Milo dans les étoiles
Posté : 30 mars 2019, 14:26
Bonjour à toutes et à tous,
Voilà maintenant plusieurs semaines que je lis vos histoires, que je pleure vos anges envolés, que je découvre votre douleur et vos petits bonheurs.
Plusieurs semaines que je prie pour ne pas devenir une des vôtres, que je me dis que les médecins se sont trompés, qu'ils vont m'appeler pour me dire "nous ne comprenons pas ce qui s'est passé, mais c'est une erreur tout va bien!"
Mais voilà, je suis là aujourd'hui à vous écrire, vous raconter un bout de notre histoire, donc je n'ai jamais reçu ce coup de fil... J'en ai reçu des coups de fil mais jamais celui tant espéré.
Tout à commencé le 2 janvier 2019, un doute, un test de grossesse, 2 jolis traits roses... Une surprise, un accident, un merveilleux accident... Maman de 2 petites filles, cette grossesse n'était pas prévue. Elle nous a chamboulé, à ça oui ! On a douté, on a eu peur, cette grossesse remettait en cause bien des projets ! Mais bientôt le doute et l'incertitude on fait place à la joie et au bonheur d'agrandir notre jolie famille. Peut-être que cette fois nous auront la chance d'avoir un héritier, comme on se plait à plaisanter !
Le rendez-vous est pris chez le gyneco, la grossesse est confirmée, on entend son tout petit coeur, un coeur de géant de 25mm !
Les nausées et la fatigue sont au rendez-vous, les journées sont longues, mais ayant déjà eu 2 enfants, je sais que c'est l'affaire de quelques semaines.
21 février, arrive le rendez-vous de l'écho T1. Nous y allons confiants en ayant qu'un espoir en tête, pouvoir connaitre le sexe de notre petit bébé.
L'écho commence tout se passe bien, jusqu'au moment ou surgit ce silence que vous connaissez toutes. La clarté nucale est bien trop épaisse, 3,6 mm, c'est trop. Combinée à mon âge, 37 ans, le docteur nous annonce un risque de trisomie élevé. C'est le choc, on oublie vite nos préoccupations concernant le sexe de notre enfant et on trouve la force de demander ce qu'on doit faire. On nous prescrit le tritest en nous annonçant que le risque combiée sera forcément mauvais, mais nous devons attendre ces résultats dans un premier temps pour pouvoir prétendre au DPNI.
On attend, les heures semblent être des jours, les jours des mois.
Le résultat tombe mauvais comme prévu : 1/10. Mon gynéco me dit qu'à ce niveau c'est forcément pathologique, qu'il nous a pris un rendez-vous avec un spécialiste à l'hôpital, que nous devons y aller dans la journée.
J'appelle mon mari, on part en trombe du travail. Bizarrement ce résultat ne résonne pas en moi. Je ne vois que les 9 chances sur 10 que tout aille bien.
Nous arrivons à l'hôpital et le spécialiste nous parle d'amniocentèse, de biopsie du trophoblaste, de fausses couches... L'amniocentèse il faudra encore attendre quelques semaines, la biopsie est plus rapide mais plus douloureuse et plus risquée..Impossible de choisir, je ne vois pas l'urgence puisque mon bébé va bien.
Il nous propose une nouvelle écho pour voir comment va notre bébé. On rentre en salle et il commence son examen dans un silence de plomb que nous commençons à savoir interpréter.... Je le vois il s'attarde sur son petit coeur, du rouge et du bleu apparaissent à l'écran encore et encore...
Nous retournons dans son bureau il nous dit qu'il suspecte un CAV : canal atrio ventriculaire, cardiopathie liée à la trisomie dans 50% des cas.
On ne parle plus d'attendre, il faut faire une biopsie du trophoblaste dès le lendemain pour avoir les premiers résultats au plus vite.
Nous retournons donc à l'hôpital dès le lendemain matin et pour moi cet examen ne se passe pas bien : le docteur a du mal à prélever suffisamment de cellules, donc l'examen dure et dure et a chaque fois qu'il remue son aiguille dans mon ventre j'ai l'impression qu'il me poignarde.
Les premiers résultats tardent à arriver, je ne me déplace plus sans mon téléphone, trop peur de louper son appel. Je me dis que si les résultats tardent à arriver c'est parce qu'ils cherchent encore et qu'ils ne trouvent rien...
Une semaine après et plusieurs relances auprès de l'hôpital, les résultats confirment les suspicions du docteur : notre enfant est bien porteur de trisomie 21. C'est le choc... je n'y crois pas, ce diagnostic ne résonne pas en moi.
Seulement 16 cellules on pu être analysées, ce qui est trop peu, donc il faut attendre le résultats de la mise en culture d'ici 2 semaines pour pouvoir prendre une décision. Mais le diagnostic ne changera pas selon le docteur.
2 semaines d'attente, d'horreur, 2 semaines à parcourir tous les sites, les forums, à visionner tous les reportages concernant aussi bien l'IMG que la trisomie 21.
L'IMG me semble inconcevable, je commence à reprendre espoir et à me dire que malgré le handicap de la trisomie, je suis sure que nous pouvons apporter amour et bonheur à notre enfant.
Mon mari est plus réticent face à mes espoirs mais commence aussi à imaginer une autre issue que l'IMG... On en oublie même la cardiopathie...On commence même à s'imaginer être dans l'infime pourcentage d'erreurs entre le premier et deuxième diagnostic.
Mais les résultats définitifs tombent finalement : trisomie 21 libre et homogène. Nous n'avons plus le choix que de prendre une décision.
Retour à l'hôpital : nous informons le docteur que pour nous la trisomie 21 "seule" n'est pas une raison suffisante, que notre décision dépendra des éventuelles anomalies annexes.
Le docteur comprend notre choix et nous dit que nous devons donc pratiquer une nouvelle écho. Et nos derniers espoirs s"envolent, la cardiopathie est plus lourde que prévue : notre enfant ne pourra respirer seul qu'au prix de multiples opérations à coeur ouvert, avec toutes les complications que cela entrainera sur sa santé.
Je me sentais la force de lui offrir un avenir malgré son handicap, mais je ne me sens pas la force de voir mon bébé arraché à la naissance, branché à de multiples tuyaux, son petit corps et coeur maltraité dans les tous premiers jours de sa vie. Pas le force d'avoir peur de le perdre à chaque rhume, chaque poussée de fièvre...
Nous prenons donc la décision impensable jusqu'à présent et signons donc la demande d'IMG. Nous sommes vendredi 22 mars 2019, un an jour pour jour que mon père nous a quitté. C'est donc ça la fatalité.
L'IMG est programmée le lundi 25 mars 2019. Je suis hospitalisée le dimanche soir. Le lundi je descends à 8h30 en salle d'accouchement, cette salle avec le fameux carré orange sur la porte...
On me pose la péridurale, je fais un malaise. Je m'allonge enfin et sens mes jambes et mon bassin s'engourdir. Je déteste cette sensation. Je n'ai pas eu de péridurale pour ms 2 précédentes grossesses car mes filles sont arrivées très vite. On me prédit un accouchement rapide mais les heures passent, passent... Une nouvelle pensée folle m'envahit : s'il ne veut pas sortir c'est parce qu'il est bien au creux de mon ventre, qu'il est bien parce qu'il va bien...
A 23H07, après plus de 11h d'attente, a 17SA +4 jours, sans douleur physique, comme s'il ne voulait pas que je souffre davantage, mon tout petit, mon fils, mon innocent, mon Milo sort de mon corps. Je le sens une dernière fois au creux de moi et on me l'arrache pour toujours. Sans un bruit la sage femme sort de la salle. Cette fois je réalise pour de bon qu'il est partit, que je l'ai perdu pour toujours... Je m'éffondre d'autant plus que la sage femme doit pratiquée une révision utérine car le placenta ne se décolle pas. Je sens sa main au fond de moi qui m'arrache les tous derniers fragments de mon fils. Je n'ai pas mal physiquement mais moralement c'est trop dur.
Mon mari, sortit pendant la révision, rentre à nouveau dans la salle et nous pleurons ensemble mais chacun de notre côté, en réalisant que cette fois c'est fini, que notre tout petit amour Milo est parti rejoindre les étoiles.
S'en suivent 2 jours d'hospitalisation douloureux ou je fais malaises sur malaises. Mon corps me rappelle que je viens de vivre l'inimaginable.
Je suis rentrée chez moi le mercredi 27 mars, vide, sans mon fils dans les bras avec pour seuls souvenirs son petit bracelet et ses toutes petites empreintes si belles.
Je t'aime mon enfant, mon innocent, mon étoile.
"J'arrive sur les berges d'une rivière
Une voix m'appelle puis se perd
C'est ta voix
À l'autre bout du monde
Ta voix qui me dit mon trésor
Tout ce temps, je n'étais pas mort
Je vivais
À l'autre bout du monde"
L'autre bout du Monde, Emily Loizeau
Voilà maintenant plusieurs semaines que je lis vos histoires, que je pleure vos anges envolés, que je découvre votre douleur et vos petits bonheurs.
Plusieurs semaines que je prie pour ne pas devenir une des vôtres, que je me dis que les médecins se sont trompés, qu'ils vont m'appeler pour me dire "nous ne comprenons pas ce qui s'est passé, mais c'est une erreur tout va bien!"
Mais voilà, je suis là aujourd'hui à vous écrire, vous raconter un bout de notre histoire, donc je n'ai jamais reçu ce coup de fil... J'en ai reçu des coups de fil mais jamais celui tant espéré.
Tout à commencé le 2 janvier 2019, un doute, un test de grossesse, 2 jolis traits roses... Une surprise, un accident, un merveilleux accident... Maman de 2 petites filles, cette grossesse n'était pas prévue. Elle nous a chamboulé, à ça oui ! On a douté, on a eu peur, cette grossesse remettait en cause bien des projets ! Mais bientôt le doute et l'incertitude on fait place à la joie et au bonheur d'agrandir notre jolie famille. Peut-être que cette fois nous auront la chance d'avoir un héritier, comme on se plait à plaisanter !
Le rendez-vous est pris chez le gyneco, la grossesse est confirmée, on entend son tout petit coeur, un coeur de géant de 25mm !
Les nausées et la fatigue sont au rendez-vous, les journées sont longues, mais ayant déjà eu 2 enfants, je sais que c'est l'affaire de quelques semaines.
21 février, arrive le rendez-vous de l'écho T1. Nous y allons confiants en ayant qu'un espoir en tête, pouvoir connaitre le sexe de notre petit bébé.
L'écho commence tout se passe bien, jusqu'au moment ou surgit ce silence que vous connaissez toutes. La clarté nucale est bien trop épaisse, 3,6 mm, c'est trop. Combinée à mon âge, 37 ans, le docteur nous annonce un risque de trisomie élevé. C'est le choc, on oublie vite nos préoccupations concernant le sexe de notre enfant et on trouve la force de demander ce qu'on doit faire. On nous prescrit le tritest en nous annonçant que le risque combiée sera forcément mauvais, mais nous devons attendre ces résultats dans un premier temps pour pouvoir prétendre au DPNI.
On attend, les heures semblent être des jours, les jours des mois.
Le résultat tombe mauvais comme prévu : 1/10. Mon gynéco me dit qu'à ce niveau c'est forcément pathologique, qu'il nous a pris un rendez-vous avec un spécialiste à l'hôpital, que nous devons y aller dans la journée.
J'appelle mon mari, on part en trombe du travail. Bizarrement ce résultat ne résonne pas en moi. Je ne vois que les 9 chances sur 10 que tout aille bien.
Nous arrivons à l'hôpital et le spécialiste nous parle d'amniocentèse, de biopsie du trophoblaste, de fausses couches... L'amniocentèse il faudra encore attendre quelques semaines, la biopsie est plus rapide mais plus douloureuse et plus risquée..Impossible de choisir, je ne vois pas l'urgence puisque mon bébé va bien.
Il nous propose une nouvelle écho pour voir comment va notre bébé. On rentre en salle et il commence son examen dans un silence de plomb que nous commençons à savoir interpréter.... Je le vois il s'attarde sur son petit coeur, du rouge et du bleu apparaissent à l'écran encore et encore...
Nous retournons dans son bureau il nous dit qu'il suspecte un CAV : canal atrio ventriculaire, cardiopathie liée à la trisomie dans 50% des cas.
On ne parle plus d'attendre, il faut faire une biopsie du trophoblaste dès le lendemain pour avoir les premiers résultats au plus vite.
Nous retournons donc à l'hôpital dès le lendemain matin et pour moi cet examen ne se passe pas bien : le docteur a du mal à prélever suffisamment de cellules, donc l'examen dure et dure et a chaque fois qu'il remue son aiguille dans mon ventre j'ai l'impression qu'il me poignarde.
Les premiers résultats tardent à arriver, je ne me déplace plus sans mon téléphone, trop peur de louper son appel. Je me dis que si les résultats tardent à arriver c'est parce qu'ils cherchent encore et qu'ils ne trouvent rien...
Une semaine après et plusieurs relances auprès de l'hôpital, les résultats confirment les suspicions du docteur : notre enfant est bien porteur de trisomie 21. C'est le choc... je n'y crois pas, ce diagnostic ne résonne pas en moi.
Seulement 16 cellules on pu être analysées, ce qui est trop peu, donc il faut attendre le résultats de la mise en culture d'ici 2 semaines pour pouvoir prendre une décision. Mais le diagnostic ne changera pas selon le docteur.
2 semaines d'attente, d'horreur, 2 semaines à parcourir tous les sites, les forums, à visionner tous les reportages concernant aussi bien l'IMG que la trisomie 21.
L'IMG me semble inconcevable, je commence à reprendre espoir et à me dire que malgré le handicap de la trisomie, je suis sure que nous pouvons apporter amour et bonheur à notre enfant.
Mon mari est plus réticent face à mes espoirs mais commence aussi à imaginer une autre issue que l'IMG... On en oublie même la cardiopathie...On commence même à s'imaginer être dans l'infime pourcentage d'erreurs entre le premier et deuxième diagnostic.
Mais les résultats définitifs tombent finalement : trisomie 21 libre et homogène. Nous n'avons plus le choix que de prendre une décision.
Retour à l'hôpital : nous informons le docteur que pour nous la trisomie 21 "seule" n'est pas une raison suffisante, que notre décision dépendra des éventuelles anomalies annexes.
Le docteur comprend notre choix et nous dit que nous devons donc pratiquer une nouvelle écho. Et nos derniers espoirs s"envolent, la cardiopathie est plus lourde que prévue : notre enfant ne pourra respirer seul qu'au prix de multiples opérations à coeur ouvert, avec toutes les complications que cela entrainera sur sa santé.
Je me sentais la force de lui offrir un avenir malgré son handicap, mais je ne me sens pas la force de voir mon bébé arraché à la naissance, branché à de multiples tuyaux, son petit corps et coeur maltraité dans les tous premiers jours de sa vie. Pas le force d'avoir peur de le perdre à chaque rhume, chaque poussée de fièvre...
Nous prenons donc la décision impensable jusqu'à présent et signons donc la demande d'IMG. Nous sommes vendredi 22 mars 2019, un an jour pour jour que mon père nous a quitté. C'est donc ça la fatalité.
L'IMG est programmée le lundi 25 mars 2019. Je suis hospitalisée le dimanche soir. Le lundi je descends à 8h30 en salle d'accouchement, cette salle avec le fameux carré orange sur la porte...
On me pose la péridurale, je fais un malaise. Je m'allonge enfin et sens mes jambes et mon bassin s'engourdir. Je déteste cette sensation. Je n'ai pas eu de péridurale pour ms 2 précédentes grossesses car mes filles sont arrivées très vite. On me prédit un accouchement rapide mais les heures passent, passent... Une nouvelle pensée folle m'envahit : s'il ne veut pas sortir c'est parce qu'il est bien au creux de mon ventre, qu'il est bien parce qu'il va bien...
A 23H07, après plus de 11h d'attente, a 17SA +4 jours, sans douleur physique, comme s'il ne voulait pas que je souffre davantage, mon tout petit, mon fils, mon innocent, mon Milo sort de mon corps. Je le sens une dernière fois au creux de moi et on me l'arrache pour toujours. Sans un bruit la sage femme sort de la salle. Cette fois je réalise pour de bon qu'il est partit, que je l'ai perdu pour toujours... Je m'éffondre d'autant plus que la sage femme doit pratiquée une révision utérine car le placenta ne se décolle pas. Je sens sa main au fond de moi qui m'arrache les tous derniers fragments de mon fils. Je n'ai pas mal physiquement mais moralement c'est trop dur.
Mon mari, sortit pendant la révision, rentre à nouveau dans la salle et nous pleurons ensemble mais chacun de notre côté, en réalisant que cette fois c'est fini, que notre tout petit amour Milo est parti rejoindre les étoiles.
S'en suivent 2 jours d'hospitalisation douloureux ou je fais malaises sur malaises. Mon corps me rappelle que je viens de vivre l'inimaginable.
Je suis rentrée chez moi le mercredi 27 mars, vide, sans mon fils dans les bras avec pour seuls souvenirs son petit bracelet et ses toutes petites empreintes si belles.
Je t'aime mon enfant, mon innocent, mon étoile.
"J'arrive sur les berges d'une rivière
Une voix m'appelle puis se perd
C'est ta voix
À l'autre bout du monde
Ta voix qui me dit mon trésor
Tout ce temps, je n'étais pas mort
Je vivais
À l'autre bout du monde"
L'autre bout du Monde, Emily Loizeau