant : on nous a laissés 20 longues minutes dans la salle d'attente, avec une famille fébrile qui attendait la fin d'un heureux accouchement. Je me sentais tellement mal, tellement faible. Mon conjoint me serrait la main, conscient de ma douleur. J'étais consciente de la sienne.
Jeudi et vendredi, nous avons enfin eu du temps pour nous. Mon conjoint a décidé d'écrire une lettre à notre fille, nous avons préparé ses doudous crochetés avec amour par sa grand-mère. Grâce à vos témoignages, nous avons pris la décision que nous souhaitions la voir après l'accouchement pour lui dire au revoir. Nous avons passé du temps dans le jardin, au soleil, à écouter les oiseaux, à regarder les abeilles et nos poules. Nous avons caressé mon ventre, encore et encore. La gynéco a appelé pour dire que tous les résultats n'étaient pas encore là, mais que les premiers confirmaient le diagnostic. Elle nous a déjà donné les informations sur la suite : lundi, la confirmation finale ; mardi, le premier cachet ; mercredi soir, mon hospitalisation ; jeudi, le déclenchement. Jeudi, la fin de nos rêves et de notre petit bout. Vendredi soir, j'ai senti notre fille bouger pour la première fois. J'ai caressé mon ventre. J'ai un peu pleuré. Cette sensation magique en moi ne va pas durer.
Samedi, nous sommes allés acheter un poirier et l'avons planté dans le jardin. Un petit poirier qui fleurit fin mars, début avril. Pour voir la vie reprendre chaque année. Pour apaiser notre douleur et nous rappeler nos rêves, notre petite et tout l'amour que nous lui portons. Je ne savais pas si j'allais avoir la force d'aller le chercher après l'accouchement. J'avais peur aussi qu'en le plantant trop tard dans l'année, nous n'aurions pas de fleurs l'année prochaine... Cette idée m'était inconcevable. Le voir planté dans notre jardin me fait du bien. Je sais désormais que j'aurai un lieu paisible pour penser à elle.
Aujourd'hui, nous avons passé une journée calme. Notre petite fille est encore là jusqu'à jeudi. Nous tentons comme nous le pouvons de nous préparer pour ne rien regretter, pour l'accompagner jusqu'au bout. Je ne pensais pas un jour vivre une telle douleur, une telle tristesse. Il y a une semaine, je regardais des chambres pour bébé. Maintenant, je réfléchis aux doudous qui accompagneront le corps sans vie de ma toute petite fille.
Nous sommes anéantis. Nous sommes résignés : nous ne pouvons pas nous battre contre l'inévitable. Nous allons essayer de puiser dans le peu de force qu'il nous reste pour faire face aux jours difficiles qui arrivent.
Au début, je voulais que tout se termine vite pour ne pas souffrir. Maintenant, malgré l'infinie douleur, je profite de nos derniers moments ensemble. Je craque souvent. Je suis submergée par la peine.
Nous allons aussi devoir l'annoncer à nos amis proches qui savaient pour ma grossesse. Nous attendons que tout soit derrière nous, pour éviter les jugements et les commentaires maladroits durant cette période où j'ai l'impression de marcher sur un fil et de pouvoir tomber à tout moment.
J'ai peur de la suite, de l'accouchement, du vide.
Encore merci d'avoir partagé vos histoires. J'avais besoin de parler, moi aussi, même si je suis bien entourée par mon conjoint et nos familles.
Je pense à nous, à nos bébés. A ma fille.
Je vous lis maintenant depuis plusieurs jours pour tenter de me sentir moins seule, moins démunie. Je vous remercie tout d'abord pour tous vos témoignages qui m'ont fait pleurer, qui m'ont apaisée et qui m'ont fait réfléchir.
J'ai 30 ans et je suis enceinte de 16SA et 4 jours. Ma première grossesse.
Mardi 5 mars, j'ai passé mon échographie T1 et mon DPNI. L'échographie, comme les précédentes, était parfaite. Aucune anomalie détectée, un petit coeur fort et un bébé qui bougeait dans tous les sens. Nous avons vu ses petites mains parfaites, ses petites jambes et ses petits pieds qui gigotaient. Le médecin nous a prédit une petite fille.
Nous étions sur un nuage. On nous disait qu'à ce stade, nous avions 1 chance sur 1000 que ça se passe mal. Nous nous projetions plus que tout.
Mais au fond de moi, j'étais inquiète et anxieuse. J'avais un mauvais pressentiment et étais vraiment impatiente de recevoir les résultats de mon DPNI, pour écarter mes doutes. Je me disais que je m'inquiétais pour rien et que, bientôt, nous allions pouvoir commencer à préparer sa chambre.
Lundi 18 mars, j'ai reçu l'appel de ma gynéco. "J'ai vos résultats. Ils ne sont pas bons. Venez ce midi à l'hôpital.". Mon monde s'est écroulé. Je savais qu'un test aussi sûr ne laissait aucun espoir. Mon conjoint et moi nous sommes rendus à l'hôpital. Trisomie 21. J'étais dans un état second. La gynéco parlait d'amniocentèse en urgence, du fait que c'était la "faute à pas de chance", de ne pas s'accrocher à l'espoir d'un faux négatif, qu'une psychologue serait avec nous le lendemain. J'avais mal aux tripes, mal au coeur. Mal tout court. En pleurant, nous avons directement fait part de notre décision de ne pas imposer une vie de handicap et de souffrance à notre bébé. Cette douleur, elle nous incombe. En aucun cas, nous ne pouvions laisser notre enfant souffrir. A la fin de la consultation, après un silence pesant, dans un souffle, j'ai osé demander la confirmation du sexe. Une petite fille.
Dans un brouillard absolu, j'ai appelé mes parents pour leur annoncer la mauvaise nouvelle. J'ai vomi mes tripes le soir-même. J'ai été incapable de dormir, malgré l'épuisement. Je n'arrêtais pas de pleurer sans réussir à comprendre ce qui nous arrivait. J'ai trouvé ce forum. J'ai lu. Je me suis sentie moins seule.
Le lendemain, on m'a demandé de me rendre dans le bloc accouchement pour passer l'amniocentèse à 13h15. Nous avons eu un mal de chien à trouver ce service et avons réussi à nous perdre dans le couloir des salles des naissances. Une gentille infirmière nous a ensuite aiguillés jusqu'à la salle d'attente. Hagarde, j'ai vu une femme arriver des urgences pour des contractions. Elle était en fin de grossesse. Elle est passée devant moi et a été mise dans la salle de monitoring juste à côté de nous. J'entendais des rires. Les bruits de l'échographie. Les battements de coeur de son bébé. J'ai éclaté en sanglots. Ils nous ont laissés attendre 40 min dans ce couloir avant d'enfin m'emmener dans une chambre de la maternité pour passer l'amniocentèse. Mon conjoint et moi avons revu notre toute petite fille bouger à l'échographie, pendant que cinq personnes du corps médical s'affairaient autour de moi. Je pleurais silencieusement, toujours plongée dans un brouillard intense, en me disant que tout cela n'était qu'un cauchemar et que j'allais finir par me réveiller. J'avais l'impression d'être une poupée désarticulée, incapable de bouger, qui subissait ce qui lui tombait dessus. J'avais du mal à comprendre les questions des médecins, les gestes. J'entendais un nourrisson pleurer dans une autre chambre. Les médecins ont été rapides et doux. Nous avons ensuite passé nos prises de sang pour les tests génétiques. Alors que nous partions, la psychologue du service est passée en coup de vent. Elle avait besoin d'entendre nos motivations pour le noter dans "notre dossier", pour confirmer notre choix d'IMG. J'avais juste envie de rentrer et de me reposer, mais je me suis forcée à lui parler un peu pour éviter de devoir revenir à l'hôpital juste pour la voir.
Mercredi, j'ai commencé à retrouver mes sens. Une journée de calme. Mon conjoint et moi avons parlé, pleuré et touché mon ventre. Nous avons parlé à notre petite fille, pour qu'elle sente notre amour. Pour commencer à lui dire au revoir. Une accalmie dans la tempête. Et puis, l'hôpital a appelé. Ils s'étaient trompés de tubes pour nos prises de sang : nous devions encore y retourner. J'ai demandé d'une petite voix si cela pouvait se passer dans l'aile des prises de sang, sans trop y croire. Non. Nous devions retourner dans le bloc accouchement où les infirmières seraient prévenues de notre arrivée. J'ai pleuré. Encore. Et sur place, personne ne semblait être au courant : on nous a laissés 20 longues minutes dans la salle d'attente, avec une famille fébrile qui attendait la fin d'un heureux accouchement. Je me sentais tellement mal, tellement faible. Mon conjoint me serrait la main, conscient de ma douleur. J'étais consciente de la sienne.
Jeudi et vendredi, nous avons enfin eu du temps pour nous. Mon conjoint a décidé d'écrire une lettre à notre fille, nous avons préparé ses doudous crochetés avec amour par sa grand-mère. Grâce à vos témoignages, nous avons pris la décision que nous souhaitions la voir après l'accouchement pour lui dire au revoir. Nous avons passé du temps dans le jardin, au soleil, à écouter les oiseaux, à regarder les abeilles et nos poules. Nous avons caressé mon ventre, encore et encore. La gynéco a appelé pour dire que tous les résultats n'étaient pas encore là, mais que les premiers confirmaient le diagnostic. Elle nous a déjà donné les informations sur la suite : lundi, la confirmation finale ; mardi, le premier cachet ; mercredi soir, mon hospitalisation ; jeudi, le déclenchement. Jeudi, la fin de nos rêves et de notre petit bout. Vendredi soir, j'ai senti notre fille bouger pour la première fois. J'ai caressé mon ventre. J'ai un peu pleuré. Cette sensation magique en moi ne va pas durer.
Samedi, nous sommes allés acheter un poirier et l'avons planté dans le jardin. Un petit poirier qui fleurit fin mars, début avril. Pour voir la vie reprendre chaque année. Pour apaiser notre douleur et nous rappeler nos rêves, notre petite et tout l'amour que nous lui portons. Je ne savais pas si j'allais avoir la force d'aller le chercher après l'accouchement. J'avais peur aussi qu'en le plantant trop tard dans l'année, nous n'aurions pas de fleurs l'année prochaine... Cette idée m'était inconcevable. Le voir planté dans notre jardin me fait du bien. Je sais désormais que j'aurai un lieu paisible pour penser à elle.
Aujourd'hui, nous avons passé une journée calme. Notre petite fille est encore là jusqu'à jeudi. Nous tentons comme nous le pouvons de nous préparer pour ne rien regretter, pour l'accompagner jusqu'au bout. Je ne pensais pas un jour vivre une telle douleur, une telle tristesse. Il y a une semaine, je regardais des chambres pour bébé. Maintenant, je réfléchis aux doudous qui accompagneront le corps sans vie de ma toute petite fille.
Nous sommes anéantis. Nous sommes résignés : nous ne pouvons pas nous battre contre l'inévitable. Nous allons essayer de puiser dans le peu de force qu'il nous reste pour faire face aux jours difficiles qui arrivent.
Au début, je voulais que tout se termine vite pour ne pas souffrir. Maintenant, malgré l'infinie douleur, je profite de nos derniers moments ensemble. Je craque souvent. Je suis submergée par la peine.
Nous allons aussi devoir l'annoncer à nos amis proches qui savaient pour ma grossesse. Nous attendons que tout soit derrière nous, pour éviter les jugements et les commentaires maladroits durant cette période où j'ai l'impression de marcher sur un fil et de pouvoir tomber à tout moment.
J'ai peur de la suite, de l'accouchement, du vide.
Encore merci d'avoir partagé vos histoires. J'avais besoin de parler, moi aussi, même si je suis bien entourée par mon conjoint et nos familles.
Je pense à nous, à nos bébés. A ma fille.