IMG jeudi

[-Marie-]

Salut Naig,

Je pense bien à toi. J'espère tout s'est passé au mieux et que tu tiens le coup.
Courage,
Marie

[Naby]

Force et courage pour les prochains jours.
J'espère que tout s'est passé au mieux à la mat.
Douces pensées à vous deux et à votre petit ange.

[NAIG31]

Bonjour à toutes,

me voilà rentrée depuis hier soir, durant ce court séjour j'ai lu vos messages à toutes avec plaisir et émotions. C'est curieux, je ne vous connais même pas mais savoir que vous pensiez toutes à moi m'a fait beaucoup de bien comme si vous étiez mes amies.

Cette malheureuse expérience vous ouvre également les yeux sur certaines personne de votre entourage proche:
-certaine personne sur qui vous comptiez ne sont pas forcément à la hauteur alors que d'autre vous surprenne par leur sollicitude et leur présence.
Les cartes sont redistribuées...

Dans tout les cas je voulais vous remercier ce jeudi fut très douloureux et je vais encore une fois me replonger dans cette journée pour vous la faire partager et en quelques sorte l'exorciser..

[Marceline44]

Bonjour Naig,

J'ai pu lire ton histoire qui m'a beaucoup touchée mais je je ne pouvais répondre c'était beaucoup trop douloureux. Repose toi bien surtout et laisse toi du temps.

meme si j'ai horriblement mal, je me dis que nous avons toutes étaient très courageuses et que c'était la plus belle preuve d'amour qu'on a faite pour eux.

Pensées à nos anges et que ces pensées nous rendent de plus en plus fortes.

Je pense bien à vous toutes et tous meme si je ne vous ai jamais rencontrés, tous vos messages me réconfortent tant.

[NAIG31]

MERCREDI 3 JANVIER

Nous sommes en route pour la maternité. Tout autour de moi me parait sans importance : ma fille a pleuré en partant chez mes beaux parents. Dans la voiture mon conjoint essaie de blaguer ça ne me fait pas rire ça m'agace même un peu ... je lui demande de but en blanc :
"- as tu réfléchis à un prénom ? "
il me répond :
"- Je pensais qu'on avait dit Manon si c'était une fille "
"-Oui, j'avais dit Manon mais je voulais savoir si tu était d'accord.
"-Pour moi c'est Manon.
Alors ce sera Manon.

On nous installe en chambre, la 234. La semaine dernière j'étais dans la 235, je m'y sentais bien.
Celle là est beaucoup plus petite, la cuvette des toilettes est cassée, le bouton de la lumière sur la télécommande ne marche pas.
Je me dis ça commence bien.

La sage femme m'amène le cachet censé me détendre avant la pose des laminaires.
30 minutes après...

L'interne vient me voir :
elle est jeune, très jeune, trop jeune.
Elle parle bien, elle est sûr d'elle, elle a l'air de savoir ce qu'elle fait.
Son assurance, sa sagesse ne vont pas avec son visage et son corps enfantin mais sa maîtrise me rassure.
Elle m'amène avec elle pour me poser les laminaires. Je rentre dans la salle, il y a deux autres jeunes filles.
Grandes, fines aux cheveux longs elles sembles encore plus jeune et pas du tout à l'aise, leur regard est fuyant. L'une des deux sort de la pièce et je me retrouve avec 2 paires d'yeux entre mes jambes.
Ca prend du temps, l'interne me fait mal. Plus le temps défile, plus je me contracte plus j'ai mal.
"- Chez vous, c'est pas facile"
J'ai l'impression d'être comme un évier qu'on bricole, je m'en fou que ça ne soit pas facile je ne veux pas avoir mal.
Je pleure, je lis la panique dans les yeux de la jeune fille aux cheveux longs
J'ai envie de lui crier de me laisser tranquille, que je veux un vrai docteur. Je me contient.
Et enfin, c'est terminé.
Je me rhabille toujours en sanglotant, l'interne me demande pourquoi ces larmes, je ne répond rien j'ai peur d'être méchante et vulgaire.
En rentrant dans la chambre mon conjoint me demande si ça va.
Je me réfugie dans ses bras, je lui dit qu'elle m'a fait mal que je ne veux surtout pas avoir mal !! Que je croyais que les gens qui me prendrait en charge serait des personnes expérimentés comme mon Doc S.
Une étudiante sage femme entre dans la chambre, elle m'explique que l'analyse de mes plaquettes n'a pas été faite correctement la semaine dernière qu'il faut refaire une prise de sang.
Je me dis que je suis maudite.


Je prend le cachet pour dormir...

[Amanda]

Bonjour Naig,

Contente de savoir que tu es de retour et que les messages t'ont réconfortés durant ton séjour à l'hôpital.
Je te souhaite bonne chance dans le chemin du deuil et de la reconstruction...
Douces pensées à votre petite Manon.

[juju51]

Bonjour Naig,
Je suis "contente" de lire ton ressenti lors de la pose des "laminaires" comme tu dis, je disais bâtonnets de mon côté..bref, j'ai vécu cet atroce moment également avec une interne, et j'ai eu aussi l'impression d'être un objet ou animal, comme une vache en fait..je ne les ai pas trouvées délicates du tout, je me suis dit "ça y est c'est le début du cauchemard"..j'en suis rendue au strict minimum de ma dignité et humanité, féminité n'en parlons pas, dans ce moment..ne serait-ce que l'entrée du spéculum, avec aussi peu de douceur, je n'avais jamais vécu ça ! j'en étais réduite à bien peu de chose, j'ai eu presque honte d'être humaine, d'être une femme dans ce monde de brutes..je me suis dit que je devais vraiment être mauvaise, indigne d'être mère sans doute, pour avoir le droit à ce genre de considération, ou plutôt manque de considération et de respect pour mon corps..bref, heureusement que ceux et celles qui se sont occupés de moi le lendemain ont bien remonté le niveau côté humanité !
Merci Naig pour ton témoignage, j'espère que tu écriras la suite d'ici peu..
Bon courage à toi et encore merci pour les mots que tu écris, qui m'aident peu à peu à relire et retracer mon histoire, et me déculpabiliser un peu..aujourd'hui je me sens même coupable de souffrir après mon img car à priori pour l'entourage ça n'est pas compréhensible, une fois que c'est fait, il faut passer à autre chose ?!!
Hier soir, j'ai tenté de prendre mon courage à 2 mains pour aller à une soirée, me changer les idées, ne pas rester seule etc..arrivée là-bas, il y avait un bebe en bas âge, le choc ! j'ai demandé pourquoi on ne m'avait pas prévenue, j'aurai sans doute évité..on m'a répondu ça n'était pas prévu et puis on n'y a pas pensé, ok donc on ne m'épargnera rien ! excuse moi, peut-être suis-je un peu en colère, j'apprécie de trouver un peu de douceur ici..
Continue de partager ton vécu et ressenti, ça nous aide toutes c'est certain mais surtout pense à toi et te "retaper", c'est la 1ère chose.
A bientôt,
Julie

[NAIG31]

JEUDI 4 FEVRIER

7H00 du matin on amène mon petit déjeuner j'ai pas trop mal dormi mais j'ai pas mal de contractions pas très fortes mais présentes.
L 'aide soignante me dit de me préparer. Hier la sage femme m'a dit qu'on me descendrait tôt entre 8h00 et 8h30 .
Je me douche j'enfile la blouse et une culotte. On m'avait dit de pas en mettre mais c'est mon petit acte de résistance.
Il est 7h45.
J'attend devant télé matin.
A 8H30 du matin je commence à m'énerver. Je me dis que si dans 1/4 d'heure il n 'y a toujours personne j’appelle quelqu'un.
Mais je n'en fais rien.
8H50 j'entend rire dans le couloir, je passe la tête par la porte et je distingue les 3 jeunes internes d'hier et d'autre blouse blanches, je me lâche sur mon conjoint.
"-Les nanas c'est vraiment cons, ce n'est bon qu'à piailler et raconter des conneries"
il sourit :
"- tu dis ça parce que t'es énervée"
"- non je dis ça parce qu'on m' a dit qu'on me descendrait tôt qu'il est quasiment 9h00 que je n'ai vu personne que je suis morte de trouille et que j'ai l'impression que tout le monde s'en fou. "
"- Peut être que tout les blocs sont occupés"
"- je sais mais pourquoi l'une d'entre elle n'est pas foutue de me prévenir au lieu de bavasser dans les couloirs"
Il est 9h00, mon homme ouvre la porte et sort.

Je l'entend parler.
Il revient et me dit que la sage femme n'a pas de nouvelles.
Ca me désole.
9h05 L'aide soignant entre pour prendre ma tension, elle me demande si j'ai besoin de quelque chose. Je lui répond :
"- que ça aille vite !! "
Elle me dit je sais .
C'est la seule que j'ai me bien dans ce service. Cette femme est très petite voir naine et obèse. On dirait même qu'elle souffre d'un handicape du coté gauche elle ne se sert jamais de son bras. Elle a des yeux très beaux, bleus turquoises et son regard est plein de bonté. Cette femme est bienveillante.
Bizarrement, à 9h10 tout se bouscule la sage femme me dit que le brancardier vient me chercher.

9h15 Un monsieur frappe à la porte , il est jeune la trentaine d'origine maghrébine il prend soin de moi me couvre avec une couverture et me descend au bloc. Il 'explique à mon conjoint qu'on va venir le chercher en salle d'attente pour l'habiller.
Il me laisse au bloc, me souhaite bon courage.
Je reste assise sur une chaise dans le coin, j'ai le temps d'observer cette pièce où tout va se jouer :
Il y fait froid. Le matériel de haute technologie dénote au milieu de ses murs défraîchis. La table au milieu est recouverte d'un draps jaune d’hôpital, le même que celui de mon lit. Au fond de la pièce, il y a une étagère où tout est bien rangé, chaque chose est à sa place : je lis :
"- slips jetables" je souris.
Une jeune femme toute ronde rentre dans la pièce, on dirait un personnage de dessin animé ;
"- je ne savais pas que vous étiez là, je vous cherchais"
J'ai pensé "où veux tu que j'aille "
Elle est jeune aussi et sent un peu la transpiration.
Elle m'installe me dit que l’anesthésiste va venir me poser la péridurale et qu'en attendant elle va me mettre une perfusion. Je lui demande si c'est un Interne elle me dit que non que c'est l’anesthésiste en chef de la journée qui s'occupera de moi.

3 minutes plus tard, je suis branchée de partout:
Perfusion à gauche + pince à l'index. A droite j'ai le droit au brassard de tension qui se gonfle et se dégonfle toute les 3 minutes.
On pousse la porte et l'anesthésiste rentre.
Bordel, je m'attendais à un vieux moustachus, je me retrouve en face d'une femme très jolie, grande fine avec un air un peu pincé. Elle doit avoir à peine 30 ans et pourrait posé dans des magasines.
Elle me demande de m'asseoir au bord de la table. Avec tout mes fils qui pendent je m’emmêle et ça prend bien 30 secondes, elle s'agace un peu, moi aussi.
Silence. elle pose ses main sur mes hanches : vous avez une scoliose?
"-Oui. "
"-La première fois, il n'y avait pas eu de soucis pour la pose de la péri"
"-Non "
"-Bon allez c'est parti.
Je suis fébrile, assise en tailleur. La petite bonne femme de dessin animée me tient la main. Je ferme les yeux, je souffle doucement c'est le geste qui me fait le plus peur et j'y suis j'essaie d'être le plus zen possible pour que mon mannequin anesthésiste le réussisse au mieux.
J'ai mal, je pleure un peu.
"-J'ai du sang, le cathéter a pris un vaisseau sanguin je recommence "
Cette phrase me fait pleurer à grosses larmes je dis :
"-nonnnnn"
Elle repart "fouiner" dans mon dos, j'ai mal je le dis. Ca dure beaucoup trop de temps à mon goût.
Enfin, mon top model dit que c'est fini qu'elle va injecter un produit et que si je sens quoique soit ; vertiges, nausées, bourdonnement des oreilles je dois le lui dire.
Je ne sens rien de tout ça, ça fait juste chaud dans mes reins.
C'est parti, je vais endormir mon corps du bout de mes pieds jusqu'au haut de mon nombril.

[NAIG31]

Mon conjoint rentre dans la pièce habillé d'une blouse verte et de chaussons. Il m'embrasse, me demande si ça va je lui raconte un peu pas trop non plus.
Je lui dit que mon anesthésiste est jolie. Il rigole et dit
"-C'est pas ce qu'on lui demande."
Je souris.

J'ai décidé d'appuyer sur la pompe toutes les 30 minutes, je ne veux surtout pas laisser d'intervalles.
L’anesthésiste revient me voir pour tester la péridurale, elle me parle gentiment de ma scoliose et de la sienne aussi. On compare nos expériences, je vais mieux.

Mon doc S franchie la porte je suis contente. Elle me dit que d'ici peu, la péri faisant son effet, on va venir me faire une écho de contrôle pour vérifier l'activité du bébé et que si besoin c'est elle qui viendra faire "le geste". Elle dit "le geste", je sais que c'est ce qui arrêtera le coeur de mon bébé.
"-A tout à l'heure et bon courage."

Je commence à être un peu stone, mon homme rigole parce que je parle très lentement. Je ne sens plus rien, et je me sens bien je ferme les yeux de temps en temps.
Un autre docteur entre dans la pièce avec le matériel d'échographie.
Elle commence : je plaisante en disant que je ne sens pas le froid du gel pour une fois.
L 'échographie se passe, elle a tourné l'écran vers elle.
Elle s' arrête et dit
"- Je vais revérifier mais il semble que le coeur de votre bébé se soit arrêter tout seul.
Elle vérifie et confirme. Il n'y aura pas de geste.
Je suis soulagée, je dis à mon conjoint qu'elle m'a fait un beau cadeau qui m'évite une autre souffrance.

Et puis, je suis perturbée : je cherche quand. Je suis persuadée de l'avoir senti la veille. Je me dis que j'aurais du le percevoir.

Il est 12h30, la sage femme me pose les premiers comprimés qui doivent me déclencher les contractions.Elle me dit qu'elle va me sonder, je lui demande de m'expliquer parce que je comprend pas. Elle m'explique je constate:
"- et bien me voilà incontinente maintenant" Tout le monde rit.
Je fais maintenant une dose toutes les 20 minutes. J'ai demandé à mon héroïne de dessin animé si je pouvais rester "perchée", elle m'a assurée que non en rigolant alors j'en profite...
Je dis à mon conjoint d'aller se dégourdir les jambes, manger un truc. Il m'embrasse et part.

Ca bip, j’appelle la sage femme elle me dit que la pompe à péridurale annonce un code d'erreur qu'elle sait pas, qu'elle va voir l’anesthésiste. Je vois le petit nuage gris du rien ne se passe comme prévu revenir au dessus de ma tête, je peste.
Finalement non, un grand roux avec des lunette rondes, doux mélange entre harry potter et ron weasley vient me changer la pompe avant le timing butoir des 20 minutes.
Mon conjoint revient.

J'alterne entre sommeil et veille.

14h30 mon personnage de dessin animé veut essayer de percer la poche des eaux pour faire avancer le travail. Je lui répond qu'elle peut bien faire ce qu'elle veut, je ne sens rien du tout. Elle perce je sens à peine le liquide couler sous mes fesses.

Je n'ouvre les yeux que pour vérifier l'heure et appuyer sur ma dose. De temps en temps on vient voir si je vais bien. Et je vais bien, je fais mon boulot de droguée à la perfection. Cette pompe est devenue ma meilleure amie.

16h30 ça fait 4h00 que les premiers cachets ont été posés, il faut en remettre deux autres.
La sage femme m'examine, elle me dit que ça avance, que le bébé est bien descendu. Qu 'avec les cachets les contractions vont se faire plus intenses, que ça fera bien avancé le travail.
16H35 elle sort et je sens une contraction arrivée.
Je dis à mon conjoint :
"- ah oui effectivement quand elle dit plus intense, je sens bien que...
Je n'ai pas le temps de finir ma phrase. Dans un bruit, dans une douleur je sens quelques choses sortir de moi d'un coup.
Allongée de tout mon long, pouvant à peine relevée les jambes je sens quelques choses de visqueux. Ca ne dure qu'une seconde.
J'hurle à mon conjoint de prévenir quelqu'un, il a l'air terrorisé.
Je crie "au secours", je tiens les draps du bout des doigts en hauteur pour ne rien voir du tout.
Sur le coup je ne comprend rien, je suis juste terrorisée, choquée.

En 2 minutes, 15 personnes ont du rentrer dans la pièce.
J'avoue que je ne souviens pas trop de ce qui s'est passé. Je me revois juste demander 10 fois, 15 fois,
"- qu'est ce qui se passe je comprend pas.

Pour finir, mon dessin animé est venue me dire que c'était mon bébé que j'avais eu entre les jambes. Mon col avait lâché d'un coup sous l'effet de la contraction plus puissante. je pleurais beaucoup.
Mon bébé. La situation était pour moi surréaliste.
Je ne l'ai ai pas même pas vu l'emmener.

Les soins faits, nous avons attendue deux heures sous surveillance. Mon dessin animé est partie sur un autre accouchement, l'autre sage femme a pris le relais. Elle nous a dit qu'elle s'était occupé de Manon.
Je lui ai demandé de me la décrire : elle fait 715g pour 31 cm. Elle m'a dit qu'elle avait la peau un peu maturé du fait d 'être restée sans vie dans le liquide amniotique. J'ai demandé si elle était quand même visible. Elle m'a dit oui et que ça serait bien pour nous de la voir. J'ai dit pas maintenant, peut être demain mais ce soir là je ne peux pas.
J'étais trop choquée.

Tout avait été brutale. La terrible annonce et l'accouchement.
Je n'étais pas préparée à ça mais qui peut être prête à ça...

[Amanda]

...