Les enfants des autres

[Artémis]

Bonsoir à tous, à toutes,

Notre petit bébé, Axelle, est née sans vie le 17 juin 2021. Elle était atteinte d’une forme d’achondroplasie sévère. C’est grâce à elle que je suis devenue maman pour la première fois, ou plutôt mamange.
Mon conjoint, a deux enfants d’une précédente union. Ils ont 6 et 8 ans.

Je créé ce sujet pour espérer y trouver des clés, des conseils. Je ne sais pas vraiment en fait. Nous avons ses enfants deux jours par semaine, et la moitié des vacances scolaires. Je m’entends très bien avec eux, nous avons su créé tous ensemble une Harmonie au sein de notre famille recomposée. Bien que je n’avais, auparavant, jamais vécu avec des enfants. Depuis la naissance de notre Axelle, nous ne les avons pas eu. Aujourd’hui, ils sont à la maison depuis dimanche et ce, pendant tout le mois d’août. Et voilà, je ne gère pas.
J’ai honte d’écrire ça, mais je ne les supporte plus, le moindre rire, la moindre question, et même leur simple présence me fait les détester. Les détester d’être là et pas mon bébé. Je sais pourtant très bien qu’ils n’y sont pour rien.
Ils avaient chacun donné un de leur doudou à leur petite sœur, avant tout ça, avant que nous apprenions qu’elle était malade. Lundi, mon conjoint leur a rendu. L’un des deux enfants a simplement répondu « ben c’est pas grave, ça sera pour le prochain bébé » comme si Axelle n’avait pas existé, n’avait pas compté, comme une « chose » qu’on jette et qu’on remplace. Vous allez me dire que c’est « normal », que ce sont des paroles d’un petit garçon plein d’insouciance et qui ne se rend pas compte de ce qu’il dit. Mais je ne l’accepte pas, ça ne m’aide pas, bien que je sais bien que c’est pourtant comme ça qu’il faut voir les choses.

Je n’ose parler de cette façon à mon conjoint, parce qu’il me dirait tout naturellement qu’il les emmènera cette semaine chez ses parents pour que je n’ai pas à les « supporter » mais je ne veux pas le priver de ses enfants et en plus de cela, il va me falloir vivre avec ma douleur, et réapprendre à vivre avec eux. Je leur en veux tellement de paraître toujours heureux après la mort de leur petite sœur.

Certain.es sont ils dans une situation similaire ou s’y approchant ? Comment faire? Est ce que ça passe?

Pardon pour ceux que je risque de choquer, à la lecture de ce message mais malheureusement c’est ma réalité aujourd’hui. Ma réalité en plus de cette douleur lancinante qui ne me quitte pas.

J’ai une pensée pour toutes nos étoiles.

Artemis.

[Slevan]

Bonsoir Artémis ,

Je suis désolée pour la perte de ta petite fille. Mon message ne va pas trop t'aider à gérer la situation concernant ta relation.avec les enfants de ton conjoint car je ne suis pas du tout dans une situation similaire. Mais je voulais juste t'apporter un message de soutien et surtout te faire déculpabiliser par rapport à tes ressentis. Ton message ne.me choque pas du tout. Au contraire, j'imagine ce que ça doit être de s'occuper d'enfants qui ne sont pas les tiens dans une période qui reste très proche de la perte de ton bébé. Bien sûr, la réaction des enfants est "normale" de parler déjà d'un prochain bébé mais ce n'est pas pour ça que ce n'est pas blessant. Cette impression que les proches "oublient" avec le temps, voire ont hâte que tu passes à autre chose, les mots maladroits, la difficulté de voir les gens si heureux alors que tu souffres tous les jours, je pense que nous sommes beaucoup ici à l'avoir ressenti et personne ne te jugera pour ça au contraire.
Je te souhaite d'avoir ici les conseils dont tu auras besoin pour aborder les semaines à venir plus sereinement. Bon courage à toi,
Une douce pensée pour Axelle

Slevan

[Midoumaga39]

Coucou Artemis,
J'ai lu ton message. Et sache pour commencer que tes propos ne me choquent pas du tout.
Ensuite, je ne sais pas ce que c'est parce que je ne suis pas du tout dans la même situation mais j'imagine à quel point cela doit être dur pour toi de ressentir ces émotions vis à vis de tes beaux enfants. C'est tellement courageux de les formuler et de nous les partager aussi !
Tout ce que je peux te dire, c'est que j'ai moi même 2 enfants bien là. Mon fils est trop jeune pour comprendre ce qui se passe, il n'a que 20 mois. Mais ma fille de 4 ans et demi, elle, vit la perte de sa petite sœur comme nous celle de notre fille.
Au début, elle me disait des choses comme tu as entendu. "On aura un autre bébé maman" . Elle me disait même "tu as toujours un gros bidou, le bébé est là" ou alors elle me proposait des prénoms pour sa sœur quand elle serait là. Elle m'en parlait très souvent mais au présent et au futur. Son comportement changeait aussi. Elle était très dure avec nous, faisait des crises, etc.
Et puis récemment, elle a enfin osé me dire qu'elle était triste que sa petite sœur soit morte, qu'elle ne voulait pas que les docteurs la prennent, qu'elle voulait la voir. Elle m'a demandé si les adultes pleuraient en pensant à elle, si elle manquait à d'autres gens que nous.
Et ça a débloqué beaucoup de choses. Elle me dit maintenant chaque soir que sa petite sœur lui manque.
En fait, je crois qu'elle a mis du temps non seulement à comprendre mais surtout à oser me dire qu'elle était triste. Je crois que c'était sa manière de me rassurer, de me protéger.
Dans ta situation, peut-être devriez vous en parler avec les enfants de ton conjoint, ou leur demander s'ils ont besoin d'en parler et ce qu'ils ressentent. Peut-être qu'ils n'ont pas vraiment réalisé parce qu'ils n'ont pas vécu tout ça. Mes enfants nous ont vues pleurer souvent ces derniers mois. Ça n'avait jamais été le cas avant. Ils savent à quel point c'est difficile pour nous. Et j'ai aussi beaucoup dit à mes enfants qu'ils avaient le droit de dire tout ce qu'ils avaient sur le cœur.
Ceux de ton conjoint n'osent peut être pas vous dire les choses ou ne se rendent pas compte ou cherchent maladroitement à vous rassurer. Peut-être que c'était leur manière de dire qu'ils aimeraient pouvoir en parler avec vous ?
J'espère que la situation n'est pas trop dure pour toi surtout... Prend soin de toi.
Amandine

[Meghan]

Bonjour Artémis,
Si c'est ce qu'on appelle de l'égoïsme, nous sommes deux égoïstes.
J'ai perdu mon bébé après 3 semaines de vie le 27 juillet. Et me voilà dans ta situation... Les enfants de mon compagnon (8 et 5ans) reviennent à la maison demain. Avant ça, ils étaient chez leurs grands-parents.
Demain, la claque de la réalité m'arrive en plein visage. Il y a ses enfants, qui reviennent et dont j'appréhende l'attitude vis-à-vis de mon bébé dont on va ignorer l'existence, et les grands-parents (mes beaux-parents) qui viennent continuer les travaux chez nous. Je sais que ses enfants sont braves et gentils et je sais que ses parents viennent pour nous aider, mais j'aurais tellement voulu faire une pause pour pouvoir m'effondrer, longtemps, sans devoir faire semblant, sans devoir dire "ça va" quand on me pose cette question (débile) de si je tiens le coup ou non, j'aimerais ne pas en vouloir malgré moi à ces enfants en pleine santé qui vont me demander de jouer avec eux. Je n'ose pas en parler à mon compagnon et pourtant je sais la chance que j'ai de l'avoir lui, super compréhensif et doux, mais il fait déjà le dur et tient la face pour nous deux en général, je ne veux pas lui rajouter ça...
Mais je pense que je vais simplement craquer et avoir besoin de tout lui expliquer entre deux grosses larmes. J'irai voir un ou une psychologue sans aucun doute, pcq rien que d'en parler j'en ai déjà le ventre noué.
J'ai l'impression qu'on ne veut pas comprendre que oui, je suis en deuil. Bien sûr on a eu pitié de moi, jusqu'au lendemain de l'enterrement, peut-être un jour ou deux de plus, maintenant je dois impérativement reprendre le cours de ma vie, comme si de rien n'était, comme s'il ne méritait qu'une pensée de temps en temps.
Tu l'as compris, je n'ai pas de solution, je voulais juste que tu saches que tu n'es pas seule, et malheureusement, de nouveau de manière égoïste, ça me fait du bien de savoir que moi non plus

[michele81]

Bonjour Artemis,

Je suis navrée du décès de votre petite fille.
Nous, mamanges, savons à quel point c’est une épreuve pas comme les autres, donc il n y a jamais rien de choquant dans les émotions qui nous traversent durant ce long deuil.

J’ai deux beaux enfants mais bien plus grands, 15 et 17 ans.
Ils vivent en permanence avec leur père et moi. J’ai aussi j. Garçon de 10 ans de mon côté.
La recomposition familiale est particulièrement difficile dans un contexte de deuil. J’ai moi aussi le sentiment que tout le monde a tourné la page à la Maison et ça nourrit une forme d’isolement intérieur en moi, de colère par moments, comme lorsque la fête des 18 ans de ma belle fille se discutait avec son père alors que notre bébé était insinéré depuis à peine 1 mois, 2 maximum.
En même temps, je sais que je ne peux pas empêcher les autres de vivre normalement. Il est là le paradoxe. Donc je ne serai pas présente à cette fête en septembre, je l’ai déjà annoncé. Et je ne vais à aucune messe familiale par ailleurs car la seule où je suis allée en avril, tout le monde a fait comme si rien ne s’était passé.
On m’a demandé comment j’allais exactement comme on me le demandait avant. Je crois habituellement au dialogue mais je suis aussi intuitive et je sais quand c’est peine perdue.
En revanche discuter avec les enfants c’est différent. Ils ont souvent des choses surprenantes a exprimer, et ils peuvent écouter et comprendre, quel que soit leur âge.

Ça vaut la peine d’en faire un sujet, même si je reste persuadée que la douleur des parents demeure particulière. Néanmoins ça permet de ne pas en faire un sujet tabou ou que des malentendus s’installent.

Voilà mon expérience avec un peu plus de recul.

Moi aussi j’ai une relation plus distante avec mes beaux enfants depuis le décès de notre bébé. Oui comme si je leur en voulait d’exister et de combler leur père, ce que je n’ai pas fait, moi, puisque nous n’avons pas d’autres d’enfants ensemble. Pas simple.
Accroche toi.

Douces pensées à tous les petits qui veillent sur nous.

[Leslie S]

Bonjour Artemis,

Je suis navrée pour votre petite fille.
Je suis Mamange d'un petit garçon depuis le 25 Février.
Et belle-maman de deux petits garçons de 9 ans et 11 ans. Après la disparition de mon seul et unique enfant, mon monde s'est écroulé, ma complicité et l'amour que j'ai pour les deux petits garçons de mon mari se sont éteints. Je les évitais, les repoussais discrètement, j'avais beaucoup de mal à être dans la même pièce qu'eux. De les entendre rire, de me parler de leur petit frère d'un an du côté de leur maman me faisait bouillonner intérieurement. Mais je culpabilisais de réagir comme cela alors que ses enfants sont remplis d'amour et de tendresse pour moi. Ils sont tellement innocents a cet âge. J'avais l'impression d'être une mauvaise personne, j'en ai parlé qu'à certaines personnes très proche de moi, tellement j'éprouvais de la honte.Et puis on m'a parlé des différentes phases de deuil, je refusais la phase de la colère, je ne m'en suis pas rendu compte de suite. Et il y a une semaine les garçons de mon mari sont arrivés pour leur semaine avec nous (nous les avons en garde partagé, une semaine sur deux) mon comportement a totalement changé, j'étais heureuse de les retrouver, j'avais besoin d'eux et de leur amour pour moi. Mais c'était difficile pour eux car les enfants sont des éponges et ils ont ressenti mon éloignement. Mais je sais que ça va revenir comme "avant", c'est à moi de leur montrer qu'aujourd'hui je suis de nouveau là pour eux. Tout cela pour dire que c'était de la colère que j'avais envers les enfants de mon mari, ils étaient là, en bonne santé, rempli de joie et mon bébé n'était plus... la vie est ainsi, malheureusement nous ne pouvons pas tout contrôler. Mon mari m'a beaucoup aidé en passant plus de temps avec ses enfants ce qui me laissé du temps pour moi.
Ne baissez pas les bras, il faut du temps.
Tout pleins de courage, j'espère que mon expérience vous aidera à surmonter un peu mieux.