première grossesse et IMG

[Knackebrod]

Salut Anne,

Je t'envoie plein de bonnes ondes. Je vois très bien par quoi tu passes...

Je crois que la peine que je ressents existera toujours, même si elle sera probablement de moins en moins envahissante.

Je crois que l'absence de ce premier enfant existera toujours, quelque soit ma vie à venir.

Sentiment tout à fait partagé...

Et même si j'arrive à être joyeuse, et même si la plupart du temps, je le suis vraiment, ce n'est pas forcé, cela me ronge petit à petit : mon fils a disparu, il ne sera jamais là, et je n'attend aucun autre enfant. (...) La vie a elle décidé que je n'avais pas encore bien compris sa leçon?

Are you talking for me ?

Ce midi, une femme est venue en salle de déjeuner au boulot (cuisine partagée), tout le monde l'a regardée, elle a commencé à dire "mais ouiiiii, je mange double, hihihhi, j'attends deux garçons, j'en suis à 5 mois. Oui je sais, ça se voit paaaas "... j'ai ressenti un frisson glacé me parcourir tout le corps et je suis sortie de la cuisine. 5 mois, après la 2de écho où t''entends 'garçon'... juste la situation à laquelle j'ai du renoncer il y a 2 ans en fait ...

"Ah non, pas sous mon nez ! fuyons" ... voilà ce que chacune des cellules de mon corps a ressenti et exprimé en silence.
heureusement que j'avais fini de manger, ça m'aurait coupé l'appétit tout net.

Cela a beau faire 2 ans, je pense progresser et j'ai régulièrement l'impression de faire des pas en arrière... comme quoi.
Ce n'est pas rationnel. Bon après, d'autres ont avancé beaucoup plus vite (je voudrais pas être déprimante!!).

Pour moi, c'est très dur aussi. Il me manquera toujours un bout de moi. Mais je l'accepte de plus en plus, malgré la peine.

Après, j'ai rencontré récemment des personnes qui ont aussi perdu quelqu'un.
Parler de la personne aimée avec des gens à l'écoute est plus que bénéfique... c'est vital, en fait. Cela permet de se sentir exister, cela ressource énormément. C'est humain après tout, d'apprécier se sentir compris·e et de ne pas ressentir qu'on représente un malaise (sujet tabou) auprès de ses proches.

Well, well, well, bah je vais me détendre un peu, parce que la période de Noël, c'est plutôt touchy !!

Plein de bises à toutes

[Anne2017]

Hello Flo,

Je vois ce que tu veux dire au sujet du tabou....j'aimerais être déjà capable de parler de cela avec douceur et tendresse. Mais c'est encore tellement sensible,ma gorge se noue. Pour l'instant j'ai très peu raconté oralement, très peu du expliquer à quelqu'un qui n'était pas au courant, et je n'ai réussi à parler, finalement, qu'à des personnes déjà prévenues .

Mais souvent j'aimerais pouvoir en parler. J'en ai très envie. Le silence autour de cet événement si important pour moi est usant...

J'ai l'impression d'avoir vraiment fait le job, vraiment travaillé sur moi, d'avoir beaucoup réfléchi et identifié ce qui me peinait, l'impression d'avoir mis des mots parfois sur des ressentis que j'avais juste envie de taire, d'avoir cheminé longtemps. Et même si je sais que l'on progresse toute sa vie, que rien n'est jamais fini et surtout par un deuil, je suis bien obligée de m'avouer qu'inconsciemment j'ai attendu une "récompense". Et là je suis dépitée car elle ne vient pas "j'ai bien fait mon deuil, je peux avoir un autre bébé maintenant ?"
C'est monstrueux mais je réalise qu'une partie inconsciente de moi se disait que je ne pouvais pas me contenter d'aller mieux, doucement, tranquillement. Qu'il fallait que je laisse sortir toute la peine, pour éviter qu'elle ne s'incruste en moi à jamais. Et qu'à cette condition je serais probablement récompensée d'un enfant. Idiote, idiote, idiote !

Je compatie sincèrement, pour cette femme à la cantine. Deux femmes rentrent de congé maternité dans mon service, après avoir toutes deux mis au monde des fils magnifiques, à peu près au moment où le mien aurait dû naître. Tout le monde leur parle du bébé, des premiers jours en garde, de l'allaitement, des premiers moment... Elles sont plus heureuse que moi, pour l'une d'entre elle c'est déjà son second, bref elles sont plus mère que moi, je n'arrive pas à les voir autrement que des reflets plus accomplis que moi. Affligeant. Car je ne connais pas leur histoire, leur parcours, je ne sais pas quelles épreuves elles ont du éventuellement affronter. Ce n'est pas parce qu'elles sont belles, minces, souriantes, qu'elles ont l'air épanouies que leur vie est rose. Mais je n'arrive pas à faire raisonnablement la part des choses, quand elles parlent de leur fils, je suis toujours ramenée au mien. Jalousie primaire, colère... Peut être(probablement) que je n'a pas si bien fait le job finalement.

Allez ce soir je suis amère. Demain sera peut-être différents.

[Knackebrod]

Le silence autour de cet événement si important pour moi est usant...

Usant. Je dirais troublant, déstabilisant. L'indifférence blesse tellement.

ça a pris du temps, mais de mon côté, j'ai compris et identifié que cet aspect du deuil périnatal m’empêchait énormément d'avancer autant que je voudrais... et pourrais !

En même temps, j'ai aussi accepté de (beaucoup) réduire mes attentes en terme de compréhension et d'écoute de mes proches... et mine de rien, c'est quelque chose ! je sais que ça met mal à l'aise 95% de mon entourage. Alors même si cela me déçoit et m'isole, j'essaie de ne pas leur en vouloir et de ne pas y penser...
Du coup j'ai vraiment l'impression de ne pas être rassasié d'avoir parlé de mon fils, ... j'essaie de vivre avec. De parler de lui ici, avec des mamanges ou avec des amies très proches.

L'aspect "récompense", oui, je situe bien l'idée. Moi non plus, je n'ai pas (encore) eu pas de récompense à mes efforts et à ma progression (et le père est parti..., > ce sera une double peine pour madame). J'ai retrouvé quelqu'un, quelques mois après la séparation pourtant... (ma vie est un film à rebondissements). "La roue tourne", on me dit (moi qui adore les expressions toutes faites

Il n'y a rien de "monstrueux" à penser ce que tu penses. Quelque part c'est ton instinct de survie qui se traduit là, couplé à un reste de colère...
"J'ai encaissé, je prend sur moi, je décortique la situation. J'essaie d'avancer. Je vais passer une étape qui va se traduire par quelque chose de concret. Allo, il se passe rien ?"

Tu as déjà fait beaucoup de chemin, Anne, sois fière de toi.

Cette année, je vais budgéter plusieurs dons pour une assoc' qui agit en appui aux personnes traversant un deuil périnatal (PE ) et des assos qui réalisent des rêves pour les enfants gravement malades. Je crois que cela me fera un bien fou de pouvoir faire ce geste, même si je n'ai pas les finances pour. J'ai très envie de le faire.

Sur cette idée, je vous souhaite à tou·t·e·s une bonne soirée et un bon we !

Flo

[Anne2017]

Flo,

Je maintien usant en ce qui me concerne : je me sens fatiguée, abîmée, de vivre une vie ou il n'y a pas de moment où je parle de cette grossesse trop vite achevée. Le pire est que cela vient de moi, et c'est auto-entretenu. Si je n'en parle pas, pour ceux qui savent, c'est sans doute car je n'y pense plus.
Mais difficile d'en parler sans finir par pleurer et difficile de pleurer ailleurs que seule, dans mon coin. Et une partie de moi pense intimement que chacun porte ses peines, que je n'ai pas à faire supporter les miennes sur autrui.

Mais je crois que tu as raison. Il faut en parler, trouvera force de le faire, quitte à laisser couler quelques larmes. Car je refuse de porter en moi ce noeud silencieux et douloureux pour l'éternité.

Je m'étais dis que, peut-être, l'occasion se présenterait avec une nouvelle grossesse. "ah tu es enceinte, c'est ton premier enfant?" et "oh c'est magique la première fois". Ou encore "pourquoi une échos tous les mois?" cela aurait été de bonnes occasions et je me disais que le fait d'être à nouveau enceinte rendrait ça moins triste.

Car je ne veux pas de la pitié des autres, qui n'est pas toujours bienveillante. Je ne veux pas voir dans le regard d'autrui que je suis cette femme qui a perdu son enfant et qui n'arrive pas à en avoir un autre. Je ne suis pas cette personne, ou pas uniquement.

Je suis désolée d'entendre que ton couple n'a pas survécu à cette épreuve. Mon mari a été très fort, pour moi, durant cette période difficile où par ailleurs l'un de nos proche était très malade. L'annee 2017 a vraiment été difficile. Aujourd'hui nous n'en parlons plus, et ça aussi me rend triste. Mais pour dire quoi? Il sait, je le vois parfois qui m'observe comme pour s'assurer que tout va bien.

Êtes vous en essai avec ton nouveau compagnon? Je te souhaite beaucoup de joies quelque soit ton nouveau chemin. La roue tourne c'est vrai, ma grand-mère disait "demain est un autre jour", ce qui voulait dire que l'on ne sait jamais comment seront nos perspectives le lendemain, et quelles portes s'ouvriront (ou se fermeront). Alors voyons ce que la marée nous apportera demain.

Bon week-end à toutes les mamans d'un petit ange. Et une pensée pour tous ces petits qui nous ont bouleversé.

[Anne2017]

Mon bébé, mon petit,

Le 24 décembre, j'ai fait un test de grossesse et il était positif. Je suis enceinte, je porte la vie à nouveau. Je ne sais pas si ce cadeau vient de toi, si cela s'est produit car tel était le moment, si c'était un hasard, le destin.

Tout ce que je sais, c'est que je ne ressens rien. Ce n'est pas comme avec toi, mon chéri, ou j'avais éprouvé tellement de joie, tellement d'amour... Je sais, rationnellement, que mon esprit, mon cerveau se protège. Je comprends les mécanismes psychiques qui sous-tendent cette absence d'émotions. Mais c'est quand même triste, cela me rend un peu triste. Rationnellement je me répète "tu vas avoir un bébé" mais émotionnellement, cela ne trouve aucun écho, ni peurs, ni joies. Ton papa dit qu'il faut attendre l'echos, qu'il sera toujours temps de s'emballer après, que nous sommes désormais inquiets. Je l'accepte mais je suis déçue de moi. J'espère que cela changera.

Mon petit garçon, je n'arrive pour l'instant pas à faire de projets avec ce bébé, ce nouvel enfant. Pense à moi, et envois moi un peu d'innocence et de foi en l'avenir.

Je t'aime pour l'éternité.

[louloumio]

Je suis contente pour toi Anne et de tout coeur je te souhaite un bébé qui naîtra à terme et en parfaite santé

[Anne2017]

Merci beaucoup louloumio

[Sandrinebeaumont]

Anne, je viens de lire que tu as fait un test de grossesse positif, c’est merveilleux. Et tellement normal que tu sois complètement sur la réserve. Je n’arrête pas de me dire que si un jour je me retrouve enceinte à nouveau, après toutes les histoires que j’ai pu lire ici ou ailleurs, j’ai bien peur de ne pouvoir être heureuse et rassurée qu’au moment où je tiendrai mon enfant dans mes bras et pas avant. Mais j’espère secrètement que je me trompe, et que le corps et l’esprit étant bien faits, la confiance revienda petit à petit et assez tôt dans la grossesse pour accompagner ce nouveau petit bout de chou.
C’est ce que je te souhaite également Anne. Tu es très courageuse. Mes douces pensées t’accompagnent.
Sandrine

[Anne2017]

Un grand merci Sandrine. On verra avec le temps, même si je culpabilise un peu. Après tout ce bébé mérite mieux que ça, j'espère pouvoir me rattraper bientôt...

[Anais]

Anne je suis très heureuse pour toi et tu me donnes une lueur d'espoir !
J'ai eu mon IMG peu après la tienne. J'ai fait une FC précoce en octobre (5SA) et là j'attends, j'attends, j'attends... on connaît toutes la chanson...
Et de savoir que tu es enceinte, je me dis que moi aussi ça va venir ! C'est idiot mais j'y crois

Belle journée à toi Anne