Les premiers jours qui suivent l’IMG

[Malo12122023]

Bonjour à tous et toutes
C’est avec beaucoup de tristesse et de désespoir que j’écris ce message.
J’ai fait une fausse couche au mois de juin 2023, à 2 mois de grossesse.
Puis une nouvelle lueur d’espoir en août 2023, j’apprends que je suis de nouveau enceinte. Tout se passe merveilleusement bien et nous passons enfin le stade du 1er trimestre qui nous faisait tant peur.
Malheureusement, nous avons appris quelques semaines plus tard que notre petit Malo était porteur de la trisomie 21. Rien ne laissait présager de tels résultats : écho T1 parfaite, pas d’anomalie constatée, 26 ans… et pourtant c’est tombé sur nous.
Ensuite, les examens, rdv et les décisions se sont enchaînés : amniocentese, généticien, rdv pré IMG, IMG… nous avons effectivement pris la lourde décision d’arrêter la grossesse, nous ne souhaitions pas donner la vie à un enfant qui serait confronté à la maladie, au regard et à la méchanceté des autres toute sa vie.
Le 11/12/2023, nous sommes rentrés à l’hôpital et avons été pris en charge par une équipe médicale exceptionnelle.
Le temps a été long, très long (plus de 13h à partir de la pose de la péridurale) et je suis passée par différents étapes : la tristesse, la panique, la honte, la solitude, la jalousie… mais j’ai toujours été accompagnée et j’ai eu la chance d’avoir mon conjoint à mes côtés.
Notre petit Malo a rejoint les étoiles ce mardi 12 décembre 2023 à 1h17. Ce fut un soulagement après les semaines de questionnement, de réflexion, d’attente.
Mais voilà, depuis que nous sommes rentrés de l’hôpital, je commence à broyer du noir. L’idée de me retrouver seule me fait atrocement peur.
Je n’ai parlé de cette grossesse qu’à très peu de personne, nous n’avions pas encore fait les annonces. Je me sens donc très seule face à tout cela, à toutes les émotions que je traverse. Je n’ai pas non plus envie d’en parler autour de moi, je n’arriverai pas à gérer la tristesse de ces personnes et la maladresse des mots utilisés.
Mon conjoint est présent et comprend la situation, je me suis déjà effondrée plus d’une fois dans ses bras. Mais rien n’y fait, je n’y arrive pas.
Je garde l’image de ce bébé sans vie dans ma tête, je me dis que je ne suis pas capable de mettre au monde un enfant en vie et en bonne santé, qu’il y a qqc qui cloche chez moi, que je n’arriverai jamais à passer au dessus de tout ça …

Avez vous des conseils pour les premiers jours qui suivent l’IMG ?

Merci à vous

[Sarah23]

Bonjour Malo,
Je suis vraiment désolée de t’accueillir ici. Pour ces premiers jours il serait bien de ne pas rester seule, ton conjoint, tes parents ou des amis proches peuvent être là? Que te dire, il y a tellement de sentiments dans cet après. Pour ma part, c’était l’été dernier, ma mère est venue un peu, je lui avais dit non c’est pas la peine mais elle n’a pas écouté et c’était très bien car j’étais très faible physiquement. J’ai voulu vite refaire des choses même si physiquement c’était compliqué, du coup je me suis retrouvée une fois à l’infirmerie d’un magasin, moi qui déteste attirer l’attention c’était raté ! Bref, on ne réagit pas tous de la même façon. J’ai eu le besoin et l’envie d’un suivi psy un mois après, d’emblée c’était trop violent pour moi même d’en parler à mon conjoint ou à des proches c’était trop difficile. À des amis je parlais par message, c’était plus facile, ils ont été super, être juste là. J’ai eu besoin de trouver des témoignages aussi, donc ce forum mais aussi des lectures, des podcasts, des vidéos. Je cherchais un sens, comme toi je me suis dit y’a quelque chose c’est pas possible alors bien sûr mon âge augmentait les risques mais la généticienne m’a dit que pas tant que ça, que ça arrivait à des gens de 20 ans, bref la faute à pas de chance est difficilement entendable. Une coupure de vacances en famille m’a aussi fait du bien même si j’ai eu la sensation d’être décalée, dans un autre monde, mais cette sensation est restée très longtemps. Puis il a fallu reprendre le travail et le quotidien, tout me paraissait insurmontable mais passé la première porte ça allait même si les premiers mois chaque jours me coutait. Je pleurais beaucoup dans ma voiture seule, ça me permettait d’évacuer. Il y avait des jours avec et des jours sans, c’était comme ça, j’ai appris à être indulgente avec moi-même, moi qui était d’une humeur assez stable auparavant bah maintenant je peux vite avoir beaucoup d’émotions.
Voilà, je ne sais pas si ça t’aidera mais n’hésite pas à venir ici car ça a été d’un grand soutien aussi.
Bon courage et écoute toi, tu as le droit d’être triste, en colère etc, c’est injuste tout ça. Prend soin de toi

[Malo12122023]

Bonjour Sarah,
Merci pour ta réponse qui me réconforte, je me sens comprise et ça fait énormément de bien.
Je suis également navrée de ce qui a pu t’arriver, ça ne devrait arriver à personne.
Tout comme toi, je suis aussi d’humeur stable et positive. Mais aujourd’hui, je me retrouve confronter à la réalité et il va falloir , avec du temps, que j’apprenne à positiver l’enfer.
Pour ce qui concerne mon entourage, mon conjoint est retourné au travail ce matin et ma mère m’a proposé de venir me voir dans la semaine mais j’ai décliné sa proposition. La encore, je me retrouve dans ce que tu dis, je n’ai pas le courage de voir qui que ce soit, d’affronter les questions (oui parce que ma mère est très maladroite à ce niveau là).
Finalement je me raccroche à tout ce qui me reste, mon conjoint. C’est ma bulle d’oxygène et j’ai l’impression que c’est la seule personne à me comprendre.
Je reprends le travail lundi prochain, j’espère que ça me changera les idées. Pour le moment, j’ai juste une crainte, celle de ne pas réussir à garder un « masque » sur ma tête et de ne pas sourire en toute circonstance. Ça ne va pas et je n’arrive pas à le cacher.
Merci beaucoup pour ton aide, courage à toi.

[Chacha22-Luna230622]

Bonjour à toi Maman de Malo,
Ton message découvert cette nuit m a tellement fait penser à tout ce qu'on a traversé (à 10 années près, puisque j'avais plutôt 36 ans lors de mon IMG)
Tout ce que tu évoques lors de ce moment si particulier de l'accouchement, je l'ai ressenti. Le vide intersidéral en rentrant à la maison aussi, le sentiment de déconnexion totale avec la réalité, l'impossibilité totale d'être joyeuse, les larmes toute la journée et le besoin de parler d'elle, encore, pour ne pas qu'on l'oublie ...
Au final, on oublie seulement comment on a survécu à un truc pareil, notre enfant jamais ...
Mais si je fais un effort de mémoire, je ne suis pas revenue au travail tout de suite et j'ai bien fait car à mon retour, on m'a signifié qu'il était temps de "reprendre le fil de ma vie" ... comme si rien ne s'était passé, comme si je n'avais pas du signer des papiers pour interrompre la vie de ma toute petite fille et choisir une sépulture..
Personne ne devrait être confronté à un truc pareil, c'est juste inhumain.
Tu n'as pas à tricher, à adopter un masque, ce qui t'est arrivé est immensement douloureux.
Je me souviens m'être sentie en sécurité ici, pendant la longue traversée du désert, où personne n'a jamais eu de mots indélicats et tout le monde était bienveillant.
J'ai aussi aperçu durant l'été des filles du topic qui abordaient une autre phase de leur vie : celle de l'enfant d'après et cette perspective me faisait du bien.
J'ai lu une grande partie des sujets du forum, de celles pour qui la vie leur a offert une seconde chance, celles qui ont récidivé et celles pour qui la lumière est venue autrement.
J'ai vu la longue liste des bébés miracles, qui redonne du courage dans le noir.
Et j'ai lu cette phrase que j'ai répète en boucle : je veux ma revanche sur la vie.
Quelques ressources précieuses : au revoir podcast, le blog d à nos étoiles, l'épisode de Katy l'impossible choix sur bliss stories, le documentaire le berceau vide et toutes les ressources découvertes par Sarah aussi
Chaque heure passée est une heure de gagné.
Chaque jour de passé est un jour de lutte gagné.
Jusqu'à ce qu'on n'arrive plus à compter. Et qu'on souritt à nouveau, comme ça, sans s'en rendre compte avec de la culpabilité dans le cœur, comment je pourrais sourire avec ce qui m'est arrivé ? Comment je pourrais vivre à nouveau alors que mon bébé est mort ?
Au fil du temps, la question s'inverse ; c'est parce que nos enfants sont morts qu'il faut vivre intensément ❤ nous le leur devons.
Mais ça, c'est pour plus tard, comme dit Paul Valery, " le vent se lève, il faut tenter de vivre"
Je pense bien à toi