Quand tout bascule ..

[MariEve]

Oh oui, comme la journée d'hier semble dense...
Je comprends tes appréhensions quant au protocole autrichien.. as-tu besoin/la possibilité de discuter avec des mamanges d'Autriche à ce sujet ? Et puis oui, comme tu le constates, malgré toutes ces épreuves qui s'enchainent, tu (sur)vis à tout celà, les jours succèdent aux nuits, même si c'est empreint d'étonnement voire d'absurdité, c'est là. Il est possible que quelque chose meurt ou du moins se transforme en toi avec l'IMG, mais tu verras que même si seul le noir teinte ton horizon pour le moment, il y aura des lucioles, des éclaircies, de grands rayons de soleil, des moments et des jours meilleurs.

Tu m'as fait sourire en me disant que tu n'as pas la main verte, c'est exactement comme ça que je me décrivais vu le nombre de pots de fleurs vides qui decorent une étagère de mon garage. Et puis, n'ayant pas le choix cette annee, je me suis lancée avec beaucoup de peurs et un peu en me contraignant, j'ai lu, discuté, je fais maintenant plus a l'instinct... mais on mange de mes radis depuis des semaines, mes multiples plants ont bien donné pour beaucoup (j'en ai loupé d'autres aussi...) et sont dans le jardin maintenant. J'ai decouvert un univers passionnant où j'ose maintenant m'aventure, qui m'apaise, me redonne foi en la vie et peut etre aussi un peu en moi ^^

Votre idée d'evasion a 2 me semble idéale, n'hesitez pas y faire une place à Victoria et à vous creer des souvenirs à trois si l'envie vous vient, je retranscris ici un conseil de ma sage-femme qui me permet maintenant d'avoir des souvenirs-sourires pour mon bébé... creer sa petite bulle d'amour.

Pas de probleme pour les amis, evidemment tout depend de la presence qu'ils peuvent avoir et des besoins que vous ressentez, c'est super de les sentir ces besoins et d'y répondre. Vous semblez avoir besoin de vous recentrer sur votre noyau familial et effectivement vous arrivez sur une etape si intime pour votre famille que ça me semble logique.

Je te souhaite de trouver l'enracinement qui t'es necessaire pour puiser les forces et le calme qu'il te faut.

[Baam]

Bonsoir Sandra

Quelle journée difficile tu as passée... Mais j'ai l'impression que tu as eu les réponses à tes questions. Si d'autres te viennent d'ici lundi, n'hésite pas à solliciter les médecins comme tu l'as fait pour le déroulement de l'img.
Pour ce qui est de voir ou non ta fille, c'est vraiment un choix personnel. Et surtout, tu, vous risquez de changer d'avis au fur et à mesure des émotions que vous allez ressentir.
Personnellement, je voulais le voir, le prendre, peu importe son physique, je voulais le voir. Je n'avais pas peur. Dans les premiers jours, je me suis demandée si j'avais bien fait et avec un peu plus de recul, heureusement que je l'ai fait. J'aurai eu tellement de regrets et de colère envers moi sinon.

Rassure toi, j'ai du attendre aussi entre le moment où le médecin a fait l'injection et le moment où ils ont déclenché l'accouchement. J'ai pris les médicaments pour préparer le corps à j1, l'img à j2 et le déclenchement à j3 si je peux dire ça comme ça. J'ai donc garder mon bébé sans vie dans mon ventre. Cette idée me terrifiait, je ne comprenais pas pourquoi. Pourtant, avec un peu de recule, je n'en garde pas un souvenir traumatisant (enfin je pense). C'est difficile à expliquer mais cette période n'est pas lourde à porter contrairement à d'autres. Du moins, pour moi. Chacun réagi différemment.
Je ne saurai trop comment décrire ce que j'ai ressenti pendant l'attente. Pour moi, il n'était plus là. Il ne restait que son corps et je me suis préparée à l'honorer (son corps) au mieux.

Je trouve aussi que vous faites bien de vous écouter et d'écouter vos besoins. Faites comme vous pouvez, faites ce qui vous semble bon pour vous.
Les amis comprendront.
Nous avions décidé de ne plus voir personne, de rester à trois dès la première alerte. Et ça a duré jusqu'après l'img. Nous donnions des nouvelles ponctuelles par SMS mais sans plus.

Je vous souhaite beaucoup de courage pour la suite.
L'après img est terrible, sans vouloir t'effrayer. Je ne m'étais pas imaginé souffrir autant et j'aurai voulu qu'on me dise que j'allais tomber bien bas. Et en même temps, quand on est au plus bas, on ne peut que remonter. Tout te semble noir après et c'est bien normal. Comment imaginer du positif après, c'est impossible, pas maintenant. Rassure toi, le noir laisse place à de la couleur petit à petit, plus ou moins rapidement. Je n'aurai jamais pensé dire ça il y a quelques jours...
Je pense comme MariEve que quelque chose meurt en nous, une partie de nous part avec eux et on se rend compte qu'on a changé, il faut l'accepter. Nous ne sommes plus tout à fait comme avant et c'est à mes yeux la preuve de son passage dans ma vie.

Beaucoup de courage, profitez bien des derniers jours ensemble.
N'hésite pas à reposer des questions si tu en as.
Je n'ai pas l'esprit clair ces temps ci et ma concentration est fort limitée.... Du coup, je loupe peut-être des choses...

[*Victoria*]

Merci beaucoup Baam, je sens à quel point c est difficile pour toi aussi, merci de prendre le temps de me répondre, ton témoignage m ai précieux en ce moment.
J essaye de me préparer le mieux possible, j ai acheté une petite couverture que je vais laver et dormir avec ces nuits prochaines pour qu elle est nos odeurs. Avec ma fille aînée nous avons fait pleins de petits bracelets pour qu elle soit "la plus belle du ciel" comme elle dit. Cette nuit ma fille aînée est venu dans mon lit en larmes, disant qu elle ne voulait pas que Victoria parte.. que c est dur.. Je crois que pour elle ce sera un peu plus simple lorsqu elle sera vraiment partie, plus compréhensible je pense pour elle, car pour l instant je lui ai dit que Victoria s endormait tout doucement avant de partir bientôt.. Que je souffre aussi de faire souffrir les miens..
Je suis aller voir l équivalent autrichien du jardin des souvenirs de ma ville pour avoir une impression, nous pensons prendre notre décision sur l après, après, apparemment nous avons quelques jours.
J ai revu la psy qui m a rassuré quant à l accouchement, les sages femmes sont apparemment malheureusement habituées à mon cas et vont faire leur maximum pour nous écouter et nous accompagner.. Je crois que ce qui se passe à côté, à tellement plus d importance, que ce qui va se passer dans mon corps, que la douleur et même le curtage que je vais sûrement avoir après car j ai un grand risque que le placenta ne parte pas ne me fait plus vraiment peur.. La douleur physique comparée à la douleur psychologique me paraît bien plus supportable à l heure actuelle.
Plus lundi se rapproche, plus j essaye d être en accord avec nos choix et plus j ai de doutes .. j imagine que c est normal mais me dire que je vais arrêter son coeur me semble insoutenable.. je préfèrerai tellement que son coeur s arrête naturellement..
Même si je sais qu elle ne vivrait pas et qu il y a de grande chance qu elle parte in utero ou au mieux quelques heures après sa naissance, c est une culpabilité de maman que je vais porter toute ma vie.
Pourquoi la vie nous demande l impossible, nous les mamanges, j espère qu un jour nous pourrons transformer cet expérience de l indicible, de la profonde injustice, de l infini tristesse des décisions impossibles en une force et que notre renaissance un jour nous donnera une vie plus clémente..
Je pense à vous, car vous êtes passé par là, je vous souhaite beaucoup de courage car j imagine que plusieurs mois après on est moins "légitimes" à souffrir, que l entourage est moins present mais que la souffrance est toujours identique. Nous seul savons maintenant à quel point les moments heureux sont précieux, j espère retrouver un jour un peu d insouciance car je pèse maintenant très très lourd..
Moi aussi je jette ici mes pensées, désolé si ce n est pas très clair, Baam sur ce côté tu es bien plus clair que moi, en tout cas quand je te lis!
Si vous penser à des petites choses qui vous ont aidé à J-1 je suis preneuse... car c est difficile de préparer l impréparable..
Merci à vous
Sandra

[MariEve]

A ta question, quoi faire la veille, je viens de tenter de replonger dans mes souvenirs, car ça n'est pas ce que j'ai retenu... nous avions confié notre ainé à mes parents puis nous sommes rentrés chez nous en amoureux et nous avons passé cette dernière soirée comme avant que nous soyions parents : diner simple devant un film (ce qui ne nous arrive quasiment jamais maintenant), couchés, j'ai pris le temps de caliner mon petit bébé et lui dire tout ce que j'avais besoin sur le moment.

Je vous souhaite de trouver ce qui vous fera du bien...
Je pense à vous...

[Baam]

Bonjour Sandra

Effectivement c'est toujours très difficile. Mais il y a un mieux. Je rechute souvent mais je sens que j'avance.
J'ai eu quelques petits soucis à l'accouchement qui, je pense, m'ont empêché d'avancer pendant un certain temps, bien trop faible pour penser, pleurer ou quoi que ce soit. Mais ce n'est pas le moment de parler de soucis à l'accouchement. Effectivement, les équipes sont malheureusement habituées à ce genre de situation et ça se sent au moment de l'accouchement, c'est limite la routine... Je me souviens que j'avais été très étonnée.

Je ne sais pas si vous avez prévu de garder quelque chose qu'elle pourrait porter si vous avez décidé de passer un peu de temps avec elle ou de la voir. C'est une idée parmi d'autre... J'avais, comme toi, dormi avec ce que je voulais lui laisser.

C'est certain que pour ta première fille, ça doit être très difficile aussi. Elle est en âge de comprendre ce qui se passe mais pas de tout comprendre.
Quelle merveilleuse idée les petits bracelets. Ça lui donne une place aussi, une place de grande sœur.

Pour le jardin du souvenir, je ne peux t'aider. Nous ne nous sommes pas posé la question une seule seconde. On savait qu'on s'occuperait de son corps nous même peu importe la manière. Mais c'est chacun comme il peut aussi. On doit déjà prendre tellement de décisions, penser à tellement de chose que remettre à après si c'est possible, c'est très bien.

Effectivement, la douleur psychologique est tellement intense, le moment passé avec notre bébé, même mort, est tellement intense que la douleur physique, on passe à côté. Je n'étais concentrée que sur mon bébé et n'ai pas compris tout ce qui se passait pour moi physiquement à ce moment là.

C'est normal de douter à l'approche du jour j
C'est un geste difficile que de se rendre à l'hôpital en sachant ce qui va se passer. Essaie de garder en tête le pourquoi vous le faites même si c'est difficile. Finalement, ce n'est pas vraiment un choix. C'est ce que ma psy me répète sans arrêt. Et si elle vit à la naissance, les médecins sont ils sûrs qu'elle ne souffrirait pas ? À quoi bon risquer qu'elle souffre. Je dis ça et pourtant je me sens coupable à chaque instant.
Et peut être prévoir quelque chose pour ses derniers instants. Même intérieurement, pas forcément à voix haute mais tu pourrais lui chanter une chanson, lui raconter un souvenir agréable, une histoire,...

Pour cette dernière soirée, fais comme tu peux.
Moi, j'ai passé la soirée à le caresser à travers mon ventre, à jouer avec lui.

On est moins légitime à souffrir oui, et encore, il y en a qui comprennent que c'est long. Entoure toi de ceux qui comprennent et laisse couler les autres jusqu'à ce que tu les supportes à nouveau. Ils ne peuvent de toute façon pas comprendre. Mais tu as encore le temps pour ça.

Je ne sais que te dire pour demain...
Courage, oui il en faudra et en même temps, vous n'avez pas le choix. Je suis sûre que vous allez trouver les ressources nécessaires pour affronter ce moment.
Sourtout ecoutez vous, faites comme vous pouvez, préparez "au mieux" son arrivée.

[andrea79]

Bonjour Sandra,

je pense bien à toi et Victoria. J'espère que la journée te reserve quelques douceurs et vous trouvez une place où vous pouviez prendre des forces.

[MariEve]

Bonjour Sandra,
Mes pensees t'accompagnent également.. je vous souhaite toute la douceur souhaitée et necessaire.

[*Victoria*]

Merci à toutes pour vos messages, vos pensées et votre aide. Lundi a été une journée assez douce, on m a endormi pendant l injection du coup je n était pas consciente et je n ai rien vu.. mon compagnon étant médecin est resté et m a raconté comment tout s était passé.. puis nous sommes partis de l hôpital et nous nous sommes retrouvés tous les 2 dans un hôtel pas loin de là où nous habitons mais je ne me sentais pas de voir mon aînée après, j avais besoin de repos. Hier c était mon anniversaire et je réalise à quel point on compose avec notre vie car hier j ai reçu encore plus d amour de mes proches, ce qui m a redonné un peu des forces..
Là j écris de mon lit à l hôpital, j ai pris les premiers médicaments pour déclencher, aujourd'hui ou demain je vais rencontrer ma toute petite Victoria..
Nous sommes au calme, il fait très chaud mais j ai très froid, mon compagnon est là et nous ne formons qu un, nous allons devenir parent pour la deuxième fois aujourd'hui, j aurai une pensée pour toutes les mamanges du monde qui sont passées par là et pour toutes nos anges et étoiles car si chaque cas est unique il y a une vrai dimension universelle dans nos destins de femmes et de mamans.

[andrea79]

Bonjour Sandra,

vous avez peut-être déjà rencontré Victoria. J'espère que malgré toute la tristesse que la rencontre a été/va être apaisante et magique.

Je garde de la rencontre avec mes enfants des souvenir très précieux, comme le calme dans l'œil d'un cyclone.

Je pense à vous
Andrea