Forum de l'association Petite Émilie

Bonjour,
Je viens d'avoir le courage de venir sur ce forum alors que je suis en vacances avec mon mari et ma fille de 3ans, Line.
Mon homme ne parle pas... et moi j'ai tellement besoin de parler de notre petit Ruben... mais à qui parler? A la famille qui souffre déjà tellement de me voir si triste? Aux amies à qui je n'ai pas envie de faire peser un tel récit? A des inconnus qui ne peuvent que dire des mots maladroits?
Et puis qui comprend?
Alors je suis venue ici, me disant qu'on me comprendra... que je peux tout dire sans avoir peur de choquer, sans avoir peur de ne pas faire ce qu'il faut...
Alors je me lance.
Je ne sais pas par où commencer.
J'ai perdu mon petit garçon, Ruben, le 1er Août 2016. ça ne fait pas 1 mois et je suis perdue...
J'étais à 34 semaines soit 7mois1/2 de grossesse.
Tout allait bien jusqu'au 29juin où j'ai été hospitalisée: un problème a été décelé à l'échographie lors d'une visite de contrôle du 7ème mois.
Je suis restée tout le mois de juillet à l'hopital: examens divers et variés pour comprendre ce qu'a le bébé, menace d'accouchement prématuré et bien sûr amniocentèse.
Ruben a une ascite au niveau de l'abdomen à cause d'un bouchon de méconium dans le côlon et une perforation de l'intestin. Une opération sera nécessaire à la naissance.
Puis les résultats de l'amniocentèse sont tombés le 29 juillet, le jour où ma vie a basculé.
Ruben a 2 anomalies chromosomiques avec des conséquences neurologiques graves et d'autres inconnues. En plus de son problème aux intestins...
La plus grande peur de ma vie, avoir un enfant malade et handicapé se profile... je n'en serais pas capable...
L'IMG a eu lieu le 1er Août. Le pire jour de ma vie.
Ruben faisait 2,750 kg, ma fille Line née 3 ans auparavant en faisait 2,840kg...
C'était un beau bébé dodu, avec pleins de cheveux bruns, un joli petit nez et de belles lèvres mais je ne connaîtrais jamais la couleur de ses yeux...
Comme on l'a expliqué à notre fille, le bébé était trop malade, on n'a pas pu le ramener à la maison...
Et j'en suis là... ça fait 3semaines...
Mon ventre est redevenu presque aussi plat qu'avant... je n'ai presque plus de saignements... mes seins dégonflent... que reste-il?
Qui se souviendra de notre petit Ruben?
Comment peut-on se remettre de la perte d'un bébé?
C'est ma vie qui s'écroule: avoir des enfants avec peu d'écart, prendre une année de congé parental pour faire un break dans mon travail si difficile et me consacrer à mes enfants...
Et puis la semaine dernière, nouveau coup de massue: c'est moi qui ait transmis une anomalie chromosomique à Ruben.
Comment pourrais-je avoir un nouvel enfant?? Est-ce que Line est porteuse de cette anomalie? Aura-t-elle des difficultés à avoir des enfants quand elle sera grande? Comment lui expliquer tout ça?
J'ai tant de questions.... qui m'épuisent...
J'ai l'impression d'être suspendue dans le vide... le vide... ce grand vide qu'il a laissé dans ma vie...
"Des vacances à la mer pour se reconstruire" a dit mon mari. Et me voilà sur la plage sans pouvoir me baigner car j'ai accouché il y a 3 semaines, sans pouvoir bronzer car je prends des médocs qui rendent photosensible, sans pouvoir aller au resto car mon mari veut manger à l'appartement,...et sans pouvoir donner le sein à mon bébé qui n'est pas là...
Et sans pouvoir parler car mon mari ne parle pas... Alors me voilà...
Voilà mon histoire, l'histoire que j'ai l'impression d'avoir rêvé, l'histoire que j'aimerais tant ne pas avoir à raconter, l'histoire que je n'arrive pas à accepter...

Bonjour Alex
Et désolé de t'accueillir parmi nous

Ouaahh ton récit est tellement émouvant , tes mots sont très touchants

La vie est cruelle oui , le vide qu'elle nous laisse paraît insurmontable
On se sens comme morte de l'intérieur
On a plus goût a rien
On a besoin de rien , juste avoir notre bébé dans nos bras ...


Je te comprends tellement
J'ai accouché il y'a 3 mois a 34SA aussi
Pour une t21 découverte tardivement a l'écho du 3ème trimestre ...
Du jour au lendemain , le monde s'écroule autour de nous
Quand tout le monde me disait que tout allait bien pendant plus de 7 mois ...
Si proche du terme , c'est un cauchemars , tout était prêt a la maison
C'était notre premier et le vide en rentrant de la maternité a 2 au lieu d'être a 3 est immense

Je te souhaite d'être forte et courageuse
Tu doit tenir pour ta grande Et belle Line

Bonjour Alex,
Désolé de t'accueillir ici, c'est une épreuve très dur. Moi c'est mon mari qui a transmis la translocation desequilibrėe de notre fille Ellie ma petite avait une trisomie 8 partielle et une délétion du chromosome 4p. Je n'ai pas d'autre enfant Ellie est notre enfant unique. Nous avons mis 9 ans pour avoir notre petite fille naturellement. Je ne sais pas si l'avenir nous donnera un jour un enfant porteur sain. J'ai perdu ma fille le 21 juin 2016 et les jours sont difficiles aujourd'hui je pleure un peu moins mais je pense qu'on ne se remet jamais de la perte d'un enfant le temps attenu nos larmes mais pas le vide. Il te faudra du temps comme nous toutes ici et puis tu sais qu'on est là dans la même peine le même vide le même deuil. Il faut qu'on se soutienne et qu'on soit forte pour nos anges.
La vie est un combat.
Courage
Douce pensée à nos anges
Severine

Bonjour à toi,

Quand je te lis, je retrouve malheureusement des traits de mon histoire.
J'ai perdu mon petit Bastien lors de l'accouchement à 38 semaines et 4 jours. Une probable hémorragie de Benkiser lui a volé sa vie et une partie de la mienne avec.
Bastien est né sans vie le 17/07/2016 par césarienne d'urgence.
Comme tu le dis, seul le vide est présent à ce jour. Et nous devons subir le deuil de notre bébé, de notre grossesse et de l'avenir que nous avions projeté avec lui.
Comment vivre sans lui? C'est la question que je me pose chaque jour...
Mon ami me stimule beaucoup afin que je sorte, que je vois du monde. Et il a raison. Lui aussi ne parle pas beaucoup de Bastien contrairement à moi.

Moi, j'ai besoin de faire vivre Bastien à ma manière et surtout que tout le monde sache que nous sommes papa et maman à ce jour.
Pour moi, c'est reconnaître l'existence de mon bébé, même s'il n'est plus là et que les gens qui nous entourent n'ont pas eu le temps de faire sa connaissance.
Comment le faire exister? Je parle beaucoup de lui, de l'accouchement. La maternité nous a donné une photo de Bastien ainsi que l'emprunte de ses mains et ses pieds. Et c'est avec grande fierté que je fais découvrir mon petit Bastien à l'entourage qui le souhaite.
Je suis actuellement en train de préparer un album de ma grossesse. Donc je regroupe toutes les photos que nous avons pu faire depuis le début de la grossesse jusqu'à la naissance de Bastien. En faisant ceci, j'ai l'impression d'être active pour lui.
Tout cela est très difficile mais je sais que la tristesse que j'ai, sera toujours là...

La semaine dernière, nous sommes partis au bord de la mer... Le premier jour, je me demandais ce que je faisais là (sans mon bébé, des familles et des femmes enceintes partout, baignade interdite et autres...). Et, à la fin de ce petit séjour, je me suis rendue compte que ce changement de décor m'avait fait du bien... J'ai pu pendant quelques brefs instants penser à autre chose et j'ai même passé une journée sans pleurer...
Je ne te cache pas que le retour à la maison a été difficile mais je ne regrette pas ce petit séjour.

Cela fait 1 mois et demi que je suis une maman orpheline. Et je me rend compte que j'avance mais par petites étapes. Je me demande toujours comment je vais surmonter tout ceci.

Parler, est pour moi important. Sur les forums mais pas uniquement avec mon chéri (je le pousse beaucoup), avec mon entourage ( il faut arriver à briser ce tabou du deuil), et avec des professionnels ( notamment une psychologue).

Nous vivons toutes et tous l'insurmontable...

Ton petit Ruben est avec mon petit Bastien, à ce jour...

Merci pour vos réponses et votre soutien.
En vous lisant, j'ai presque honte d'être si triste alors que j'ai déjà une fille qui se porte très bien alors que tant de mamans présentes sur le forum ont perdu leur premier bébé et/ou en ont perdu plusieurs... Comment est-ce que j'ose me plaindre?
J'ai tant de sentiments différents qui me traversent et qui changent d'une minute à l'autre... c'est tellement déroutant. Je ne sais pas quoi en faire de ces sentiments: tristesse, inquiétude, interrogations, culpabilité, lassitude, et j'en passe... mais aussi reconnaissance, motivation, envie d'aller de l'avant,... J'ai l'impression d'avoir perdu le contrôle de moi-même! J'ai peur de devenir dingue ou depressive ou encore bipolaire!
C'est du grand n'importe quoi, en résumé...
Une minute, je me dis "tiens, tu pleures pas aujourd'hui, c'est cool" et une minute plus tard, je repense à Ruben et les larmes me viennent...
Après la grande détresse d'hier, aujourd'hui, j'ai dit "fuck aux interdits": je me suis baignée, très rapidement, certes, mais baignée quand même dans la mer et j'ai cramé au soleil, ok ça va piquer mais tant pis! Bref, n'importe quoi!
Vous aussi, le moral fait du yoyo?
Comment faire pour retrouver un équilibre?

Effectivement vous avez une fille, mais ca empeche pas la douleur de cette perte horrible.
Perso Elisa est mon 1 er bébé, je ne pense pas que la peine soit moindre pour vous.
Il faut pensez a vous...
Je comprend tout a fait vos etats d humeur, un moment ça va et l autre on pleure... On est toutes pareilles!
Malheureusement nous sommes toutes unies dans la même douleure insupportable!

J ai pas osé me baigner moi, peut etre ce week-end, ca fera 3 semaines lundi que j ai accouche... alors je me dis pourquoi pas!!

Moi, je culpabilise des que je fait quelque chose, j ai l impression de la trahir!

Bon courage a vous!

Tu ne te plains pas Alex, tu exprimes simplement ton chagrin et ta colère qui sont légitimes.
Quelques soient nos histoire, ce que l'on vit nous rassemble et nous unis.

C'est certain que notre état d'esprit fait le yoyo.
Pour ma part, un jour je suis au fond du gouffre et un autre jour, j'avance.
Un jour, j'ai envie de me détruire et un autre jour, je pense à moi et mon chéri et me projette vers une autre grossesse.
Un jour, je culpabilise de sortir, de rire et un autre jour, je me surprend à apprécier pendant un bref instant cette vie.

Cette vie qui nous m'a volé mon bébé, vos bébés, nos bébés...

Je ne me reconnais plus, moi qui étais pleine de vie, dynamique, toujours très festive et souriante... La vie ne sera plus comme avant.
Moi aussi, j'ai peur de m'engouffrer dans la dépression, de "péter un plomb" mais je me dis qu'il faut que je sois forte.
Et puis, notre désir à mon ami et moi d'être parents ne s'est pas envolé avec Bastien. Ce désir est d'autant plus fort, dans la mesure où nous avons été privés de Bastien.
La seule chose qui compte aujourd'hui, c'est que mon Bastien est au plus vite un petit frère ou une petite sœur.

Mais que cette vie est dure.

Tout le monde dit que le temps fera les choses...
Est-ce vrai? ... Pourra-t-on en reparler?...

C'est tout a fait ça Géraldine87
Tous ces sentiments qui font le yoyo, je connaît aussi
C'est exactement ça ...
Pareil tout le monde nous dit que ça ira mieux avec le temps
J'ai tellement de mal a y croire aussi