Cette semaine, rdv avec la généticienne… Le service de la PMA est une première pour moi. Sa salle d’attente remplie de couples proches de la 40aine me rappelle combien je suis proche de la date de péremption. Un monsieur sort en lançant « bonne chance » pendant que je lis les affiches sur « comment booster votre fertilité » et me demande où se trouve la corde pour se pendre.
… « Comment allez-vous ? » J’affiche mon sourire de façade le plus commercial possible, le même qu’au boulot, et retiens mes larmes. Je ne vais pas pouvoir parler. Devant le tableau, elle se sent obligée de me consoler : « C’est une chance de l’avoir détecté tôt / Vous avez déjà un enfant en bonne santé». Bien. Et sinon, tu peux faire quoi pour moi ?
Commence alors l’arbre généalogique où j’expose mes fausses couches. Avec mon mari, c’est plus drôle parce qu’il y a de quoi écrire un bouquin. Je crois qu’il l’a achevée quand il lui a montré ses cicatrices (n’aime pas les grands discours mon mec, préfère les résumés : « t’en veux du sensationnel ? Tiens matte un peu et fous-moi la paix ! »).
Prise de sang en urgence pour caryotype, ce qu’aurait dû faire mon homme il y a 4 ans déjà (mais l’insouciance l’avait emporté), je lui en veux à ce moment. J’y vais sans en comprendre l’utilité. Apprendre qu’on a tel pourcentage de risque de malformation ne m’apportera rien. On ne pourra rien faire pour nous à part ça.
Plus les mois passent, moins j’envisage une autre grossesse, surtout si elle doit se vivre avec une épée de Damoclès. Pourtant j’ai un pincement quand je sens mes règles arriver ce mois-ci. Il y avait une petite chance.
« Surtout si vous êtes enceinte, vous m’appelez tout de suite hein ! » me dit la généticienne en sortant du cabinet (pour me féliciter j’imagine

). J’ai envie de répondre que si je suis enceinte, j’irai me cacher dans les bois pour oublier tout ça et faire comme si de rien n’était jusqu’à l’accouchement sans péridurale dans l’eau. Je prends quand même son numéro.
A la caisse de l’hôpital, j’entends : « Prise en charge pour la PMA ? Mais vous êtes encore enceinte là ? Ah non ? IMG ? Oh vous inquiétez pas, vous en aurez un autre ! ». Parfait, c’est le grand final.
Puis je retourne aux urgences maternité pour donner une lettre à la sage-femme qui m’a accouchée. J’ai besoin de lui dire combien elle a été précieuse pour moi. Elle est là. Je n’arrive pas à articuler un mot sans pleurer (sensibilité de malheur !). Je lui laisse l’enveloppe. Elle me fait une bise et on part.
Une autre page se tourne j’ai l’impression. Je pars à la mer 6 semaines avec mon fils (mon mari nous rejoindra qq temps). Envie d’aller loin de tout ça, de faire le vide. J’ai besoin de réfléchir et de prendre une décision définitive pour ou contre une autre grossesse.
J’ai besoin de passer à autre chose pour me reprendre en main, devenir végétarienne, faire du sport, déménager, faire des choses pour moi !! 2 ans à espérer, ça suffit peut être. Je deviens obèse, aigrie, triste… Il faut savoir profiter de ce que la vie nous donne.
Je n’ai plus personne à qui parler de tout ça sans avoir l’impression de gêner ou d’ennuyer. J’ai décidé d’ignorer le sujet. Je répondrai simplement à ceux qui poseront la question que « j’ai déjà un 2è enfant mais qu’il est au ciel ». Ça me fera bien plaisir de voir leur tête.
Je sais que malgré tout j'aurais encore besoin de venir ici alors un grand merci de m’avoir lue jusque-là, cela me fait déjà du bien de savoir qu’il y a quelqu’un qui prend le temps pour ça.